XXIème Horizon
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

XXIème Horizon

Vous, sorciers égarés, venez nombreux nous rejoindre pour faire juste du rp, nous ne nous prenons aucunement la tête. Nous sommes là juste pour nous amuser !!
 
AccueilDernières imagesRechercherS'enregistrerConnexion
Le Deal du moment : -20%
-20% Récupérateur à eau mural 300 ...
Voir le deal
79 €

 

 Fouilles

Aller en bas 
5 participants
AuteurMessage
Paul Morgan
Sorcier
Sorcier
Paul Morgan


Messages : 86
Gallions : 25332
Date d'inscription : 07/07/2010
Age : 42
Localisation : Le monde

Fouilles Empty
MessageSujet: Fouilles   Fouilles EmptyMer 7 Juil - 23:45

Magnifique! C’est comme ça, la vie! À peine on vous voit un peu démuni…c’est fichu ! On vous saute dessus, on prend le contrôle de votre vie, on pousse vos amis à vous trahir…et on vous envoie finir avec vos os au dernier trou du monde, là où il ne se passe jamais rien…

Paul ruminait. En fait, enfoncé dans son fauteuil de première classe, quelque part au dessus de l’océan en route vers Le Caire, Mr. Morgan râlait ferme. Il se sentait outragé, vexé, lésé dans ses droits, manipulé…somme toute : fichu pour de bon.

Wayne Travers n’avait pu être plus clair, vieux tyran, ou il allait prendre du bon temps et se reposer en Egypte, ou il le mettait à la porte. C’était du chantage pur. Mais le rédacteur en chef n’était pas homme à lambiner en menaces vaines. Le dernier reportage de Paul avait été parfait, poignant à souhait, même si on l’avait ramené pratiquement en pièces de justesse jointes. Trois semaines à l’hôpital à se laisser raccommoder avec un conseil à ne pas prendre à la légère : pas question d’aller courir par monts et par vaux. Un long repos s’imposait. Il pouvait écrire si ça lui chantait, prendre des photos si ça lui faisait plaisir mais pas question de courir après des rebelles au Congo ou se faire farcir de plomb par quelque franc tireur dans les rues de Bagdad ou de Kaboul.

Entre rester enfermé chez lui, avec le risque de voir débarquer sa mère et aller se complaire à la contemplation des merveilles oubliées de l’Antiquité, le choix était clair… Il était, de toutes façons de si mauvaise humeur que tout le monde fut ravi de le voir s’embarquer dans l’avion et disparaître de leurs vies pour un certain temps, sans qu’on ait à souffrir en l’imaginant agoniser dans quelque fossé anonyme.

Au moins, il ne pourrait pas se plaindre de l’attention à bord. Les hôtesses étaient aux petits soins avec lui, venaient, indéfectiblement, chaque dix minutes s’enquérir sur le moindre de ses désirs. L’une lui apportait à boire, l’autre accommodait un confortable coussin sous sa jambe blessée, manquait qu’une autre lui gratouille l’oreille pour qu’il ronronne. On commença par le champagne de bienvenue. Il eut droit à répétition, trois fois, rien que pour ses beaux yeux même si on ne lui arracha qu’un sourire, contraint par la plus élémentaire politesse. Après il préféra un whisky, qui apparut avant d’avoir pu dire ouf, à croire que cet essaim féminin jouait avec la magie pour deviner ses pensées. Le dîner surpassa ses espoirs, s’avérant délicieux, arrosé d’un très bon vin. Après un cognac, il se sentait la tête lourde et décida que le moment de dormir était venu. Ruée de mains aimantes. Dossier mis en position confortable, oreiller sous la tête, douillette couverture. Paul se demanda si on n’allait pas lui donner un bisou de bonne nuit. Il dormit comme une souche, habitué comme il était à le faire n’importe où et à la comme on peut.

Le lendemain un légère gueule de bois ne fit rien pour arranger son humeur grognonne. Il profiterait du temps qui lui restait de vol pour s’informer un peu sur sa destination. Le plateau de Saqqara, la plus grande nécropole connue. Tombes royales, temples et autres merveilles antiques, certainement en différent degrés de vétusté.

*Ouais…poussière, mouches et chaleur…la joie !*

Trois choses qui normalement ne le dérangeaient pas le moins du monde quand il faisait partie de l’action…là, il se sentait mis au même niveau que les ruines. Puis, peu à peu, sans s’en rendre même compte, Paul se laissa emporter par la lecture…et puis par le sommeil. Ses rêves furent pour le moins étranges et quand la gentilles hôtesse le réveilla pour servir le repas, il se sentait assez chamboulé.

Arrivé au Caire, il fallut récupérer ses bagages comme tout mortel commun et passer les filtres douaniers. Qu’il soit journaliste ne lui rendit pas la vie plus facile et il dût répondre à quelques questions assez débiles, entre autres s’il travaillait pour le compte de son gouvernement. De là à lui demander s’il était agent de la CIA il n’y avait qu’un pas. Enfin, on le laissa passer en poussant son chariot, se battant avec sa stupide canne et sa jambe qui lui faisait mal. Son humeur empira d’un cran en arrivant face à la foule massée aux arrivées. Une marée de visages inconnus qui guettait anxieusement les passagers à la recherche d’un ami, un mari, un fils…

Une petite pancarte attira son attention. Forcement, son nom y était inscrit. La personne qui la tenait était une toute jeune femme à l’air assez agacé. Rien à voir avec une sympathique hôtesse d’accueil. Vêtue de pantalons kaki et une veste informe, elle portait un gros sac qui avait certainement connu de meilleurs jours et dont la courroie lui croisait la poitrine. Il clopina gaillardement vers elle et pendant un instant, ils restèrent là, à se dévisager assez stupidement.

C’est moi !, dit il enfin en désignant la pancarte.

Elle se contenta de le jauger de la tête aux pieds, avec un brave petit sourire de rien du tout et rangea la pancarte dans son sac, qui semblait pouvoir tout engloutir, avant de désigner la prochaine sortie et lui dire que leur véhicule était garé…par là. On ne pouvait pas dire que la demoiselle soit ravie de le voir. Il se demanda bien pourquoi mais convint qu’elle devait avoir quelque bonne raison, qui à la fin ne l’intéressait pas le moins du monde. Voyant ses difficultés pour faire avancer le chariot, poser la canne et tenir debout en même temps, la charmante créature le poussa et s’empara de l’engin.

Je peux le faire moi-même !, grogna t’il qui détestait se sentir en infériorité et surtout face à un bout de femme comme celle là.

Mais elle l’ignora allègrement et force fut de la suivre en boitant comme un idiot parce que sa fichue jambe lui faisait un mal de tous les diables, cela lui rappela qu’il devait prendre l’analgésique sous peine de devoir endurer le martyre.


J’ai besoin d’un peu d’eau !, informa t’il en se sentant de plus en plus minable.

Sans perdre le calme, elle s’arrêta pour plonger la main dans les profondeurs insondable de son sac à malices et en tira une bouteille d’eau, qui, miraculeusement, semblait très fraîche et la lui tendit après l’avoir débouchée. Il grommela un merci incertain et avala ses cachets sans plus de commentaires. Elle reprit son bien, quasi vide et se remit en route.

Le véhicule, auquel ils parvinrent, au bout de dix minutes de marche forcée, en zigzaguant entre une foule dense, était un vieux Land Rover qui devait avoir connu son heure de gloire quelques vingt ans auparavant si ce n’était plus.

Et…on en a pour longtemps ?, voulut il savoir.

Tout dépendrait. De quoi ?...De tant de choses. Les imprévus, il connaissait ça quand même. Comme par exemple un pneu qui crève au milieu de la nuit et de rien…

Paul maudit copieusement sa chance, le rédacteur en chef, sa famille qui se mêlait à ce qui ne la regardait pas…tout le monde y passa, et pendant qu’il boudait en tirant sur sa clope parce qu’elle ne voulait pas de son aide, la demoiselle avait changé le pneu sans faire de chichis…

Humeur fixée au massacre, il s’emmura dans un silence hostile jusqu’à leur arrivée au campement de toile.

Euh…et l’hôtel ?

Wayne Travers ne lui avait pas touché un mot quant à devoir vivre dans une tente au milieu du désert.

Et il avait eu le toupet de lui parler de repos ? Le vieux était dingue.

Paul écumait…Elle ne s’occupait pas de ses états d’âme et le guida jusqu’à la tente qui lui était désignée. Après quelques explications sommaires sur les installations sanitaires et autres menus détails de la vie au campement, elle le largua au milieu de la nuit avec une lampe Coleman et envie de tordre le cou à tout le monde…
Revenir en haut Aller en bas
Shirley Templeton
Admin
Admin
Shirley Templeton


Messages : 161
Gallions : 38822
Date d'inscription : 08/01/2010

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyVen 9 Juil - 1:54

Depuis le temps qu’elle en rêvait, le jour était arrivé : l’Egypte lui souriait ! Ou presque…

Tout s’était agencé avec une lenteur navrante tant elle était pressée d’être à pied d’oeuvre. Il y avait tant à préparer pourtant qu’elle n’eut pas l’occasion de lambiner. L’équipe de Boston devait rejoindre la mission anglaise déjà sur place depuis un mois en complétant l’équipement requis. Réduits à quatre membres pour divers motifs de dernière heure les privant de la moitié des collaborateurs prévus, les bostoniens en eurent du boulot.
Très organisée, Miss Templeton surveilla méticuleusement l’empaquetage des instruments, outils, livres et autre matériel à embarquer. Pourquoi devait-elle se charger de ça ? C’était plus le travail d’une secrétaire que d’une Egyptologue confirmée ! Le professeur Langmann, surnommé papy, s’en était excusé :

C’est ta première campagne en ce continent, ma petite ! Tous les bleus doivent passer par là. Et avec la défection des autres…

Bref, il manquait de la main d’œuvre… à elle de s’y coller.
Le trajet en avion lui parut interminable. Avec le budget accordé, elle ne s’attendait pas au grand luxe mais delà à voyager avec les colis comme si elle n’était que du bétail… Tous étaient logés à la même enseigne, déjà ça. Le gros quadrimoteur affrété au transport avait connu des jours meilleurs ! De quoi lui faire réciter de nombreux chapelets durant la traversée mouvementée de l’Atlantique.
Exténués, les quatre savants eurent ensuite droit à un périple assez long dans des camions d’une autre époque. Le plus à l’aise était Langmann. Vieux routard habitué à bien pire selon ses dires, on aurait juré qu’il revivait au fur et à mesure qu’ils approchaient du campement. Assise à l’arrière, coincée entre le Docteur Conrad Fulton et le spécialiste en électronique Yann Kristensen, Shirley se sentait moite et très mal à l’aise tandis que papy bavardait avec enthousiasme avec leur chauffeur local : Hakim.

Une installation rudimentaire les attendait. L’équipe présente leur fit bon accueil néanmoins. Papy reçut l’accolade très british de son homologue londonien : le professeur Jameson.
Shirley salua ses consoeurs obligées : Kim Waldon et Julia Balsey.
Laissant les « mâles » converser, les deux jeunes femmes entraînèrent la novice vers la tente qui leur était octroyée :


Trois filles canons pour six hommes ! C’est le harem à l’envers, rigola la piquante rouquine. Le toubib que tu amènes n’est pas mal, Shirley. Pas touche à McFear, hein ! Ni à Scott Reilly ou Julia t’arrache les yeux.

Un peu déboussolée, Miss Templeton fit un tour rapide des installations très sommaires. Les « chambres » étaient séparées de toiles et moustiquaire. Une chaise, une petite table dans chacune, un coffre métallique avec cadenas pour ameublement… Un vrai palace, quoi !

On se lève en général vers quatre heures du matin, les femmes ont priorité pour les douches. Deux cabines, dehors. On préparer le déjeuner avec Shanna, la petite-fille du chef du village. On le prend en commun vers 5 heures ; Jameson nous donne ensuite notre plan du jour, dit Maureen.

On a droit à une pause toutes les heures pour boire et fumer, 10 minutes pas plus. Repas léger vers 11 heures puis sieste jusque 16. On arrête tout à 19 heures. Le repas du soir est assumé par… nous et quelques femmes du village.

Combien d’ouvrier a-t-on à gérer ?

Une trentaine selon les jours. Parfois il n’y a pas un chat… faut allonger la monnaie, alors…


Génial !(soupir).

Vu sa tête, les filles la prirent en pitié.

Viens plutôt par-là !

Elles la menèrent sur une éminence d’où la vue lui coupa le souffle. L’ensemble du plateau lui apparaissait dans la splendeur du crépuscule. Fière encore même si usée par les ans, la pyramide à degré l’émut aux larmes.
Restauré de main de maître par le travail acharné du célèbre Jean-Philippe Lauer, qui y consacra toute sa vie, le site commençait une autre existence en dévoilant un peu de sa splendeur passée.

Le professeur Jameson poursuit les fouilles entreprises l’an dernier là-bas, indiqua Kim en pointant une direction. Non loin de la tombe de Ptahmès. C’est très prometteur. Tu verras demain ! Allons, va te rafraîchir, on vous a laissé du goulasch pour dîner.

La soirée favorisa un peu les uns et les autres à se connaître mieux. Selon son ordinaire peu communicatif envers des étrangers, Shirley écouta plus que ne parla. D’ailleurs à part l’une ou l’autre politesse courtoise, personne ne s’intéressa particulièrement à cette petite au teint pâle si stricte dans sa saharienne couleur sable. Des couples s’attardèrent au coin du feu de camp, elle salua la cantonade et rejoignit son lit de camp.
Pas d’électricité, évidemment… Un groupe électrogène fonctionnait uniquement en cas de fouilles souterraines et pour alimenter une glacière rudimentaire. A la lueur de sa lampe à pétrole, Shirley ouvrit ses draps et se figea. Là, mollement posé sur le coton, un scorpion noir s’agitait. De loin, elle perçut des rires significatifs…


*Une bande de gamins ! C’est sûrement le baptême de la bleusaille.*


S’ils imaginaient que Miss Templeton allait hurler de terreur et s’enfuyant, ils en furent pour leurs frais. Saisissant la bestiole, identifiée comme peu dangereuse, par le dard elle l’éjecta calmement hors de la tente avec un « va jouer ailleurs » clair et net.
Non mais ! Pour qui la prenaient-ils, ces farfelus ? Epuisée, elle se dévêtit, ne gardant que ses sous-vêtements, referma sa moustiquaire et s’endormit comme une masse.


La journée du lendemain fut d’un monotone rasoir. Elle qui avait pensé accompagner le groupe sur le site, se retrouva cantonnée à établir l’inventaire des provisions et à discuter en anglais avec la préposée au repas de midi.

Non, insista-t-elle, je ne suis pas la nouvelle aide cuistot ! J’ai mon doctorat et…

Avec un sourire angélique, la noiraude aux grands yeux veloutés lui tendit l’éplucheur de légumes.
Elle râlait ferme quand les « savants » rentrèrent s’alimenter. L’un ou l’autre eut même le culot de vanter ses talents culinaires. Si le plat manquait de moutarde, celle qui montait au nez de Shirley aurait bien assaisonné les plats.
Faisant fi de la sieste, elle tenta de discuter avec Langmann qui conclut :


T’en fais pas, ma petite ! Ton tour viendra d’aller là-bas. On est assez nombreux et on n’a rien vu d’intéressant jusqu’ici.

Cinq jours s’écoulèrent ainsi, toujours dans la même routine. A défaut, elle parlait à Shanna qui lui livra un peu de son histoire. Elle ne l’avait pas facile, cette gamine. Cadette d’une famille de huit enfants, il lui fallait travailler durement depuis ses six ans. L’école ? Bah… elle apprenait sur le tas ou avec les plus érudits du coin quand ils avaient le temps. Son frère aîné – Karim – avait obtenu le poste de chef du chantier et en était très fiers. Les blancs payaient bien pour déblayer le sable…

Franchement, là, Shirley en avait marre d’être considérée comme la bonne à tout faire dans ce camp.
Même si certains soirs, les archéologues se penchaient sur des fragments prometteurs, il y avait toujours quelqu’un pour l’envoyer voir ailleurs.
Le comble fut atteint quand un matin Jameson lui signifia :


Shirley, il faudrait que tu te rendes au Caire comme il y a deux jours. Cette fois pas aux souks mais à l’aéroport. Tu t’en sortiras seule, je suppose. J’ai besoin d’Hakim et son camion, tu prendras la Land. Je ne sais pas trop pourquoi – de la pub peut-être ? - On nous fourre un journaliste dans les pattes : un nommé Paul Morgan. Il atterrit vers 17 heures.

Impossible de se récuser. En brimbalant, le véhicule l’amena à destination. Dans cet aéroport moderne, elle goûta climatisation, toilettes pimpantes, animation civilisée au point qu’elle fut presque prête à aller au guichet acheter un billet de retour.
Mais la miss était coriace. On lui avait donné une mission, même ridicule, elle l’accomplirait. Surveillant le panneau des arrivées, elle brandit la pancarte préparée.
Quelle ne fut pas sa surprise de voir clopiner vers elle un gars qui aurait pu être sympa s’il n’affichait pas un air des plus renfrognés :


C’est moi !

Sourire contraint… Elle se nomma :

Shirley Templeton, votre chauffeur Mr Morgan.

Très vite elle réalisa que le pauvre jeune homme éprouvait des difficultés entre sa canne et le chariot à bagages. Ni une ni deux, elle prit la direction des opérations et poussa elle-même l’engin chargé. Autant vite filer avant que l’envie de prendre un billet ne l’achève.
Sans s’en rendre compte, elle fonça dans la cohue des passagers ou autochtones.


J’ai besoin d’un peu d’eau !

Ah… Les vols long-courriers déshydratent facilement le voyageur. Elle pila net, fouilla son sac et lui tendit une bouteille achetée la demi-heure d’avant.

*Il mourrait de soif ! Et il prend des cachets… Malade ? *

Elle tint ses réflexions pour elle, se contentant de remballer la bouteille pour poursuivre le périple jusqu’au parking. Bravement, La Rover démarra.

Et…on en a pour longtemps ?

Ça dépendra... pas de moi, en tout cas !

Après le bitume, bonjour la piste aux nids-de-poules. Cela ne rata pas, un pneu creva. Puisque ça lui était arrivé trois fois en compagnie d’Hakim… Shirley avait la main à présent. A ses gestes, elle devina les intentions de Morgan :

Sortez juste de la voiture. J’ai l’habitude.

S’il râlait d’être supplanté par une donzelle, tant pis !
Ils ne parlèrent pas jusqu’à l’arrivée au campement. Où les autres étaient-ils passés ? Elle l’igorait puisqu’elle était partie assez tôt pour passer au Bazar avant d’aller cueillir ce bougon de journaliste à l’aéroport. Force fut de lui montrer ses « appartements » et de lui expliquer les rudiments de la vie locale.
La tête de Paul valait de l’or devant la tente. Il cherchait un hôtel!!


Vous la partagez avec le Docteur Fulton et notre électronicien Kristensen. Sais pas quand ils rentreront. Bonne nuit !

Avec tout ça, elle n’avait avalé de la journée qu’un bête beignet en ville. Furetant sous la toile servant de cuisine, elle avisa la glacière. Il y restait un plat de riz à la viande qui ferait l’affaire. Allumant le réchaud au gaz, elle versa la mixture dans une casserole, la goûta et rectifia l’assaisonnement. Un craquement proche la fit sursauter. Morgan était là qui la contemplait, l’air sombre :

Euh… j’espère que vous n’avez pas trouvé de scorpion dans vos draps ? C’est une blague commune, aux nouveaux venus ici. Avez-vous faim ? J’ai… oublié de vous le proposer. Une bière peut-être ?

Il accepta les deux. Jouant la parfaite cantinière, Shirley les servit. Avalant une gorgée, il l’interrogea. Force fut d’avouer son ignorance :

Je ne sais pas où ils sont tous passés. C’est inhabituel de planter le camp comme ça. Il est vrai que je ne suis là que depuis une semaine et que c’est ma première campagne de fouille. Et… Et vous ? Pourquoi vous envoie-t-on ici ? C’est assez… désert. On n’est même pas sûr de…

Il commença à lui raconter des trucs qu’elle n’écouta qu’à moitié. Tracassée, elle s’énerva soudain.

Venez si vous voulez, j’aimerais jeter un œil au plateau là-bas.

Elle y fut bien avant lui. Plantée, comme ahurie, elle fixait le contrebas. Se tournant à son approche, elle s’excita :

Voyez ! Là, c’est le site illuminé pour les touristes. Plus loin, vous voyez… c’est éclairé aussi ! C’est le site des fouilles ! S’ils y sont c’est que peut-être… Oh mon Dieu, j’ai raté ça !
Prenez votre appareil photo ou ce que vous voudrez, on doit y aller.


En grommelant d’être monté pour redescendre si vite, Morgan suivit aussi vite qu’il le pouvait. Ce qui devait arriver arriva, il chut lourdement. L’entendant rouler sur le sable graveleux, Shirley arrêta sa course et revint en arrière. C’est tout juste si elle ne se prit pas un coup de canne en voulant se pencher pour l’aider à se relever.

Oh ça va ! Je vous laisse vous démerder tout seul si ça vous chante ! J’attends 5 minutes dans la voiture puis j’y vais avec ou sans vous !

Pestant comme un damné, Morgan parvint à rallier la Rover juste comme la Miss lançait le moteur.
La descente se fit à tombeau ouvert ( normal pour une nécropole fouillée)
Leur arrivée ne passa pas inaperçue. Sans se soucier du journaliste, Shirley fonça :


Vous avez trouvé quelque chose ?

Très excité, Papy l’étreignit fortement : On a une stèle… faut y aller doucement pour la dégager et la remonter… J’ai allongé la sauce pour que ça se fasse cette nuit…

Miss Templeton comprenait. La sécurité avait beau être renforcée sur les sites de fouilles, en cas de trouvailles, on se savait pas à quoi s’attendre.
Elle voulut absolument s’approcher, comme la majorité. Morgan, bardé de ses outils de travail flashait à tout va.
Shirley, dévorée de curiosité, se penchait très en avant. Instable, le terrain céda brusquement. Mu par un réflexe, Morgan lui attrapa le bras. Shirley hurla comme s’il l’avait brûlée. Tout devint noir.

Revenir en haut Aller en bas
Paul Morgan
Sorcier
Sorcier
Paul Morgan


Messages : 86
Gallions : 25332
Date d'inscription : 07/07/2010
Age : 42
Localisation : Le monde

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyLun 12 Juil - 12:30

Tout compte fait, il était farci. Fichu pour de bon. Abandonné au milieu de rien. Pas de quoi en faire un plat, il avait vu pire mais quelqu’un avait prononcé, à moment donné, le mot repos et lui, pauvre idiot avait failli y croire. Ça lui apprendrait à être si naïf.

Paul resta là, à éclairer ces environs si peu encourageants, de sa lampe, en se sentant, à quoi bon mentir, un peu déboussolé. Soit, le bled n’était pas un hôtel deux étoiles…en fait pas d’étoiles du tout, à part celles qui scintillaient là haut, au ciel. Faudrait s’y faire. Il pénétra dans la tente, assez vaste et dénicha sa place. Un lit de camp, une chaise, une petite table. Un coffre métallique. Sommaire, succinct mais on ne pouvait s’attendre à plus. Il s’arrangea pour poser son équipement, non sans grogner un peu, juste par habitude. Son jour le jour, au gré de l’aventure, ne valait pas mieux que ça mais au moins il y avait de l’action en l’air…là…c’était le plat total…et il se mourait de soif. Abandonnant le luxe somptueux de sa demeure, il se dirigea vers le seul endroit où il semblait avoir un peu de vie…la tente-cuisine.

Pendant un instant, Paul resta sur le seuil à la regarder. La demoiselle s’activait face au réchaud. Il s’en voulut presque d’avoir été si désagréable avec elle mais c’était plus fort que lui…Il était de mauvais poil depuis des semaines.

Délaissant un instant ce qu’elle faisait, la miss se retourna et sembla à peine surprise en lé découvrant là, bêtement planté au seuil de la tente.


Euh… j’espère que vous n’avez pas trouvé de scorpion dans vos draps ? C’est une blague commune, aux nouveaux venus ici. Avez-vous faim ? J’ai… oublié de vous le proposer. Une bière peut-être ?

Il devina qu’elle ne lui parlait que parce que la politesse élémentaire l’exigeait, lui n’avait pas été d’humeur aux relations publiques.

Non, pas de scorpion. Et oui…je mangerais bien quelque chose et la bière serait la bienvenue…merci.

Comme si ça lui coûtait un véritable effort, il s’assit à la rudimentaire table et la laissa le servir.

Je m’attendais à trouver un peu plus de monde. Savez vous où se trouve le reste de l’équipe ?

Je ne sais pas où ils sont tous passés. C’est inhabituel de planter le camp comme ça. Il est vrai que je ne suis là que depuis une semaine et que c’est ma première campagne de fouille. Et… Et vous ? Pourquoi vous envoie-t-on ici ? C’est assez… désert. On n’est même pas sûr de…

Paul faillit soupirer avec la dernière question et but un peu plus de bière.

Je me pose la même question…Une lubie de mon rédacteur en chef, selon lui j’avais besoin de repos ou peut être il voulait se défaire de moi pour de bon…

Pas la peine d’être un génie pour se rendre compte que Miss Templeton ne prêtait presque aucune attention à l’histoire de ses misères, en fait, elle semblait plutôt énervée.

Venez si vous voulez, j’aimerais jeter un œil au plateau là-bas.

Il regarda dans la direction désignée et calcula qu’avec sa jambe dans cet état, il mettrait un bon moment pour y arriver mais ne l’aurait reconnu pour rien au monde. Au moins lui avait elle laissé le temps de finir sa tambouille et sa bière. Avant qu’il puisse placer un mot, elle avait détalé. Avec un grognement, Mr .Morgan se leva et suivit la demoiselle qui filait bon train avec la grâce d’une gazelle. Il prit assez longtemps pour clopiner jusqu’en haut du plateau d’où elle observait les environ d’un œil d’expert.

Voyez ! Là, c’est le site illuminé pour les touristes. Plus loin, vous voyez… c’est éclairé aussi ! C’est le site des fouilles ! S’ils y sont c’est que peut-être… Oh mon Dieu, j’ai raté ça !

Elle avait sans doute raison. Que le site des fouilles soit si profusément illuminé à cette ne pouvait signifier qu’une trouvaille d’importance. La jeune femme semblait de plus en plus excitée par l’idée d’une découverte historique.

Prenez votre appareil photo ou ce que vous voudrez, on doit y aller.

Après tout c’était bien pour ça qu’on l’avait envoyé là, c’était son boulot de tout regarder, consigner et commenter de manière intelligente mais à force de monter et descendre des plateaux à la suite de Miss Énergie, il finirait éclopé de pour vie. La jeune femme dévalait la côte à bonne vitesse avec l’assurance d’une chèvre…Lui, faisait de son mieux…ce qui n’était pas exactement un exploit. Se ficher en l’air n’entrait pas dans ses plans mais c’est bien ce qui arriva. Pas de quoi s’étonner avec tous ces cailloux ! Sa rencontre avec la planète fut douloureuse...surtout pour son amour propre. Revenant sur ses pas, l’adorable créature se porta à son secours, il manqua de peu de l’éborgner avec sa canne et cela ne fit que détériorer encore plus leur déjà atteinte relation.

Laissez donc…je peux me lever tout seul !, grogna t’il en se demandant comme s’y prendre et ne pas sembler si minable.

Elle réagit de charmante façon.

Oh ça va ! Je vous laisse vous démerder tout seul si ça vous chante ! J’attends 5 minutes dans la voiture puis j’y vais avec ou sans vous !

Nouveau grognement et elle s’éloigna d’un pas vif alors qu’il faisait des efforts méritoires pour retrouver une position verticale. La jambe le faisait souffrir, son amour propre était en miettes et pour comble, il était sûr que la fille tiendrait parole et l’abandonnerait à son sort sans aucune arrière pensée.

Jurant de plus belle, il alla tout de même quérir sa caméra et arriva pile quand elle allait démarrer. S’embarquant à la comme on peut, il eut à peine le temps de s’accrocher que déjà elle entamait la descente vers le site de fouilles, à tombeau ouvert, comme si le Diable était à leurs trousses.

*Ce qui te manquait, une folle au volant…*

Cahots et nids de poule, chaque embardée lui faisait serre les dents pour ne pas se plaindre. Il crèverait en silence, foi de Paul Morgan.

Arrivés sur place, elle bondit hors du véhicule, lui laissant le temps de souffler un peu avant d’aller rejoindre le groupe réuni autour d’un beau trou.


Vous avez trouvé quelque chose ?

Il reconnut le Dr. Langmann en celui qui étreignait la jeune femme, il semblait passablement excité par la découverte.

On a une stèle… faut y aller doucement pour la dégager et la remonter… J’ai allongé la sauce pour que ça se fasse cette nuit…

Paul pouvait comprendre ça, au nom de la sécurité, une trouvaille d’importance devait être mise en lieu sûr avant d’éveiller la convoitise des pillards de tombes. Il avait assez de connaissances en Archéologie pour savoir ça.

Faisant ce qu’on attendait de lui, même si personne ne semblait s’être aperçu qu’il était là, Paul se mit en devoir de photographier tout ce qu’il voyait. Au fond de la fosse, la stèle dégagée se révélait splendide…Miss Templeton voulait tout voir de plus près, elle s’approcha du bord de l’excavation et le terrain, instable, céda…Morgan était juste derrière elle, la retenir fut un réflexe automatique…sauf qu’il ne s’était pas attendu à l’entendre hurler…ni à la cette espèce de décharge électrique qui le rejeta en arrière. Tout le monde se précipita vers eux. La jeune femme était évanouie sur le sable et lui assis su sol, un mètre plus loin se sentant ridiculement mal.


Mais qu’est ce qu’il s’est passé !?, voulut savoir Langmann, tiens…vous n’êtes pas Paul Morgan ?

Oui…je crois…que oui…Sais pas…c’est bizarre, tout ça…Elle….elle va bien ?

On lui assura que Shirley reprenait doucement conscience et on lui passa une gourde d’eau tiède.

Conrad Fulton, qu’il avait rencontré quelques mois auparavant lors d’une réception au Smithsonnian s’approcha.


Génial que vous soyez là, Morgan…Pile poil pour la première trouvaille d’intérêt. J’ai été vachement surpris quand on m’a dit que vous alliez venir…l’archéologie n’est pas précisément votre branche.

Ouais…Travers a des idées biscornues parfois…ou peut être qu’il sait quelque chose que j’ignore.

Fulton éclata de rire.

Pas de conflit armé dans la zone…du moins aux dernières nouvelles, ici c’est le calme plat, on pourra faire notre boulot en paix.

Avec quelques efforts et la poigne solidaire de Fulton, il se remit sur pied en grinçant des dents.

Pas la forme, hein ? Qu’est ce que vous vous êtes pris, cette fois ?

Un peu de mitraille en Bosnie.

Hum…je vois ! J’espère que l’exercice ne vous nuira pas…ici, on lambine pas !

Très encourageant.

Non…ça ira, et même si non, il endurerait sans se plaindre.

Un peu plus loin. Miss Templeton reprenait des couleurs, il boita gaillardement vers elle.

Ça va ?...Je ne sais pas ce qu’il s’est passé tantôt…Je ne vous ai pas fait mal, au moins ?

Elle lui assura que non d’un petit ton mitigé et préféra, de suite, s’occuper à autre chose que bavarder sottement avec lui. Passé l’émoi, tout le monde s’activait à hisser la stèle hors de son cocon de sable. Travail délicat et précis qui demandait toute la concentration de l’équipe. Paul assista au spectacle en se tenant un peu à l’écart, seuls les éclats de son flash donnaient foi de se présence là.

Au fur et à mesure que tout se déroulait, Paul était assailli d’étranges émotions…Une espèce de chagrin angoissant le prit à la gorge. Il fit une dernière photo et s’éloigna du groupe bruyant. Assis sur une grosse pierre, il laissa son regard vaguer sur les environs. Combien de temps resta t’il là ? Pas la moindre idée.


Hey, vous…Ça va ?

Surpris d’entendre cette voix de femme, il leva la tête.

Euh…oui…je crois.

La jeune rouquine sourit, apitoyée.

Ça fait des heures que vous êtes là…C’est merveilleux, hein ? Toute cette histoire, à nos pieds…Saviez vous que…

Et de se lancer dans une intéressante dissertation sur les bontés de l’endroit…L’horizon se teignait de rose, l’aube pointait…

Eho…coucou ! Encore là ? Je vous assomme avec mes histoires…Vos avez l’air absolument …ailleurs.

Non...ce n’est pas cela…j’ai seulement la sensation d’avoir perdu quelque chose…mais ne sais pas quoi !

Miss Waldon secoua la tête en ce disant que le gars était un drôle de pion…Pourquoi avait il soudain l’air si malheureux ?

Allez, cet endroit produit des drôles de sensations parfois…Vous finirez bien par trouver ce qui vous manque…

Il se passa la main dans les cheveux et essaya de sourire.

Oui…peut être…
Revenir en haut Aller en bas
Shirley Templeton
Admin
Admin
Shirley Templeton


Messages : 161
Gallions : 38822
Date d'inscription : 08/01/2010

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyMer 14 Juil - 13:22

L’Egypte !
Si voir son rêve de petite fille se réaliser avait d’abord surexcité Miss Templeton, son désenchantement n’en fut que plus profond. Ce périple ne se déroulait pas du tout comme souhaité. Elle qui ne rêvait que de déchiffrer des trucs, assembler des fragments de poteries ou statues, aider à les dater, se voyait reléguée au rang de bonne à tout faire… tout sauf son métier.
D’un naturel doux et posé, Shirley n’était pas parvenue à s’opposer à cet état de fait même si elle râlait profondément. La goutte qui faillit faire déborder la clepsydre fut celle qui l’envoya perdre un temps bête à aller chercher un journaliste inconnu. Handicapé, de mauvais poil, ce Paul Morgan s’avéra très désagréable, du coup elle le fut aussi.
Tout ressentiment à son attitude de mégère s’envola avec la conviction que l’équipe Jameson-Langmann était en train de dessabler quelque chose sur le site des fouilles.
Entraînant Paul à sa suite, Shirley avait foncé sur le terrain. Papy était très énervé par la découverte en cours. Son excitation gagnait l’ensemble des chercheurs.
Que s’était-il passé pour qu’elle se retrouve étendue sur des toiles de jute avec Fulton penché sur elle ?


Ça va mieux ? C’est l’émotion ou… ?

Je… je ne sais pas. Ça m’arrive parfois… J’allais tomber. Qui m’a retenue ?

Le journaliste, Morgan. C’est un chouette gars, tu sais. Je l’ai déjà rencontré il n’y a pas longtemps. Il a dérapé en te rattrapant et est tombé.

Ah… Tu dis chouette ? Ben pas aujourd’hui. Il a une poigne de fer*rouge* en tout cas.

Se redressant, Miss Templeton massa son bras encore douloureux. Intrigué, le médecin voulut voir. Ses yeux s’arrondirent de surprise :

Mais tu es brûlée ! Et… ça n’a rien d’un coup de soleil. Attends.

Fouillant son sac, il sortit un pot de flamazine qu’il appliqua avec conscience professionnelle et douceur extrême.
L’effet fut instantané, Shirley ne sentit plus rien.


Faudra aussi que tu m’expliques de quoi tu causais dans ton délire…

J’ai déliré ? s’effara-t-elle.

Pas un peu ! Langmann avait l’air bouleversé de t’entendre parler dans une langue incompréhensible.

J’en connais pas mal… Je ne sais pas ce que j’ai pu dire…

Réconforté par une bonne rasade d’eau, elle resta encore assise un moment tandis que Fulton vaquait ailleurs.
Au bout de cinq minutes, l’Egyptologue reprit du poil de la bête et voulut à nouveau s’approcher du champ de fouilles. En chemin, elle croisa son « sauveur » qui, malgré un air assez secoué, s’enquit de sa santé :


Ça va ?...Je ne sais pas ce qu’il s’est passé tantôt…Je ne vous ai pas fait mal, au moins ?

Non, ça va, merci. Merci aussi de m’avoir retenue. Je suis idiote parfois. Vous m’excuserez mais j’aimerais voir ce qui se passe là-bas.

Sans remords, elle le planta sur place et courut regarder la suite de la renaissance de la stèle.
Treuils, poulies, cordes et ouvriers fonctionnaient avec entrain et prudence. Le morceau émergé devait peser plusieurs dizaines de kilos.
Selon ses estimations, Shirley jugea que si elle était entière la stèle serait magnifique. Même sans dépoussiérage, on y distinguait déjà symboles et dessins.
La remontée fut lente, dirigée de main de maître par les professeurs. L’aube pointait son nez quand le craquement redouté se produisit. Libéré de sa gangue sableuse, le fragment s’éleva dangereusement vite vers le soleil naissant. Les superstitieux y virent un signe : l’âme du défunt à qui appartenait la stèle s’envolait vers son créateur, Râ.

La déception n’atteignit pas l’équipe pour autant. Elle possédait déjà de quoi nourrir leur faim de connaissance. Un nouveau groupe d’ouvriers allait arriver déterrer la base encore ensablée, Certains restèrent, d’autres rentrèrent en prenant mille et unes précautions pour transporter le « bébé » jusqu’au campement.

Prête à reprendre le volant, Shirley se rendit compte qu’elle ignorait où se trouvait son passager. La décence voulait qu’elle s’enquît au moins de ses volontés. Rentrerait-il avec elle, quelqu’un d’autre ou resterait-il ?
Se mettant en quête du journaliste, elle le vit revenir en charmante compagnie vers les voitures.


*Waldon n’en rate pas un, celle-là ! Pauvre Morgan !*

Tout haut, elle le héla :

Je rentre au camp. Venez-vous ?

Il sembla hésiter puis secoua négativement la tête.
Bizarrement Shirley se sentit… déçue.


*Qu’il fasse ce qu’il veut, m’en fous*

Haussant les épaules, elle s’installa dans la Jeep et suivit le petit cortège qui ramenait le « trésor » vers le lieu où il serait décortiqué. Jameson fit enfermer l’objet sous la grande tente que Miss Templeton n’avait pas encore pu approcher depuis son arrivée. Les autres y travaillaient souvent dans la journée, bâches relevées, elle savait donc vaguement ce qui s’y trouvait.
Des gardiens postés à chaque angle, comme tous les soirs, furent sévèrement mis en garde contre tout manque de surveillance.


*Bref, pas ce matin que tu verras la stèle !*

Dans le fond, elle était passablement claquée après une journée pareille suivie d’une nuit blanche.
S’accorder quelques heures de repos ne nuirait pas.
Des rêves étranges la hantèrent. Elle en faisait souvent de similaires. Tantôt un masque de chacal se penchait sur elle, lui ordonnant de repartir, tantôt c’était un visage opaque qui lui murmurait des mots doux. L’ensemble finissait quasi invariablement par un réveil en sursaut de terreur.
Cela ne rata pas.


Tu devrais voir un psy pour tes cauchemars, Shirley. Il y en a marre que tu gueules en ameutant tout le monde. En plus on pige que dalle à ton baragouin.

Kim Waldon semblait de mauvais poil.

On a à peine roupillé quatre heures. J’aurais bien joué les prolongations mais il n’a pas voulu… pas encore.


Qui ?

Le tit nouveau, Morgan.

Sans trop savoir pourquoi, cela mit la jeune femme de bonne humeur. Taquine, elle risposta :

Tout le monde n’est pas censé te tomber rôti dans les bras, Kim. Surtout si tu ne fais pas l’effort de t’arranger un peu ! Ces yeux bouffis feraient reculer même un… crocodile.

Elle grimaça en prononçant ce dernier mot. D’aussi loin qu’elle se souvienne, une terreur sans nom s’emparait d’elle à la vue ou l’évocation de ces sauriens.
Laissant Miss Waldon se précipiter sur le minuscule miroir, Shirley prit ses affaires de toilette et sortit vers les sanitaires. L’horaire du camp était chamboulé avec le travail nocturne. A qui le tour était une bonne question. Une cabine était libre, elle se l’appropria. Se dévêtant, Shirley offrit son corps nu au petit jet distribué chichement par la pomme. Des paroles, comme un chant, issues dont ne sait où surgissaient souvent dans son esprit quand elle se lavait de la sorte. Plus forte, plus prenante que d’habitude, la mélodie l’habita. Sans s’en rendre compte, elle chantonna doucement en s’aspergeant.
Soudain la porte de la cabine s’ouvrit à la volée, interrompant son chant. Ahurie, elle entrevit le regard bleu planté sur elle avant de songer à sa nudité. Le temps de réagir la porte s’était refermée. Honteuse, cramoisie, elle coupa le jet. S’essuyant à peine, elle se rhabilla à la diable pour jaillir fustiger le voyeur :


Ça vous prend souvent de venir vous rincer l’œil ? Le panneau occupé était mis, l’eau coulait ! Faudrait apprendre à lire, Morgan !

Bonne humeur envolée, elle fonça vers la tente-cuisine sans se rendre compte de l’air stupéfait du journaliste.
Après avoir enfilé un galette de riz et bu du café à couper au couteau sous le regard intrigué de la petite Shanna, Shirley se dirigea vers la tente des merveilles. Plusieurs membres de l’équipe y travaillaient déjà. La voyant arriver bille en tête, Papy s’interposa :


Tu as une drôle de tête Shirley. Ton incident d’hier ?

Non ! Ça va mais faudrait sérieusement songer à mettre des loquets aux douches !
Je me sens bien, je voudrais voir la stèle de plus près, et…


Embarrassé, Langmann toussota :

Si tu tiens à prouver tes capacités, va plutôt à la table 7 donner un coup de main à Julia qui reconstitue une urne intéressante, et…

Non ! Ecoute Papy, j’en ai marre. On ne m’a pas engagée pour faire de la figuration. J’aiderai Julia après ! JE VEUX VOIR LA STÈLE, MAINTENANT !

Elle se doutait un peu du pourquoi de cette éviction systématique : du vedettariat, rien d’autre. Ces professeurs illustres craignaient-il qu’une novice soit plus maligne qu’eux ?
Jameson – qui évidemment était déjà sur la brèche – sourit :


Laisse-la, James. Elle comprendra vite qu’il s’agit d’un boulot de pro.

Enfin, on lui céda la place. Les pinceaux avaient déjà déblayé beaucoup des fines incrustations. Déjà les dessinateurs reproduisaient fidèlement les écrits et dessins. Emerveillée, Shirley s’approcha comme en transe. À haute vois, elle lut d’un trait :

Moi, Pathmès, scribe royal et chef des armées de pharaon, je m’offre à toi Osiris protecteur de son père et à toi Horus protecteur de son père.
Osiris, souverain du temps-djet, le grand dieu qui réside dans le nome thinite, maître de la Terre sacrée. Osiris, le grand dieu maître d’Abydos, maître du temps-neheh, qui a créé le temps-djet, qui réside dans le nome thinite. Salut à toi, Khenty-Imentyou, grand dieu souverain du temps-djet,
veuille accorder une offrande invocatoire de pain, bière, bovins et volailles au ka du premier prêtre d’Amon, vizir dans la Ville du Sud, directeur de tous les travaux du roi, Ptahmes…


Nul ne pipait mot devant cette hallucinée qui déchiffrait en un clin d’œil ce qu’une équipe normale aurait mis des mois, voire des années à décrypter.

McFear rompit l’enchantement en éclatant de rire :

Joli numéro qu’elle nous fait la bleue. Vous n’allez pas donner de crédit à ses fables, non ?

Jameson était pétrifié, autant que Langmann. Shirley, elle commençait à voir de papillons bleus danse devant ses yeux. Devinez qui poussa une chaise sous son fondement juste au moment où elle vacilla… ?
Revenir en haut Aller en bas
Paul Morgan
Sorcier
Sorcier
Paul Morgan


Messages : 86
Gallions : 25332
Date d'inscription : 07/07/2010
Age : 42
Localisation : Le monde

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyVen 16 Juil - 20:44

Cela ne faisait que quelques heures qu’il était là, après un très long vol intercontinental, une virée dans le désert sur pistes cahotantes , deux chutes et une découverte archéologique, le tout aromatisé d’une étrange expérience qu’il n’était pas prêt à répéter…Paul n’arrivait pas à s’expliquer ce qui s’était passé. Il ne l’avait que retenue du bras pour qu’elle ne se fiche pas en l’air…et une décharge électrique puissante l’avait propulsé en arrière alors que la jeune femme tombait dans les vapes. Mr. Morgan n’avait jamais eu à se plaindre de l’effet qu’il causait sur le sexe opposé mais là…c’était tout de même assez troublant !

Mais sûrement pas autant que cette sensation imprévue de chagrin, d’angoisse…Que diables se passait il avec lui ? C’est vrai qu’être réduit à cet état de semi éclopé avait de quoi déprimer n’importe qui mais Paul était blindé contre les menues misères de la vie. Il en avait déjà vu des vertes et des pas mûres, en verrait certainement d’autres…Alors pourquoi tout à coup…ça ?

La conversation et la compagnie de la rousse Kim Waldon l’aurait sans doute réjoui en d’autres circonstances mais là, tant pis si la miss avait d’autres idées en tête, lui n’en avait qu’une…dormir !


Je pense qu’il est temps pour rentrer, du moins pour moi.

Si tu veux, je te ramène au campement !, dit elle en souriant, avec un coup de cils renversant.

Cela faisait dix minutes qu’ils avaient délaissé le "vous " et passés au "tu" , sans gêne. Elle ne semblait pas être de celles qui se font de la bile pour les circonspections sociales.

Merci, je suis passablement fatigué, là !

Ils avançaient vers les véhicules sans se presser, impossible autrement pour lui, quand il aperçut miss Templeton près de sa jeep.

Je rentre au camp. Venez-vous ?, le héla t’elle

C’est moi qui te ramène, lui rappela Kim, à voix basse.

Abattu, pour quelque incompréhensible raison Paul se contenta de secouer négativement la tête. Il la vit hausser les épaules et monter dans sa jeep pour démarrer presque sur le chapeau des roues.

Tout un numéro, cette Shirley, commenta la rouquine, elle se prend bien pour quelqu’un…et tout parce qu’elle a, soi disant, un doctorat.

Le cas est qu’elle en a bien un.

Ah, tiens…et toi, comment tu sais ça ?

Paul eut un de ces sourires mi figue mi raisin destinés à décourager le plus endurci.

Je suis quand même journaliste, ce n’est pas dans mes habitudes de débarquer quelque part sans savoir ce qui m’attend. J’ai eu assez de temps dans l’avion pour me faire une idée de qui j’allais rencontrer…mais je n’avais pas fait la relation entre elle et le Dr. Templeton duquel j’ai lu quelques publications…

Oh, tu lis aussi des publications sur archéologie ?

Entre autres choses, oui.

Cela aurait été merveilleux si cette femme avait pu se taire un instant, mais c’était trop demander.


En te voyant tantôt faire des photos sur le site, j’ai dû demander qui tu étais…Quand Fulton m’a dit que tu étais Paul Morgan, je ne pouvais presque pas y croire…

Sans commentaires, d’ailleurs aucun besoin, la miss était emballée.

Mon père raffole de tes reportages…Moi, je les trouve trop brutaux, sanglants…cruels !

Ma foi, tenant compte que je me spécialise en zones de guerre, un peu difficile écrire sur la beauté du paysage.

À partir de là, il se remit à des monosyllabes émis à mode grognement mais elle continua à pérorer jusqu’à le laisser face à sa tente. Prenant congé sans plus, il alla s’effondrer sur son lit de camp. Tomber dans un sommeil semi comateux ne lui prit que trois secondes, s’éveiller de son étrange cauchemar une angoissante éternité et encore il fallut que Fulton s’y prenne avec entrain pour le secouer.

Dites donc, mon vieux…drôle de rêve, le vôtre !

Il s’assit sur son lit encore tout étourdi, impossible de se souvenir de quoi tenait le fameux rêve mais en tout cas cela avait été plutôt désagréable….quelque chose à voir avec une trahison et une coupe de poison. Pas trop engageant.

Ça va mieux ?, s’enquit le doc.

Euh…oui.

Ça vous arrive souvent ? De faire des cauchemars pareils, je veux dire ?

Paul haussa les épaules, l’air perdu.

Je…n’en sais rien…non, je ne crois pas…enfin, qu’est ce que ça peut faire ? Vous êtes psychiatre ou quoi ?

Non, pas du tout mais on partage la même tente et je veux savoir à quoi m’en tenir…suis pas habitué qu’on me réveille avec un hurlement d’égorgé…

C’était du poison, dit il, tout bêtement.

Du…poison ?...Eho, Morgan…finissez de vous réveiller, bon sang !

Il le secoua encore un peu et eut l’impression que le journaliste émergeait d’une espèce de transe.

Venez plutôt prendre un café…ça vous remettra d’aplomb…

Paul fit un effort pour reprendre le cours de la réalité, il secoua énergiquement la tête comme si cela allait lui mettre les idées en place et se leva.

Je crois qu’une douche me fera pas de mal…

Allez y, on se retrouve après…je vous servirai de guide tantôt…

Il esquissa un sourire de travers à interpréter à la comme on pourrait et prenant ses affaires de toilette se dirigea vers les installations sanitaires…

La mélodie s’élevait…douce, prenante. La voix qui l’entonnait était délicieuse, caressante…Il sentit son cœur s’envoler joyeusement. Elle était là, juste au-delà du rideau. Il le savait. Son aimée…Le rideau fut écarté et il put repaître ses yeux sur la délicieuse vision de sa nudité…Le chant cessa…et l'illusion avec, Paul se sentit comme le dernier des imbéciles, planté là, comme un voyeur quelconque…Il referma la porte mais ne put bouger d’un pas…Qu’est ce qui lui arrivait ? Et la tenace sensation de chagrin lui serrant de nouveau la gorge, le laissant démuni, confus…

La porte de la cabine s’ouvrant livra passage à une furie, Shirley Templeton semblait prête à lui envoyer une baffe, qu’il aurait méritée mais se contenta de le fustiger, enragée :

Ça vous prend souvent de venir vous rincer l’œil ? Le panneau occupé était mis, l’eau coulait ! Faudrait apprendre à lire, Morgan !

Lui, qui ne restait jamais à court d‘arguments…ne trouva rien à dire. La douche, prise en toute hâte n’aida en rien pour améliorer son misérable état d’âme.

Tout le monde semblait avoir trouvé son occupation, le fait est qu’il avala un café épais et fort à en donner de la tachycardie, en parfaite solitude, pour après flâner par là en quête de quelque chose d’utile à faire. Il arrivait prés de la tente, nommée des merveilles, quand la voix outrée du Dr. Templeton s’éleva. Elle était furax, pas de doute.

JE VEUX VOIR LA STÈLE, MAINTENANT !

La demoiselle ne manquait pas de caractère et exigeait, en juste droit, le même privilège des autres studieux là rassemblés. Curieux, Paul clopina vers la tente, juste pour assister à une démonstration ahurissante de savoir. Comme qui lit noir sur blanc, la page d’un livre, la jeune femme déchiffrait les symboles de la stèle…Cela n’aurait eu rien de trop extraordinaire, la fille était douée et avait un doctorat et égyptologie, ce qui laissa Paul pantois est que lui aussi pouvait parfaitement comprendre les hiéroglyphes…comme s’ils étaient écrits en anglais…or, lui n’avait jamais envisagé des études sur le thème…

Tout le monde resta bouche bée, regardant Shirley…le rire moqueur de McFear, rompit désagréablement le silence presque religieux qui s’était établi.


Joli numéro qu’elle nous fait la bleue. Vous n’allez pas donner de crédit à ses fables, non ?

Jameson ne pipait mot, il était sidéré, tout autant que Langmann, la petite nouvelle venait de déchiffrer d’une tirade un texte que les plus érudits des érudits auraient mis très longtemps à comprendre, ils savaient assez long sur le thème comme pour savoir que la jeune femme ne se payait pas leur tête.

Mais voyons, insista McFear, vous ne pouvez pas la prendre au sérieux…

Vous feriez bien pourtant, se trouva en train de dire Paul, c’est…

Pas le temps de s’expliquer, miss Templeton vacillait dangereusement, il s’empara d’une chaise pliante et la poussa sous son séant juste au moment où elle tombait. Blême et tremblante, en proie d’une très compréhensible agitation.


Apportez de l’eau, McFear, au lieu de jouer les envieux !

L’archéologue lui décocha un regard meurtrier mais s’acquitta, de mauvaise grâce. Prenant la gourde, Paul se pencha vers la jeune femme, lui trouvant un air absent, comme si son esprit voguait très loin de là…

Buvez un peu d’eau…ça vous fera du bien…

Elle leva la tête et pendant un instant leurs regards s’accrochèrent… Ce qu’il trouva au fond de ces yeux verts le secoua…interrogation, chagrin…amour !? Mais en une seconde Paul fut conscient que ce regard ne lui était pas adressé, à lui…


Buvez un peu d’eau !

Retombant sur terre, elle fronça son joli nez et son regard se fit râleur...parfait, de nouveau le Dr. Templeton en toute sa splendeur. Il ne se garda pas son sourire en coin, à peine ironique et la laissa boire tout son soûl alors que les autres présents les regardaient comme s’ils étaient des phénomènes de cirque.

Quoi ? On a quelque chose de bizarre ?, s’enquit il, rogue, elle est sous le coup d’une grosse émotion…Ce n’est pas tous les jours qu’on se trouve face à face à…ça !, et il désigna la stèle, et vous savez que ce que le Dr. Templeton ne vous raconte aucune fable.

Ah…parce que vous êtes aussi un experte en égyptologie, Morgan ?, riposta McFear, définitivement vexé.

Non…mais les Drs. Jameson et Langmann vous le confirmeront…

Comment leur expliquer qu’il avait lu chaque ligne en la comprenant comme si ces symboles étaient sa langue maternelle ? À moins de vouloir passer pour fou, il se garderait ça pour lui et essaierait de comprendre comment tout cela était possible.

C’est tout de même très…surprenant…quelle facilité …quelle maîtrise…Ma chère Shirley…, c’était Langmann, qui sincèrement ému, venait la serrer dans ses bras, tu es un génie…un miraculeux petit génie…

Jameson, plus ronchon ne fut pas si facile à la détente mais ses propres connaissances ne pouvaient que confirmer la traduction de la jeune érudite mais comme bon britannique il sut garder une expression indéchiffrable mais ne trouva non plus la façon de refuser que la jeune égyptologue travaille de concert avec eux. Un sacré coup pour son amour propre.

Je vais chercher ma caméra…après tout, c’est mon travail de consigner tous les détails de cette découverte.

Nous ne voudrions pas que ceci soit de connaissance publique, intervint encore McFear, nous devons…

Paul se tourna vers lui et le dévisagea, sans aucune aménité.

J’ai un travail à faire et croyez moi, McFear, ce n’est pas vous qui allez m’en empêcher. Après tout, le monde a tout le droit de savoir que vous avez trouvé la stèle de Ptahmès…Même si elle n’est pas complète

Pas complète ? Mais voyons…

Paul haussa les épaules dans un geste plein d’humeur et signala les dernières lignes visibles.

Quand vous aurez fini de corroborer la version du Dr. Templeton vous vous rendrez compte qu’ici manquent encore quelques détails sur la vie de ce brave Ptahmés…sur sa famille…sur son quotidien…les antiques étaient des prolixes conteurs et étant donné que cette stèle est une présentation aux dieux…je doute trop qu’il ait omis le moindre détail…

Comment diables savait il tout cela ? Tout le monde semblait se poser la même question.

Vous me laissez sans mots, Morgan…, dit le Pr. Langmann, mais…comment … ?

Il se passa la main dans les cheveux, l’air embarrassé.

Euh…simple déduction.

Et avant que personne ne pipe un mot de plus, il avait fait demi tour et était parti aussi vite que le permettait sa jambe.

Drôle de pion, ce Morgan, grommela Reilly en s’armant d’un pinceau pour nettoyer le bas de la stèle.

Oui, soupira Langmann, songeur, il semble savoir plus qu’on ne le croirait…quel est ton avis, Shirley ?

Quand Paul revint avec sa caméra, il trouva le groupe, au grand complet penché sur la fameuse stèle. La jeune femme désignait tel ou tel symbole en donnant des explications précises. Il resta là, un moment, à la regarder…puis enfin commença à prendre des photos.
Plus tard, seul dans sa tente, il révisa le matériel assemblé. Le thème principal était la stèle, vue de tous les angles…et Shirley Templeton…vue de tous les angles. Cette découverte le laissa songeur. Il passa les clichés à son ordinateur portable, les effaçant de la mémoire de la caméra avant de ressortir.

Le camp faisait la sieste, lui n’avait pas envie de dormir même si le soleil tombait à pic et la chaleur était harassante, il dirigea ses pas vers l’élévation d’où on dominait le plateau, cela lui prit son temps mais la vue valait l’effort…Abstrait dans la contemplation du désertique paysage il n’eut conscience de sa présence que quand elle fut tout près de lui. Son comique couvre chef en toile le fit sourire.


Ça vous prévient conte l’insolation ?...Non, moi ça va…Suis habitué aux intempéries de toute classe…Non, la chaleur ne me dérange pas non plus…même si je ne me plaindrais pas d’avoir une belle piscine…Alors, ils vous ont ouvert la porte au monde des grands ?...Pas à dire, vous les avez épatés.

Elle était si jolie, cette fille sans artifices. Son regard lumineux suffisait. Et il voulait croire qu'elle ne lui en voulait pas trop pour l’épisode de la douche.

Euh…je voulais m’excuser pour…ce matin…Ce n’était pas du tout mon intention interrompre votre bain…je sais que mes explications peuvent sonner absurdes mais…quelque chose de très étrange s’est passé…en fait, depuis que je suis ici, il se passe des trucs bizarres…en commençant par la décharge électrique…Quoi ? Je vous ai brûlée ? Mais…ça a été très étrange…j’ai moi-même failli me trouver mal…Allez savoir ! Je n’ai pas d’explication pour ça…

Elle non plus. Ils restèrent plantés face à face, sans trop savoir que dire.

Peut être que…nous devrions faire l’essai...enfin, juste pour avoir le cœur net…

C’était sans doute une proposition assez stupide mais Paul se refusait à croire qu’un simple attouchement puisse causer tant de maux…Il tendit sa main et elle, assez dubitative y posa la sienne…La décharge fut brutale et douloureuse, ils s’écartèrent vivement, manquant de peu de s’étaler mais le contact avait été trop bref pour causer trop de ravages.

Wow…Dr. Templeton…vous êtes vraiment du haut voltage, vous !...Vous réagissez toujours comme ça avec les gars qui vous embêtent ?...Ah bon…suis le premier ?

Avec un soupir dépité, Paul se dit qu’il n’en voulait pas, de ce genre d’exclusivité…finir électrocuté n’entrait pas dans ses priorités immédiates pourtant convint que c’était affreusement dommage…il se mourait d’envie de la toucher…
Revenir en haut Aller en bas
Shirley Templeton
Admin
Admin
Shirley Templeton


Messages : 161
Gallions : 38822
Date d'inscription : 08/01/2010

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyDim 18 Juil - 17:31

Quelle nuit étrange ! Ce cauchemar récurrent était agaçant… dérangeant. Elle le pensait disparu mais depuis qu’elle était au camp, il revenait en force, l’épuisant moralement et physiquement.
L’épisode de la douche l’avait énervée. Morgan ne lui faisait pourtant pas l’effet d’être un voyeur notoire. Il avait une suffisamment belle gueule pour ne pas avoir à reluquer les filles à poil contre leur gré ; elles ne devaient qu’avoir l’envie de s’y soumettre joyeusement. Pour s’en convaincre, il n’y avait qu’à regarder la façon dont Kim et Julia le couvaient des yeux.

La stèle !
Alors là, comme démonstration de ses talents, elle y avait été fort. Ce n’était pas son intention mais quelque chose d’irrésistible avait parlé… à sa place.
Ses professeurs à l’université avaient remarqué son don qui, curieusement, fonctionnait plus avec de vrais fragments que leurs reproductions photographiques ou copies. Et Shirley évitait de toucher tout ce qui se rapportait à la XVIIIème dynastie car, à chaque fois, elle se sentait bizarre.

De débiter quasi d’une traite les hiéroglyphes de la pierre l’avait « fatiguée » et sans l’intervention de Paul, elle serait tombée.
Dans un état semi-hypnotique, elle s’était assise, le cerveau en coton. Son regard plongea dans celui posé sur elle alors qu’on lui tendait de l’eau.


*TOI ! C’EST TOI !*

L’impression fugace d’un ineffable bonheur l’envahit pour s’effacer presque aussitôt.

*Toi qui ? C’est Morgan, idiote !*

Il répéta :

Buvez un peu d’eau !

Cette fois, elle avala goulûment tandis qu’un silence pesant régnait autour d’eux. Des pensées agitaient l’esprit du Dr Templeton :

*Qu’est-ce qui se passe ? Un moment j’ai cru, vraiment cru que… Que quoi ? Que tu deviens dingue, voilà tout !*

Apparemment, il s’était produit quelque chose au sujet de Paul. Les autres les regardaient comme des bêtes de foire ce qui agaça le journaliste :

Quoi ? On a quelque chose de bizarre ?Elle est sous le coup d’une grosse émotion…Ce n’est pas tous les jours qu’on se trouve face à face à…ça !, et il désigna la stèle, et vous savez que ce que le Dr. Templeton ne vous raconte aucune fable.

*Comment sait-il ça, lui ?*


McFear l’attaqua, Paul se défendit. Puis Papy, ému, vint enserrer dans ses bras celle qu’il traita de « miraculeux petit génie »
Le comble fut atteint quand celui de qui on attendait le moins la confirmation de la traduction décida d’aller chercher son matériel photographique en affirmant :


J’ai un travail à faire et croyez moi, McFear, ce n’est pas vous qui allez m’en empêcher. Après tout, le monde a tout le droit de savoir que vous avez trouvé la stèle de Ptahmès…Même si elle n’est pas complète
.

*Par la barbe postiche de pharaon… il a compris ça ?*

Ce qu’il appela déduction étaient fracassantes :

Ici manquent encore quelques détails sur la vie de ce brave Ptahmés…sur sa famille…sur son quotidien…les antiques étaient des prolixes conteurs et étant donné que cette stèle est une présentation aux dieux…je doute trop qu’il ait omis le moindre détail…

Morgan lui parut assez embarrassé en sortant de la tente. Reilly le taxa de drôle de pion et Langmann demanda :

il semble savoir plus qu’on ne le croirait…quel est ton avis, Shirley ?

Hein, euh… sur Morgan ou sur la stèle ?

Pas encore remise complètement, la jeune femme s’embrouillait :

Morgan ? Je ne sais pas du tout… Il est *troublant* plus érudit qu’on ne croirait sur des sujets peu familiers dirait-on. N’empêche qu’il a absolument raison : un gros bout de la stèle est resté dans le sable. Sans doute porte-t-il ce qui manque.

Langmann et Jameson la prièrent de reprendre la traduction. Absorbée à sa tâche, munie d’un crayon pour signaler tel ou tel détail, Shirley perdit toute autre considération. Elle ne vit rien du manège de Paul qui la photographiait autant, sinon plus, que la stèle.

Le registre supérieur détaillait les légendes traditionnelles d’Osiris et celle du défunt Ptahmès à gauche comme à droite. Le texte s’arrêtait avec ces phrases :


La terre vit de ce que tu as créé.
Puisse-t-il donner tout ce qui provient de son autel quand le dieu s’est satisfait de ses offrandes ;
puisse-t-il donner un millier de toutes choses bonnes et pures, de l’eau fraîche, du vin et du lait lors de chaque fête saisonnière qui a lieu dans son domaine, au ka du premier prêtre


Chaque évocation du mot prêtre faisait frissonner Shirley qui sentit une énorme fatigue l’investir. La voyant à nouveau très pâle, Papy décida de lui donner du repos :

Avec tout ce que tu as déjà traduit, on devrait se débrouiller. Il ne fait pas l’ombre d’un doute que c’est un original inédit. Va faire prendre l’air Shirley, dors un peu, et… merci.

Désoeuvrée, Shirley passa par la « cuisine » mais nul n’avait besoin de son aide. Chacun se nourrirait au petit bonheur ce jour de découverte. Elle n’avait pas faim, ni sommeil.
Piquant une bouteille d’eau, l’esprit encore encombré par la danse des mots du passé, elle dirigea ses pas vers le sommet du plateau d’où la vue était splendide.
En grimpant, elle s’étonna à peine de distinguer la haute silhouette du journaliste qui observait l’horizon malgré le soleil écrasant.
Il l’entendit arriver et se retourna, moqueur :


Ça vous prévient contre l’insolation ?

Elle haussa les épaules face à cette allusion à son couvre-chef peu stylé :

C’est pas très élégant mais ça rafraîchi. Euh… Vous ne portez jamais de chapeau ? Vous tenez le coup ? Pas trop… chaud ?

Non, moi ça va…Suis habitué aux intempéries de toute classe…Non, la chaleur ne me dérange pas non plus…même si je ne me plaindrais pas d’avoir une belle piscine…Alors, ils vous ont ouvert la porte au monde des grands ?...Pas à dire, vous les avez épatés.

Pourquoi rougir, elle se trouva stupide en bredouillant :

Je… je ne cherche à épater personne. Je crois qu’il était temps de leur montrer que je sais faire autre chose que la cuisine et le chauffeur.

Il était… adorable avec ce petit air confus en évoquant la scène du matin :

Ce n’était pas du tout mon intention interrompre votre bain…je sais que mes explications peuvent sonner absurdes mais…quelque chose de très étrange s’est passé…en fait, depuis que je suis ici, il se passe des trucs bizarres…en commençant par la décharge électrique…

Ah… moi ça m’a brûlée. Fulton n’en revenait pas *moi non plus*

Quoi ? Je vous ai brûlée ? Mais

Vous-même avez-vous ressenti… quelque chose ?

Ça a été très étrange…j’ai moi-même failli me trouver mal…Allez savoir ! Je n’ai pas d’explication pour ça…

J’aimerais en avoir une rationnelle… je suis aussi… surprise que vous.

Elle aurait voulu lui avouer qu’elle ne ressentait ces bizarreries que lorsqu’elle était en contact avec des objets de la 18ème dynastie. Comparer Morgan à une antiquité millénaire était tellement fou qu’elle faillit rigoler. Lui, il poursuivait sa petite idée :


Peut être que…nous devrions faire l’essai...enfin, juste pour avoir le cœur net…

*Le cœur net de quoi, Seigneur ? Que l’on est dingue ?*

La main tendue était à la fois irrésistible et… répulsive.

*Autant savoir s’il ne s’agit que de coïncidences !*

Rapide, elle toucha à peine la paume du journaliste et… s’en mordit les doigts. Un vrai court jus !
Lui aussi s’était pris une décharge ! Mi-amusé mi-tracassé, il sourit douloureusement :


Wow…Dr. Templeton…vous êtes vraiment du haut voltage, vous !...Vous réagissez toujours comme ça avec les gars qui vous embêtent ?

Ben… Non ! Heureusement ! dit-elle en soufflant sur ses doigts.

Ah bon…suis le premier !

Le premier… humain et… vous ne m’embêtez pas… Paul.

Ils se regardèrent à distance respectueuse, l’air aussi gauche l’un que l’autre.

Je dois vous dire un truc qui va sûrement me faire passer pour une dingue, mais ça, vous vous en doutiez déjà. Mon premier contact… bizarre, je l’ai eu… dans un musée d’arts égyptiens. On ne pouvait pas toucher mais… je n’avais que six ans. Ma passion pour l’Egypte est née de ce jour-là : évanouissement incompréhensible.

La réaction de Morgan fut telle qu’elle l’avait imaginée :

… non, bien sûr que non, vous… tu n’es pas une momie ! ( rire) Il manque des bandelettes !
… J’en sais autant que toi… c’est-à-dire rien. Dis… ça t’arrive souvent de lire les hiéroglyphes ?... Ah ! Une première aussi ? Nous sommes fins ! En parlant de fi… j’ai faim maintenant. Ça te dit de descendre manger un bout ?


La proposition l’agréait et Shirley en fut toute contente, Dieu sait pourquoi.
Elle aurait voulu lui prendre la main pour descendre cette pente. Elle s‘abstint.
Le voir clopiner ainsi lui faisait mal à elle aussi. Se mordant la lèvre, elle osa, timide :


Les toubibs disent quoi de ta blessure ?... Six mois ? s’effara-t-elle. Peut-être plus ? Je… Je suis navrée.

Elle l’était sincèrement.

Repas léger, sujets épineux évités, ils bavardèrent comme de vieux amis sous la tente.


Oui, j’ai mon doctorat. Je n’en fais pas état… je suis… *affreusement timide*réservée… Non, personne ne m’attend sauf Isis : ma chatte des sables. Elle est en pension chez une voisine de palier… et toi ? Combien de minettes cachées ?

Aucune selon lui, ce qui ne déplut pas à Shirley. Situation étrange… pas à ça près ! Rares étaient les personnes à qui se confier sans arrière-pensée! Avec Paul tout était facile, coulant de source… sauf cette extraordinaire « allergie » !
Elle l’écouta raconter l’un ou l’autre reportage, les idées vagabondes pourtant.
Il remarqua sa distraction, Shirley sourit :


Excuse-moi, je pensais à un truc… concernant notre... problème. J’ai eu l’occasion de beaucoup parler avec Shanna… oui, la petite de la cantine. Elle prétend que sa mère a un don de… voyante…
Charlatanisme pour gogo de touristes, sûrement mais… que risquerions-nous ? Enfin, je dis ça… mais ça n’engage à rien.


Il n’était pas contre, restait à savoir quand rencontrer cette dame.
Ils étaient si proches, si mutuellement en confiance qu’aucun ne remarqua la présence de Miss Waldon qui toussa afin d’attirer leur attention :


Je vous dérange ?

Sursaut mutuel, déni similaire :

Bien sûr que non !

Papy veut te voir, Shirley ! Il bloque sur un passage. Si ça ne t’ennuie pas, je prends la relève
!

Autant lui dire « dégage », le message était clair.
Un sourire, un clin d’œil à Paul, le Dr Templeton reprit du service.


McFear, Reilly, Jameson , Basley et papy étaient en vive discussion :

Shirley ! l’accueillit ce dernier avec ferveur, nous avons un os ! Nous ne sommes pas d’accord sur cette phrase.

En soupirant, la jeune femme les éclaira. Il s’agissait du rituel d’abnégation :

C’est une autre tournure que celle du livre des morts. Le défunt vante ses prouesses et se lave de toute faute. Ne me dites pas que vous ne l’aviez pas pigé.


Pas folle la guêpe ! N’importe quel érudit en la matière aurait été capable de comprendre ce passage.

Jameson intervint :


Nous te croyons mais certains symboles sont inédits. Nous savons qu’une reproduction du livre existe à Thèbes. Comparer nous semble utile. Puisque tu lis ça comme du papier à musique, un saut là-bas, une copie et… nous serons fixés.

Quoi ? Vous voulez que je quitte le site pour Thèbes ?


Temporairement ! Le temps de photographier ou recopier les passages que tu jugeras utiles, affirma Papy. Tu rendrais un grand service à cette expédition !

*Et pendant ce temps, vous dessablerez l’autre partie en m’en évinçant de la primeur !*

Que faire sinon que d’accepter cette mission ?
Frustrée, Shirley haussa les épaules et partit faire son paquetage. La torpeur eut raison d’elle son petit bagage bouclé.
Lorsqu’elle s’éveilla la nuit tombait. Un peu dans les vapes, elle sortit prendre l’air, une soif intense l’habitant. Peu d’âmes circulaient encore à cette heure. Dans la clarté lunaire, elle distingua a stature de Morgan. Elle se devait de l’avertir de son départ. Résolue, quoique bizarrement triste, elle se dirigea vers lui.
Une silhouette se découpa près de la sienne.


*Il n’est pas seul…*

En retrait, elle observa. Même si elle aurait souhaité être une souris sourde, elle entendit Kim roucouler :

Moi je brûle… autrement ! Veux-tu que je te montre ?

Voir ces corps se rapprocher, s’étreindre causa une douleur intolérable au cœur de Shirley.
Comment rejoignit-elle son lit de camp ? Pourquoi y pleura-t-elle toutes les larmes de son corps ? Elle n’en savait rien et s’en fichait royalement.

A l’aube, Hakim au volant de la Rover l’attendait.
Personne d’autre pour lui dire au revoir. Miss Templeton grimpa dans le véhicule…

Revenir en haut Aller en bas
Paul Morgan
Sorcier
Sorcier
Paul Morgan


Messages : 86
Gallions : 25332
Date d'inscription : 07/07/2010
Age : 42
Localisation : Le monde

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyMar 20 Juil - 15:41

Le premier… humain et… vous ne m’embêtez pas… Paul.

À six ans, dans un musée, elle avait eu la même réaction. Ce qu’elle dit après lui alla droit au cœur. Elle avait du style, la demoiselle !

Non, bien sûr que non, vous… tu n’es pas une momie ! Il manque des bandelettes !

Il adora son rire et l’éclat de ses yeux. Impossible autrement, elle lui faisait un drôle d’effet !

Dis… ça t’arrive souvent de lire les hiéroglyphes ?...

Bonne question. Elle avait remarqué.

Euh…non...en fait, c’est bien la première fois…

Ah ! Une première aussi ? Nous sommes fins ! En parlant de fi… j’ai faim maintenant. Ça te dit de descendre manger un bout ?

Ils étaient passés au « tu » sans aucun problème. Ça faisait du bien. Il se sentait parfaitement bien avec elle. Pourquoi ? Pas la moindre idée. Elle était comme une bouffée d’air frais, sans artifices…

Oui, j’ai faim aussi…allons y !

La descente jusqu’à la tente n’avait rien de scabreux…sauf que si l’on boîte misérablement ça devenait un poil désagréable, mais Paul tint bon…en tout cas, il n’était pas question de s’accrocher à la belle…pas besoin d’un volta…

Les toubibs disent quoi de ta blessure ?

Tiens, elle s’intéressait à lui.

Ça prendra du temps…six mois…qui sait si plus !

Six mois ? Peut-être plus ? Je… Je suis navrée.

Pour une raison qui lui échappa, il fut ravi qu’elle soit navrée

Pas de souci…question de s’y faire…

Oui, Bien sûr ! Clopiner minablement aux côtés de la demoiselle le comblait de bonheur ! À d’autres avec ça ! Il aurait voulu se montrer sous son meilleur jour…mais le simple essai de presser le pas lui fit un mal de chien. Aouch !...ils arrivèrent à la tente et il se laissa tomber sur la première chaise venue en bénissant le ciel…Elle eut l’heur de dénicher une bière toute fraîche et s’occupa à réchauffer la tambouille.

C’est quand même quelque chose…tu as un doctorat en égyptologie et là, il me semble que les autres abusent un peu…

Oui, j’ai mon doctorat. Je n’en fais pas état… je suis… réservée…

Pourtant tu as pas mal de quoi te sentir fière…C’est pas tous les jours qu’une bleue leur fait si bellement la leçon !

Elle était magnifique…adorable ? Ben oui…c’est exactement ce que Paul Morgan pensait. Cette file sans détours ni artifices était très différente aux femmes qu’il fréquentait. La perle rare. Or une perle pareille devait avoir forcement quelqu’un qui veille jalousement sur elle…Il posa la question, mine de rien...en se sentant comme le plus imbécile des hommes…enfin, pas si imbécile que ça !

Non, personne ne m’attend sauf Isis : ma chatte des sables. Elle est en pension chez une voisine de palier…

Magnifique, il aimait bien les chats, lui !

Et toi ? Combien de minettes cachées ?

Rien de plus légitime que cette question. Il sourit, soudain de très bonne humeur et secoua la tête.

Aucune.

Bien sûr, elle n’était pas obligée de le croire, pourtant, c’était la plus stricte des vérités. En tout cas, cela sembla lui agréer, elle souriait, à l’aise. Tout autant que lui…c’était étrange mais il se sentait comme s’ils avaient été copains toute la vie ! C’était facile de parler avec elle, pas besoin de jouer les héros ni rien de semblable…même si à moment donné elle avait l’air de ne pas faire du tout attention à ce qu’il racontait…

Coucou…suis toujours là !

Excuse-moi, je pensais à un truc… concernant notre... problème. J’ai eu l’occasion de beaucoup parler avec Shanna…

Shanna ?

Oui, la petite de la cantine. Elle prétend que sa mère a un don de… voyante…

Ah bon…et ?, il ne voyait pas trop en quoi ça pourrait les aider...une voyante ?

Charlatanisme pour gogo de touristes, sûrement mais… que risquerions-nous ? Enfin, je dis ça… mais ça n’engage à rien.

Il se voyait mal en train de laisser qu’on lui lise la paume de la main ou qu’encore on prétende voir son futur dans une boule de cristal…mais si ça pouvait la faire heureuse…

Ma foi…si tu penses que ça peut aider…

Ils auraient pu en parler un bon bout de temps mais voilà que celle qu’on attendait le moins s’amenait.

Je vous dérange ?

Seule la politesse la sauva de se faire rabrouer méchamment. Paul aurait volontiers aimé la voir disparaître mais Miss Waldon semblait ravie de l’effet surprise.

Bien sûr que non !

Papy veut te voir, Shirley ! Il bloque sur un passage. Si ça ne t’ennuie pas, je prends la relève !

La relève ? De quoi diables parlait elle ? En tout cas, ce fut très clair pour Shirley qui se leva et vida les lieux avant qu’il ne puisse dire quoi que ce soit. Kim prit sa place, un sourire enjôleur aux lèvres.

Alors…de quoi bavardiez vous avec tant d’entrain ?, voulut elle savoir.

De momies et autres…

Cela la fit rire, comme s’il était incapable de s’intéresser à ça !

La petite a causé une certaine impression…pour qu’on veuille connaître son avis !

Sur quoi encore ? La fameuse stèle ?

Et quoi d’autre, à ton avis ? On va parler de ça encore un bon moment, là…mais enfin…on s’en fiche un peu, non ?

Paul s’empressa de boire ce qui restait de sa bière.

Euh…c’est une découverte on ne peut plus intéressante…

Je ne m’imaginais pas que cela attirerait tellement ton attention…

Il y avait tant de choses qui l’auraient surprise…comme par exemple qu’il n’avait qu’une envie : se tailler au plus vite ! Mais bien sûr, la rouquine avait d’autres idées en tête…le séduire, entre autres ! Paul n’était pas du genre difficile…il plaisait aux filles et les filles lui plaisaient. Normalement tout allait bien et tout le monde content…mais là…

Cette chère Kim n’y allait pas de main morte. Lui, se retranchait dans les dernier bastions de sa dignité et résistait vaillamment. Où diables était passée miss Templeton ?


Il n’en sut rien jusqu’à croiser Jameson et Langmann. Les deux hommes discutaient avec entrain.

Morgan, justement avec qui nous voulions parler. Il semblerait que les symboles anciens n’ont pas de mystère pour vous…

Je ne dirais pas ça mais enfin…de quoi vouliez vous me parler, Pr. Langmann ? Ne me dites pas que vous allez m’offrir un poste dans votre équipe.

Bien entendu, ils n’avaient pas la moindre intention de le faire au lieu de cela ils lui proposèrent de se rendre à Thèbes.

Vous trouverez sans doute l’endroit fascinant, assura Jameson, nous avons conclu qu’il serait intéressant de comparer les symboles de la stèle avec ceux du livre des morts…qui se trouve là bas ! La petite Templeton se chargera de prélever les passages qu’elle jugera nécessaires.

Pas à dire, ces messieurs supportaient mal la notoriété de miss Templeton et préféraient l’envoyer ailleurs faire un travail secondaire dont aurait pu s’occuper n’importe qui d’autre, mais il n’était pas là pour discuter, en plus que l’idée d’aller à Thèbes avec Shirley était très tentante.

Parfait…j’accompagnerai le Dr. Templeton. Nous partons quand ?

Le lendemain à première heure. Il ne lui resta qu’à aller se préparer pour cette inespérée virée thébaine…

Au dîner, il s’étonna de ne pas rencontrer Shirley. Kim ne se priva pas de dire que la jeune femme serait sans doute en train de compulser ses chers bouquins.

C’est un véritable rat de bibliothèque.

Ce n’était pas exactement l’impression qu’il avait, de toutes façons, au bout d’un moment Kim avait oublié le Dr. Templeton et l’accrochant du bras, l’entraînait faire une petite balade.

Il fait si bon, tu ne trouves pas ?

Euh…oui.

Dis donc, tu n’es pas trop bavard, toi !

Il pouvait l’être mais là, le cœur n’y était pas.

Pourtant avec Templeton …

Nous avons quelques affinités !, lâcha t’il, sec.

Cela la fit rire même s’il ne trouvait rien d’amusant à son commentaire.

Au fait, je n’ai pas trop bien compris ce qu’il s’est passé avec vous deux, hier soir. D’après ce que j’ai entendu dire à Fulton…elle avait une espèce de brûlure et toi, tu…

Je préfère ne pas en parler…

Elle sourit, enjouée, en s’approchant, un peu trop à son goût.

Moi je brûle… autrement ! Veux-tu que je te montre ?

Ma foi, si elle y tenait tant ! Kim avait une idée très claire de ce qu’elle voulait, lui aussi.

Avec toute la délicatesse possible, il l’écarta.

Tu sais Kim…je ne suis pas ici pour avoir une aventure, disons que cela n’entre pas dans mes plans immédiats…pas avec toi !

La demoiselle n’agréa pas du tout être remise à sa place sans aucune contemplation, décochant un regard furibond à Paul, elle fit demi tour en l’envoyant se faire voir en enfer. Elle divulguerait sans doute quelques gentillesses sur son compte mais il s’en moquait éperdument. En passant près de la tente que partageait Shirley avec les deux autres demoiselles, il lui sembla entendre des sanglots étouffés mais se dit que ce n’étaient pas ses oignons et passa de large.

L’aube pointait à peine quand Paul entendit le ronronnement du moteur de la Rover. Hakim était ponctuel au rendez vous pour les conduire à l’aéroport.


Shirley s’installait déjà quand il arriva. À croire que personne ne lui avait dit qu’il serait de la partie. Elle eut l’air très surprise de le voir là avec son équipement.

Langmann et Jameson m’ont demandé de t’accompagner à Thèbes, j’espère que tu n’as rien en contre…Non, ils n’ont pas été trop spécifiques quant à ce que je devais faire…prendre des photos, sans doute. Faire un report sur ce qu’on trouvera là ?...Qui sait si aussi te servir de garde du corps ?

Cette idée sembla l’amuser.

Ok…je sais que je suis un peu éclopé pour le moment…mais je suis tout de même un gars plein de recours !

Le voyage à l’aéroport fut amusant. Hakim était un bavard invétéré, ses anecdotes et potins de tout genre meublèrent très bien la conversation. À l’arrière, Paul essayait de ne pas penser à sa jambe qui souffrait avec les cahots du chemin.

Un DC-3 qui avait certainement eu ses moments de gloire quelques 30 ans auparavant, les emmena à Louxor. Mr. Morgan n’allait pas se plaindre du manque de confort, il avait vu bien pire. Miss Templeton ne jouait pas les difficiles, non plus.

Un petit hôtel sympa, rien à voir avec les palaces pour touristes fortunés qui fréquentaient le coin, serait leur quartier général pendant leur séjour. Ils déposèrent leurs bagages et sans perdre du temps se mirent en chemin vers la rive opposée. Louxor attendrait.

Que se passait-il ? Pourquoi cette oppressante sensation d’angoisse le prenait elle soudain à la gorge ? Impossible d’expliquer. Un coup d’œil à Shirley lui confirma qu’il n’était pas le seul à avoir de bizarres sensations. C’était comme si toutes ces vieilles pierres détenaient quelque secret…signifiaient quelque chose…

Paul s’arrêta tout à coup, incapable de faire un pas de plus.

Je…ne sais pas ce qui est en train de se passer mais…je me sens profondément désolé…

C’était le genre d’aveux qu’il n’était pas du tout habitué à faire. La jeune femme sembla un peu prise de court mais reconnut se sentir, elle aussi, un peu étrange.

Je ne vois pas pourquoi…C’est la première fois de ma vie que je mets les pieds ici…pourtant, d’une façon ou d’une autre…tout ceci m’est…familier…

De là, à croire qu’il était en train de devenir fou, il n’y avait qu’un tout petit pas. Faudrait se faire à l’idée que tant de siècles d’histoire résultaient bouleversants, pourtant Paul n’était pas le genre d’homme à se laisser impressionner par quelques ruines, toutes magnifiques qu’elles voudraient être.

La sensation persista toute la journée mais il s’appliqua gaillardement à faire des photos, à occuper ses idées à n’importe quoi d’autre pour oublier cette stupide envie de pleurer…

Ils bavardèrent peu pendant le dîner et chacun regagna sa chambre. Essayer de dormir s’avérait impossible. Trop de choses inexplicables lui tournaient dans la tête. Nager un peu ne lui ferait aucun mal…À cette heure, il aurait la piscine pour lui tout seul…

C’est exactement à cela qu’il pensait en plongeant…sauf qu’en heurtant le corps qui flottait placidement, Paul dût reconnaître son erreur. L’autre semblait aussi surpris que lui et faillit couler pour de bon mais il le retint par le bras.

Désolé…je pensais qu’il n’y aurait personne…Shirley ?!? Mais…je te faisais en train de dormir…

Mais ce n’était pas du tout cela qui le confondait le plus…Sa main était posée sur son bras et elle ne semblait ressentir aucune brûlure ou autre inconvénient dans le genre.

Wow…

Elle rigola doucement. Il se sentait un peu idiot.

Pas de décharge électrique…pourtant dans l’eau…ce devrait être pire…

Aucune explication logique. Qu’est ce que ça pouvait bien faire ? La toucher résultait délicieux…rassurant. Chassant toute appréhension ou chagrin inexplicable…

Il m’arrive quelque chose de très étrange avec toi…Il me semble te connaître de toujours…et de m’être langui de toi…toute la vie…

Jamais de sa vie Paul Morgan n’avait fait une déclaration pareille à une fille. Être romantique n’était pas son fort, il ne l’avait jamais envisagé…pourtant, il avait des drôles d’idées en étant face à l’adorable Dr. Templeton.

Suis pas fou…

Peut être pas trop…mais l’embrasser devenait impératif. Pas de décharge électrique…au lieu de cela une merveilleuse sensation…de plénitude !

Au moins on aura tiré quelque chose au clair…tant qu’on reste dans l’eau…pas d’électrocution…

Son rire clair, fusant dans la nuit était un baume pour son cœur…
Revenir en haut Aller en bas
Shirley Templeton
Admin
Admin
Shirley Templeton


Messages : 161
Gallions : 38822
Date d'inscription : 08/01/2010

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyMer 21 Juil - 16:25

Que se passait-il ? Rarement Shirley s’était montrée si émotive. C’est à croire que tout ce qui touchait Paul Morgan l’atteignait également.
Outre ce phénomène électrique - ou comme on voulait l’appeler – qui les repoussait, il y avait autre chose... d’indéfinissable mais de bien tangible entre eux.
Le voir souffrir en marchant lui faisait mal… à elle ; ses connaissances en hiéroglyphes l’épataient ; sa gentillesse à son égard la troublait… ses rêves aussi.
Elle en versa des larmes sous la tente vide après avoir cru observer des échanges amoureux entre Kim et Paul. Comment aurait-elle pu rivaliser contre une fille aussi délurée que Waldon ?
Rarement Shirley avait fait attention à son aspect extérieur… sauf les fois où un besoin irrépressible de frayer avec la société la prenait.
Morgan semblait se moquer de son apparence. Sous la tente cuisine la conversation avait été fluide, naturelle, tellement facile pour quelqu’un comme elle.
Aux yeux de beaucoup Miss Templeton n’était qu’un rat de bibliothèque… Ils n’avaient pas tout à fait tort. Que connaissait-elle de la vie, des hommes ? Si peu… Suffisamment en tout cas pour être devenue d’une méfiance, d’une fleur bleue irrationnelle. Son prince Charmant existait quelque part… Était-ce lui qu’elle cherchait ? Serait-ce… Paul ?


*Ridicule, tu es ridicule ! Qu’en a-t-il à cirer de toi ?*


La nuit qu’elle passa fut assez mauvaise. Elle pensa beaucoup à sa future balade à Thèbes. Pourquoi l’envoyer là-bas, justement elle ? Langmann aurait pu téléphoner qu’on lui fasse parvenir les copies voulues…

*Il voudrait m’évincer de la campagne qu’il ne s’y prendrait pas autrement…*

Elle avait posé son sac dans la vieille voiture quand IL arriva à sa suite. Paul souriait en s’installant à son tour :

Langmann et Jameson m’ont demandé de t’accompagner à Thèbes, j’espère que tu n’as rien en contre ?

Tout au contraire, Shirley se sentait… absolument ravie quoiqu’elle fût très surprise :

Je… Non, bien sûr que non. Je… Je me demande juste pourquoi il t’a choisi toi ? Tu as reçu des consignes ?

Non, ils n’ont pas été trop spécifiques quant à ce que je devais faire…prendre des photos, sans doute. Faire un rapport sur ce qu’on trouvera là ?...Qui sait si aussi te servir de garde du corps ?

Je ne suis pas un bébé quand même, rit-elle. Et je cours très vite !

Oups, elle s’en voulut de sa maladresse involontaire. Elle ne voulait pas faire allusion au handicap de Paul qui, heureusement, ne s’en formalisa pas :

Ok…je sais que je suis un peu éclopé pour le moment…mais je suis tout de même un gars plein de recours !

Shirley n’en doutait pas le moins du monde.
La route chaotique à souhait se déroula sans panne ni accident sous le babil intarissable de Hakim qui les fit rigoler surtout quand il fit allusion aux économies à faire sur le budget et qu’il leur suggéra de prendre une chambre commune :


*A moins de vouloir finir rôtis au petit jour, c’est pas demain la veille !* avait-elle rigolé intérieurement.

Un coucou assez âgé les prit en charge. Cette fois pas de soute à bagage, au moins. Sièges durs et défoncés, suffisamment distants pour éviter des contacts cuisants, les reçurent.
Le voyage fut silencieux. Survoler la contrée en suivant le long serpent bleu du Nil, voir au loin les fabuleuses pyramides, mit Shirley dans un état de nostalgie frisant les larmes.

Le trajet depuis la piste jusqu’à l’hôtel se fit en taxi. Il fallut s’accrocher aux accoudoirs des portières afin d’éviter de se cogner l’un et l’autre. Si le conducteur avait cru convoyer un couple d’amoureux, il dut se marrer de voir leurs efforts pour éviter tout contact même accidentel.

Ayant déposé leurs bagages à la consigne de l’hôtel prévu par Langmann, le couple gagna l’embarcadère. Le Nil dans toute sa splendeur leur souriait : eux pas.
Pas de somptueux navire touristique pour eux ni une paisible felouque à la voile triangulaire, non ! Une simple barque au moteur pétaradant suffirait pour assurer le transport sur l’autre rive.
Pourquoi ce malaise face à ce fleuve si paisible en cet endroit ?
La gorge nouée d’une angoisse incompréhensible, Le Dr Templeton fit un gros effort sur elle-même pour monter à bord. Elle aurait tant voulu se raccrocher à Paul qui, de son côté, n’en menait pas trop large non plus. Un regard teinté d’une même crainte s’échangea. S’éloignant du rebord de la barque, Shirley s’assit sur une banquette près du passage central. Morgan devait avoir moins peur de l’eau qu’elle puisqu’il choisit l’opposé en serrant sa mallette de matériel professionnel.

Débarqués, ils durent suivre un groupe de touristes. Tous deux semblaient tellement déboussolés qu’ils en oubliaient le but 1er de leur visite. Paul photographia le site de la Vallée des rois comme dans un état second.
Soudain :

Je…ne sais pas ce qui est en train de se passer mais…je me sens profondément désolé…

Je ne sais pas ce qui m’arrive non plus. Descendre là-bas… m’effraie.

Il poursuivit sur ses propres impressions :

Je ne vois pas pourquoi…C’est la première fois de ma vie que je mets les pieds ici…pourtant, d’une façon ou d’une autre…tout ceci m’est…familier…

J’ai déjà vu tant de films et photos que pour moi, c’est normal ce… déjà vu. La forme pyramidale que prend la montagne en surplomb fait de ce site un lieu d’élection aux tombes royales et nobles. Est-ce le fait que tant de corps reposent là qui me trouble… ? J’aurais aimé en visiter une mais je m’en sens incapable aujourd’hui.
Si ça ne t’ennuie pas, j’aimerais rentrer…


Elle aurait tant voulu lui donner la main en chemin…

Retour à l’hôtel, rafraîchis, un peu crevés, ils dînèrent ensemble sans grand entrain, il est vrai. Elle avoua pourtant :


Tu sais, on n’était pas du tout obligé de traverser le fleuve… Tu semblais tellement décidé à y aller que je t’ai suivi. En fait, la copie visée se trouve au musée de cette ville. De l’autre côté il n’y a que les tombes et monuments ruinés. Tu ne m’en veux pas, j’espère ? Ne me demande pas pourquoi je t’ai laissé dans ton erreur… Je… j’avais simplement envie d’y aller*avec toi*.

Un bref bonsoir distant, ils se séparèrent pour la nuit.

Que c’était bête de tourner en rond ainsi dans sa chambre. La climatisation fonctionnait, le minibar était bien garni. Chose exceptionnelle, Shirley s’enfila trois mignonettes d’alcool avant de se détendre un peu.
De son balcon, elle pouvait voir une partie de la ville peu animée et la piscine de l’hôtel.
Il devait être quoi… ? Deux ou trois heures du matin ? Pouvait-on se baigner à cette heure ? Elle en doutait fortement mais, alcool aidant, elle se sentait audacieuse.
Son maillot ! Elle l’avait emporté sans trop savoir si elle l’emploierait. Simple une pièce noir enfilé sur sa peau pâle, Shirley descendit tâter l’eau. Pas un chat à l’horizon. Le gars de la réception avait souri en plaçant un doigt devant ses lèvres. Il était d’accord si elle ne faisait pas de bruit.
Ses vêtements ôtés, Shirley se coula dans l’eau avec délice. Quelques brasses molles, elle fit ensuite la planche, noyant son regard dans la myriade d’étoiles la dominant.


*Le ciel a changé… Les constellations sont là mais… décalées…*

Perdue dans l’immensité de l’univers, elle ne vit ni n’entendit pas un autre isolé en besoin de plongeon. Le bruit du plouf, le choc d’un corps contre le sien faillit lui faire boire la tasse si une poigne solide ne l’avait retenue du bras :

Désolé…je pensais qu’il n’y aurait personne…Shirley ?!? Mais…je te croyais en train de dormir…

Je, je pensais la même chose dit-elle en s’ébrouant avant de constater… le miracle. Ils étaient debout dans l’eau et il lui tenait le bras sans que brûlure ou malaise ne se manifeste.

Wow…


Le sort serait-il conjuré? rit-elle.

Pas de décharge électrique…pourtant dans l’eau…ce devrait être pire…

C’est une chance ! Il n’est pas dans mes prévisions de finir électrocutée même… en si charmante compagnie.

Face à face, si proches… si agréable…
Paul ne cessait de se repaître de ses yeux et elle des siens :


Il m’arrive quelque chose de très étrange avec toi…Il me semble te connaître de toujours…et de m’être langui de toi…toute la vie… Suis pas fou…


D’un gars comme lui, une telle tirade aurait fait fondre n’importe quelle jouvencelle. La meilleure était qu’il ne mentait pas. L’éclat de ses yeux, sa mine un peu soufflée par ces aveux probablement inédits le criaient.

Moi non plus, je ne suis pas folle et… j’ai l’impression de n’avoir vécu que pour… pour cet instant, haleta-t-elle, consciente de ce qui allait arriver.

Le contact des lèvres de Paul sur les siennes déclencha un affolement de ses sens. Cœur en chamade, frissons, elle aurait souhaité que cela ne finisse jamais.
Après ce bref échange, Paul redevint un poil rationnel :


Au moins on aura tiré quelque chose au clair…tant qu’on reste dans l’eau…pas d’électrocution…

Elle faillit éclater de rire mais préféra à nouveau savourer cette bouche aux saveurs chlorées. Un tourbillon identique augmentait leur ardeur, les entraînant Dieu sait où mais de gaieté de cœur.
Impossible de contrôler ses idées, Shirley tournoyait dans un délire euphorique. Des noms inconnus émergèrent parfois.


*Neith, Meysit… Baken… Baken…*


Combien de temps dura leur étreinte ? Qui s’en souciait.
Un « Hum, Hum ! » les fit retomber de nues :


Sortons, s’étrangla presque Shirley sous l’œil mi-sévère mi-amusé du réceptionniste. On risque d’attraper des écailles à rester là.

Paul l’aida à remonter sur le bord. Aucun d’eux n’avait envie de ses sécher. Ils restèrent là, gauchement à se dévorer des yeux en se tenant les mains dégoulinantes
:

Je… Je ne comprends pas mais je m’en fiche, avoua-t-elle. Il va… On va devoir tirer ça au clair, non ?

En se moquant du regard censeur du réceptionniste, ils récupérèrent leurs vêtements et montèrent dans l’ascenseur sans souci des traces laissées par leur sillage trempé.
Une fois dans le couloir, la magie s’arrêta avec la réapparition d’un début de secousse électrique. Avec un sourire navré, ils se séparèrent. Prête à entrer dans sa chambre, Shirley se tourna une dernière fois vers Paul :


Demain ou plutôt tantôt, nous irons au musée et… j’emporterai un vaporisateur d’eau !


Un clin d’œil mutin, elle referma la porte.

Pleurer ne servait à rien mais la jeune femme devait déverser un trop plein de sentiments contradictoires. Jamais elle ne s’était comportée de la sorte. Dévorer de baisers un quasi inconnu était une première ! Une veine que Paul n’ait pas été plus entreprenant, sûr qu’elle ne lui aurait rien refusé.


*Tu as trop bu ! Tu as tout imaginé ! *

Elle savait que c’était faux mais cela n’arrangeait rien. Pleurs de soulagements, de frustrations aussi… le sommeil la prit.

7h30 petit déjeuner.

Paul était là, emplissant son plateau au buffet continental proposé. Hésitant encore à savoir si elle avait tout rêvé, elle s’approcha, timide :


Tu as bien dormi ?

Son sourire parlait pour lui.

Comme c’était bête d’être assis face à face, yeux dans yeux et de ne pas oser se toucher.
Tant pis si on la prenait pour une folle ! Shirley sortit son vaporisateur et s’en aspergea copieusement la main. Immédiatement le message fur capté et Morgan lui enserra les doigts.


Pas très pratique, mais c’est tout ce que j’ai trouvé, rit-elle. On fera le plein de temps en temps !

C’était merveilleux de le sentir si proche, si présent.
Tout en mangeant avec une seule main, le Dr Templeton vida le fond de ses pensées :


On dirait... Je me demandais si nous n’étions pas victimes d’une sorte de… malédiction…. Les égyptiens anciens en raffolaient. Notre situation me rappelle une légende médiévale… des amoureux qui ne pouvaient se voir qu’un bref instant juste quand la nuit cédait au jour…
L’un vivait la nuit, l’autre le jour… Je vais te paraître idiote Paul mais… je sais que je t’aime et… que ça ne date pas d’hier. C’est fou parce que l’on se connaît en principe à peine… Oui, j’ai dit en principe… J’aimerais beaucoup que nous consultions une voyante comme on l’avait pensé au camp.
Nous allons aller voir le conservateur du musée maintenant. On a du boulot, non ?


Le repas achevé, ils marchèrent dans la ville. Une calèche leur proposa ses services. Pourquoi pas ? Grâce au pulvérisateur, le couple put goûter au charme du décor sans se lâcher la main.
Le bâtiment moderne abritant une petite mais magnifique collection les reçut. Rencontrer le conservateur fut aisé, Langmann l’ayant prévenu.
Rassim Bey était un homme imposant mais bon vivant. L’éclat malicieux de son regard quand il vit ces jeunes gens se présenter à lui main dans la main intrigua un peu Shirley. Mais il fallait bien se décoller afin de travailler. Aucune barrière ne s’opposa à ce qu’ils consultent les archives. Sur les copies papier, le Dr Templeton peinait un peu. Paul photographiait et parfois se penchait au-dessus de son épaule lisant avec elle certains passages ardus.
Complicité ? Harmonie ? Un très bon moment se passa ainsi.
Fatigué, le couple sortit du musée. La balade en calèche reprit. Le temple de Karnak était si proche qu’il en était incontournable.
Payant le conducteur, Paul et Shirley entrèrent dans le sanctuaire.
L’allée des béliers à peine entamée, la jeune femme ressentit à nouveau un malaise. Paul était blême.


C’est… C’est par ici que passaient les processions lors de la fête de l’Opet, balbutia Shirley. Il… un beau cortège très... très pieux. Le grand prêtre était en tête, il…le grand prêtre… c’est… c’était…

Elle étouffait littéralement.
Comme si elle avait été présente à ce défilé antique, elle en voyait les acteurs principaux… Précédant la statue du dieu, il était là, lui… Paul !

De l’eau sur le visage, des lèvres sur les siennes… Shirley battit des paupières. Où était-elle ?
Sur un divan manifestement, dans une demeure climatisée et cossue. Paul lui souriait en lui caressant les cheveux. Un homme bien en chair les contemplait avec aménité :


Le chemin des retrouvailles est parfois aussi tortueux que notre Nil millénaire. Ne vous inquiétez pas, tout va bien.
Revenir en haut Aller en bas
Paul Morgan
Sorcier
Sorcier
Paul Morgan


Messages : 86
Gallions : 25332
Date d'inscription : 07/07/2010
Age : 42
Localisation : Le monde

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyJeu 22 Juil - 0:06

Quelque chose d’indescriptible le poussait vers cette fille. Étrangement, Paul pressentait qu’il en allait de même pour elle. Un lien inexplicable les unissait. Comment expliquer cela sans prêter foi aux mystères de l’univers même ? Un peu difficile. Surtout que Morgan n’était pas le genre d’individu à croire ce genre de faribole ésotérique. On le tenait pour un homme sensé, pragmatique et décidément peu romantique, au grand dam de beaucoup de jolies demoiselles qui auraient été ravies de l’entendre débiter quelque tirade destinée à leur faire tourner la tête. Pourtant là, son comportement erratique le surprenait lui-même. C’était quoi ça de… « Il me semble te connaître de toujours…et de m’être langui de toi…toute la vie… » ? Très peu porté sur ces débits si fleur bleue il n’aurait pas été surpris de voir la belle lui rire au nez mais la réaction de la jeune femme fut étourdissante de sincérité.

Moi non plus, je ne suis pas folle et… j’ai l’impression de n’avoir vécu que pour… pour cet instant.

Elle désirait autant que lui le baiser qui s’en suivit. Délicieux échange qui lui produisit un émoi quasi irrationnel. Bien sûr il devait tout gâcher en faisant un commentaire hautement pratique sur l’absence d’électrocution.

Heureusement que Shirley préféra plutôt jouir de cet interlude non électrique et l’embrassa de nouveau. Jamais il n’avait ressenti pareille félicité, c’était comme combler un vide douloureux et incompréhensible. Elle était la seule, l’unique…

Bien sûr, il faut toujours un trouble fête, en ce cas le réceptionniste de l’hôtel, qui rompit la magie du moment force de se racler la gorge comme s’il avait avalé une mouche.


Paul aurait voulu l’étrangler mais ça leur ruinerait le moment.

Sortons. On risque d’attraper des écailles à rester là.

Sortir de l’eau mettrait fin à tout mais tant qu’ils resteraient mouillés se toucher ne faisait aucun mal. Sûrement que l’homme de la réception ne fut pas trop ravi d’avoir à nettoyer la trace de leur sillage, mais ils s’en fichaient carrément.

Je… Je ne comprends pas mais je m’en fiche. Il va… On va devoir tirer ça au clair, non ?

De ça…aucun doute et le plus vite sera le mieux…

Avec la chaleur régnante, ils étaient presque secs en arrivant à l’étage, une légère décharge annonça la fin de la pause. Cela le désolait de la laisser aller mais évidemment ils ne pouvaient faire autrement.

On trouvera bien une solution.

Il adora son côté pratique.

Demain ou plutôt tantôt, nous irons au musée et… j’emporterai un vaporisateur d’eau !

Cette solution le fit sourire…c’était toujours plus utile que passer la journée entière à faire trempette dans la piscine.

Dormir ? Difficile, une foule de pensées assez contradictoires l’assaillait. Mais qu’est ce qui lui avait pris de séduire si résolument une fille comme le Dr. Templeton ? Pas plus tard que la veille s’était gagné l’éternelle antipathie de Miss Waldon en se refusant à ses avances, assurant n’être pas venu en Égypte chercher une aventure…Certes, Shirley n’en était pas une, de cela il était sûr, même s’il ne savait pas pourquoi. Elle n’était certainement pas le genre de fille qui se laisse aller de la sorte avec un illustre inconnu…parce que c’était juste ce qu’il était pour elle. Être avec elle signifiait bien plus qu’un flirt sans transcendance…cela allait beaucoup au-delà de ça…ce sentiment intense, chaleureux, rassurant, réjouissant, qui l’avait envahi en la tenant dans ses bras, surpassait en tout ce qu’il avait pu sentir auparavant…et des femmes dans sa vie…il y en avait eues.

Il finit quand même par s’endormir et même si ce ne fut qu’un sommeil très court, il fut peuplé de rêves étranges…confus, sans l’être, sauf qu’en se réveillant, Paul n’y comprenait rien.

Paul arriva le premier au petit déjeuner, elle ne tarda pas. Adorablement timide, se blâmant sans doute de ses faits la nuit dernière.

Tu as bien dormi ?

Un peu, oui et toi ?

Pas besoin de le dire, il le devina. Il aurait voulu la prendre dans ses bras et l’embrasser sans se soucier du reste du monde mais le risque de finir rôtis n’était guère tentant. La voir sortir son vaporisateur du sac faillit le faire rire.

Tu es géniale !, assura t’il en enserrant ses doigts trempés.

Pas très pratique, mais c’est tout ce que j’ai trouvé. On fera le plein de temps en temps !

L’idée d’une douche perpétuelle ou d’un déluge lui traversa l’esprit mais il se garda bien de le dire, sachant que cela pourrait sans doute l’effaroucher et c’était ce qu’il désirait le moins au monde.

On dirait... Je me demandais si nous n’étions pas victimes d’une sorte de… malédiction….

Cela expliquerait pas mal de choses…

Les égyptiens anciens en raffolaient. Notre situation me rappelle une légende médiévale…

Il savait exactement de quoi elle parlait et connaissait aussi la légende en question, narrant les amours contrariés d’Etienne de Navarre et Isabeau d’ Anjou. Pas exactement le genre de film qu’un type comme lui regardait volontiers, pourtant l’histoire l’avait profondément touché…allez savoir pourquoi.

Ce qu’elle avoua par la suite le secoua, parce qu’en peu de mots, elle résumait ce qu’il sentait à l’instant même.

Je vais te paraître idiote Paul mais… je sais que je t’aime et… que ça ne date pas d’hier. C’est fou parce que l’on se connaît en principe à peine…

En principe ?, il lui semblait la connaître de toute sa vie.

Oui, j’ai dit en principe… J’aimerais beaucoup que nous consultions une voyante comme on l’avait pensé au camp.

Si tu penses que ça peut aider pour y voir clair, je n’ai rien encontre…faut encore en trouver une !

Mais il s’imaginait que dans le coin, cela ne devait pas manquer .

La miss ne manquant pas de bon sens il fallait s’en tenir, à leur emploi de temps.


Nous allons aller voir le conservateur du musée maintenant. On a du boulot, non ?

Pas de doute…même si je suis sûr que notre ami Langmann n’aurait eu aucun problème à se faire envoyer une copie, pas que je me plaigne…en fait, je lui serai éternellement reconnaissant de cette opportunité !

Le pulvérisateur s’avéra la trouvaille du jour ! Ils se marraient à chaque coup mais cela leur permettait au moins de se tenir de la main, faute de mieux. Une charmante balade en calèche les mena jusqu’au musée où ils furent reçus par le conservateur. Rassim Bey, homme assez imposant mais au sourire chaleureux qui les couva d’un regard quasi paternaliste. Le professeur Langmann avait eu la déférence de le prévenir et il les conduisit aux archives, leur laissant pleine liberté pour leurs consultations.

Encore là leur étrange complicité resta manifeste. Paul n’avait cesse de se surprendre lui-même. Il pouvait lire sans problème des symboles qui, il en était sûr, lui étaient inconnus et incompréhensibles avant de mettre un pied au camp et de rencontrer Shirley.
En tout cas là, ils travaillèrent ensemble en parfaite harmonie, il faisait ses photographies, la jeune femme transcrivait ses symboles. Ni l’un ni l’autre ne remarquèrent Rassim Bey qui, à l’écart les observait discrètement, un sourire satisfait aux lèvres.

Tu ne crois pas que c’est suffisant pour aujourd’hui ?, voulut il savoir, ça te dirait une promenade, plutôt ?

Elle fut d’accord. Ils prirent congé du conservateur lui assurant revenir le lendemain pour continuer leur travail.

Vous êtes toujours les bienvenus !, dit celui-ci, avec effusion.

Drôle de bonhomme…je ne sais pas ce qu’a pu lui dire Langmann mais je jurerais qu’il était ravi de nous voir.

À peine sortis du musée, une calèche semblait les attendre, ils s’embarquèrent sans hésiter. Visiter le temple de Karnak était de mise. Ils étaient si près que la décision s’imposa.

À mesure qu’ils s’approchaient du sanctuaire d’Amon, Paul se sentit, encore une fois, en proie d’un profond et troublant émoi. En y arrivant, l’émoi se transformait rapidement en malaise… Les premiers pas dans l’allée des Béliers ne fit qu’empirer le tout.

Je…ne peux…pas aller plus loin !, souffla t’il en s’arrêtant.

Le Dr. Templeton était pâle comme un linceul.

C’est… C’est par ici que passaient les processions lors de la fête de l’Opet…, l’entendit il balbutier mais ses paroles lui parvenaient indistinctes, lointaines.

Oui…je…sais…

Il… un beau cortège très... très pieux. Le grand prêtre était en tête, il…le grand prêtre… c’est… c’était…

Paul n’eut pas besoin de l’entendre pour savoir…Son esprit avait basculé des siècles en arrière et c’était lui qui se trouvait là…précédant la statue du Dieu…lui, le grand prêtre…

C’était impossible et pourtant si réel…Il était en train de devenir fou…et si pas cela, au moins affreusement malade. Tout sembla s’engouffrer dans un tourbillon affolant et Paul ne sut plus rien…

On lui bassinait le visage avec de l’eau fraîche, cela finit par le faire réagir et ouvrir les yeux. Curieusement découvrir Rassim Bey à son chevet ne l’étonna pas trop.


Comment vous sentez vous, Mr. Morgan ?

Il se redressa en se passant la main dans les cheveux.

J’en ai pas la moindre idée.

Un regard circulaire lui apprit se trouver dans une résidence sûrement particulière et très cossue à en juger par l’agréable climatisation des lieux et le luxe de bon ton les entourant.

Vous devinez bien…Vous êtes chez moi. Tout va bien.

Où…est le Dr. Templeton ?

Elle se repose aussi, le choc semble l’avoir ébranlée avec plus de force qu’à vous.

Le choc ? Je me sens comme si on m’avait assommé d’un coup de matraque.

Rassim Bey sourit, plein de compréhension.

Il n’en est rien pourtant, vous n’avez été victimes d’aucune agression….sauf de celle de vos souvenirs.

Paul préféra se lever, très obséquieusement, Rassim Bey lui tendit sa canne tout en disant.

Je comprends que mes paroles vous semblent confuses mais elles ne reflètent que la vérité des faits.

Une explication aussi cryptique était juste ce dont il avait besoin pour piger quelque chose.

Je ne voudrais pas être désagréable, M. Bey…mais tout cela ne me dit rien. D’abord, pourquoi sommes nous ici ? Que s’est il passé au temple ?

Mes domestiques vous ont amenés en lieu sûr, comme il était prévu…et vous savez très bien ce qui s’est passé au Temple sacré d’Amon…vous le savez parce que la réalité du passé est apparue à vos yeux…comme l’ont prédit les astres.

Pardon ?

Rassim Bey sourit en hochant la tête.

Venez.

Faute de mieux, il le suivit dans la pièce adjacente. Shirley reposait dans un divan et semblait endormie. Paul clopina vers elle. Il allait la toucher mais se retint à temps. Encore cette fois l’intervention de l’égyptien fut ponctuelle, il rapprocha de lui une bassine d’albâtre richement ornée, remplie d’eau claire.

Seule l’eau évite la souffrance.

De ça, il s’en était rendu compte. Aspergeant doucement le visage de la dormeuse il osa l’embrasser, tout en caressant ses cheveux. Enfin, elle battit des paupières.

Enfin…tu as été longue à te réveiller, ma douce.

Logiquement, elle réclama des explications. Souriant, Rassim Bey parla :

Le chemin des retrouvailles est parfois aussi tortueux que notre Nil millénaire. Ne vous inquiétez pas, tout va bien.

Shirley soupira, il l’aida à se redresser puis levant la tête vers l’homme demanda.

Dites nous de quoi s’agit toute cette histoire ? De quelles retrouvailles parlez vous ?

Des vôtres. C’était écrit depuis toujours. Cela est arrivé d’autres fois…mais à chaque occasion les souvenirs s’effacent et tout recommence dans le temps…

Une de deux, ou il était borné pour de bon ou cet homme était définitivement fou.

L’égyptien sembla deviner ses pensées.

Ni vous êtes fou ni je ne le suis. Je suis Rassim Bey, un des gardiens du secret. Du secret des réincarnations…

Il soupira devant leur air assez ahuri.

Des faits étranges ne se sont ils pas suscités depuis votre rencontre ? Des réactions inespérées, bizarres, comme une sensation de brûlure, de décharge électrique ? Ne ressentez vous pas une angoisse inexplicable, un profond chagrin que vous en parvenez pas à expliquer ?

Force fut de reconnaître que oui. Rassim Bey leur raconta alors une histoire invraisemblable…la leur.

Vous êtes six en tout. Il faut compléter enfin le cercle pour vaincre le Malin…celui qui a causé votre perte.

Ramose, dit calmement Paul comme si rien.

En effet, lui. Le même qui vous a poursuivis des siècles durant pour empêcher votre union.

Et les autres ?

Rassim Bey hocha la tête.

Ils viendront. C’est écrit…ce sera sur cette terre qui vous a vu mourir la première fois que vous vous retrouverez. C’est votre dernière chance.

De quoi les rassurer pleinement.

Comment…les reconnaîtrons nous ?, s’enquit Paul, dubitatif.

Les signes seront clairs.

Autant y croire. Après leur avoir délivré d’autres révélations assez ahurissantes, Rassim Bey déclara qu’ils seraient ses invités le temps qu’il serait nécessaire et les laissa un moment seuls.

Je ne sais pas toi…mais moi, cette histoire me semble très bizarre. Je suis un journaliste américain…ça c’est sûr et confirmé, du coup on me dit que je suis la réincarnation d’un grand prête d’Amon…un peu dur à gober, non ? Oui…je sais, les signes sont clairs…ce que je sens est clair…ce que j’ai vu ou cru voir l’est aussi…

Il se leva et commença à arpenter la pièce sans se soucier des élancements douloureux de sa jambe.

Je...je suis affreusement confus…ne…m’en veux pas mais je dois sortir un moment prendre de l’air…

Et avant qu’elle ait pu dire le moindre mot, il avait ouvert une des larges portes fenêtres et était sorti au jardin embaumé de senteurs presque capiteuses…

*Je suis devenu fou…*

Une terrible envie de pleurer lui serrait la gorge…Il laissa les larmes couler, sans arrêter d’avancer sans savoir où le menaient ses pas, pour enfin se laisser tomber sur un rocher et pleurer tout son soûl…Combien de temps resta t’il là ? Impossible de le dire. La lune s’était levée pour alors…

Ce fut comme en songes qu’il parvint au bord de l’étang sacré…Son chant l’avait guidé…Elle était merveilleuse sous cette lumière argentée. Il suivit ses gestes avec fascination, avant de se déshabiller à son tour et la rejoindre…


Ma bien aimée !
Revenir en haut Aller en bas
Shirley Templeton
Admin
Admin
Shirley Templeton


Messages : 161
Gallions : 38822
Date d'inscription : 08/01/2010

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyJeu 22 Juil - 18:44

Quelque chose en Shirley criait à l’absurde. Un esprit aussi rationnel ne pouvait que réfuter la situation qui se présentait.

*Je ne crois pas au coup de foudre !*


Elle se débattait avec ça et revenait toujours à la case départ, à la constatation extraordinaire qu’elle était bel et bien amoureuse de Paul Morgan.
Oui, il était beau gosse, possédait charme, prestance, un « je-ne-sais-quoi » qui faisait que les filles se devaient de lui tourner autour. Qu’un gars comme lui s’intéresse à une fille comme elle la laissait… pantoise. Oh, elle n’allait pas s’en plaindre ! Mais l’intensité de ce qu’elle ressentait pour Paul l’effrayait.


*En tout cas, si c’est uniquement pour afficher une nana de plus dans sa collection, il s’y prend très bien !*

Mais ça ne collait pas. Assez bon juge de caractère, Shirley refusait de croire Paul capable de ça. Certes, son romantisme risquait de lui coûter cher si elle se trompait mais, au fond d’elle-même, Shirley le savait sincère.

*Que tu veuilles que ce soit vrai ne signifie pas que ça l’est !*

Voilà les états d’âmes qui bouleversaient la jeune égyptologue tandis que la calèche les déposait au fabuleux temple de Karnak.
Passé le premier pylône, le fait d’aborder cette allée processionnelle rendit le couple vraiment malade. Si elle n’avait pas perdu conscience, Miss Templeton aurait vu des touristes s’affoler en voyant le couple s’écrouler au beau milieu de l’allée de béliers. Les curieux attirés par ce « spectacle » se groupèrent autour des corps allongés. L’un ou l’autre suggérait une solution :


De l’eau ! Donnez-leur de l’eau ! Un médecin, y a-t-il un médecin ?

Fendant la foule trois hommes s’approchèrent. Le plus grand regarda les inanimés en hocha positivement la tête :

Je suis médecin !

Il fit signe aux autres baraqués qui se chargèrent l’un de Shirley, l’autre de Paul. Un court trajet en voiture s’effectua sans qu’aucun des évanouis ne revienne à lui.

L’esprit de Shirley voyagea hors du temps. Elle se revit en chrétienne pourchassée par des ennemis.
Alors qu’elle cuisait du pain, Paul entrait et ordonnait :


Nous avons été trahis ! Prends ton bagage, filons !

Une course folle s’engagea dans des ruelles poussiéreuses. Des gens devant, des gens derrière : coincés. Paul l’avait plaquée contre un mur et embrassée comme un fou :

Je t’aimerai toujours ! On se retrouvera ! Les gardiens y veilleront…

Déchirement de la séparation… Déchirement des chairs par des lions…

Un peu choquée de ce « rêve » Shirley émergea sous les douces caresses de Paul.
Il était là, ils s’étaient retrouvés, rien d’autre ne comptait :

Enfin…tu as été longue à te réveiller, ma douce.

Je… Où sommes-nous ? Je suis out depuis combien de temps ? Que s’est-il passé ?

Rassim Bey prononça une phrase concernant les retrouvailles tortueuses. Curieusement, Shirley n’éprouva qu’un immense sentiment de paix :

Tout va bien maintenant, oui.

Aidée par Paul à se redresser, elle assista à un dialogue pour le moins saisissant. Le conservateur du musée semblait désireux de leur faire gober l’histoire la plus extraordinaire jamais entendue. Paul, lui, se braquait.

Ni vous êtes fou ni je ne le suis. Je suis Rassim Bey, un des gardiens du secret. Du secret des réincarnations…

*Les réincarnations ! Comment n’y ai-je pas pensé ?*

Des faits étranges ne se sont ils pas suscités depuis votre rencontre ? Des réactions inespérées, bizarres, comme une sensation de brûlure, de décharge électrique ? Ne ressentez vous pas une angoisse inexplicable, un profond chagrin que vous en parvenez pas à expliquer ?

*Oh oui ! Et aussi un immense bonheur quand Paul est là*


Vint ensuite le récit étrange et bouleversant de leur propre histoire puis conclut :

Vous êtes six en tout. Il faut compléter enfin le cercle pour vaincre le Malin…celui qui a causé votre perte.

Paul commençait-il à y croire ? De lui-même il parla de Ramose, le grand Vizir qui avait manigancé la perte des prêtresses et de leur compagnon.
L’esprit encore confus, Shirley chercha à se rappeler le nom de ses amies disparues en même temps qu’elle. Où étaient-elles ? Qui étaient les quatre absents
?

Ils viendront. C’est écrit…ce sera sur cette terre qui vous a vu mourir la première fois que vous vous retrouverez. C’est votre dernière chance.

*Dernière chance ? Pourquoi ?*

Là Shirley s’inquiéta mais Rassim se voulait rassurant :

Les signes sont clairs. Nous les gardiens du secret nous veillons et surveillons les astres. Nos ancêtres étaient des amis proches de Bakenkonsou, Emath et Pazer. Si ceux-ci ont fait le serment qui liait leurs âmes pour l’éternité, ces disciples ont créé une communauté visant à perpétuer le souvenir et à tout mettre en œuvre, au fil des siècles, pour favoriser les retrouvailles.
Les conjonctions planétaires ont démontré que ce siècle vous verrait vous réunir.
Quand l’histoire d’une petite fille tombant dans les pommes dans un musée nous est parvenue aux oreilles, nous avons augmenté la vigilance.
Mais assez parlé, vous devez vous reposer.


Restée seule avec Paul ne gênait pas Shirley. A le voir, elle comprit que lui n’était pas convaincu :

Je ne sais pas toi…mais moi, cette histoire me semble très bizarre. Je suis un journaliste américain…ça c’est sûr et confirmé, du coup on me dit que je suis la réincarnation d’un grand prête d’Amon…un peu dur à gober, non ?

Non ! J’y crois. Tout le prouve.

Oui…je sais, les signes sont clairs…ce que je sens est clair…ce que j’ai vu ou cru voir l’est aussi…

Il avait l’air si malheureux, si confus qu’elle s’en voulut d’être si sereine. Lorsqu’il désira sortir seul, elle ne chercha pas à la retenir.

Plutôt que de rester sur le divan, Shirley se leva. Elle avait besoin de boire quelque chose. Devait-elle sonner un domestique ? Bah ! Elle trouverait bien.
Quittant ce salon, la jeune femme erra un peu dans la grande maison. Par une porte entrouverte, elle sursauta en y voyant le conservateur en train de consulter des papiers anciens. La pressentit- il ? Rassim releva la tête et lui sourit :


Entrez ! Vous avez soif, non ?

Déjà il se levait et sortait d’une glacière une carafe d’eau claire. Lui donnant un verre, il la servit :

Vous encaissez mieux que lui, dirait-on ?

C’est normal… Moi… je suis dedans depuis mon enfance. Vous le savez puisque vous m’avez espionnée, c’est bien ça ?

Se rasseyant, Rassim rit :

On peut dire ça, oui ! Vous imaginez bien que nous n’allions pas risquer de vous perdre dans la nature depuis le temps que nous vous attendions. Le professeur Langmann a tout fait pour vous ménager une remontée trop brutale de souvenirs. Il m’a prévenu aussitôt après votre « accident » au pied des fouilles. C’était inespéré : deux d’un coup !

Ainsi Papy était au courant ! Il avait bien caché son jeu, lui aussi. Pensive – qui le serait à moins ?- Shirley releva :

Qu’attendez-vous de nous, au juste ?

La question sembla prendre de court le conservateur. Il se troubla un peu et tenta de le dissimuler en feuilletant ses documents :

Il… Il est important que vous retraciez Ramose. Si vous ne trouvez pas, lui vous trouvera et vous détruira… comme à chaque fois.

Ce serait si grave ? Si nous avons traversé les siècles… On peut continuer ?

Nous ne le pensons pas. Nous ne sommes sûrs de rien bien sûr, mais chaque retrouvaille est devenue plus ardue. Le monde évolue… le mal prend de l’ampleur… Vous devez l’arrêter.


Ah ! Confuse Shirley se voyait donc investie d’une tâche dont elle ignorait une foule de détails. Ces gardiens du secret visaient un but…

Vous avez dit que les signes seraient clairs pour retrouver les autres… Y aura-t-il avec eux des manifestations aussi étranges que celles que j’ai eues avec Paul ?

D’après les récits de vos épisodes… tragiques, il y en a eu, donc il y en aura. Votre dernière rencontre réussie a eu lieu à la fin du règne de Louis XIV. Ce genre de signes a été assez… douloureux et a prouvé aux yeux de certains votre appartenance au… malin. Vous fûtes brûlés en place de grève comme sorciers notoires... Comme à Salem, un demi-siècle plus tôt.
On dirait que plus le temps passe…


Plus il est compliqué de se retrouver…

Tout ce mic mac abrutissait un peu la jeune femme. Elle s’excusa, réclamant un congé qui lui fut accordé.

Allez donc goûter les essences de mon jardin, j’en suis très fier… de… ma pièce d’eau aussi !

Le jardin s’avéra un havre de paix. Point de senteur de tamaris mais jasmin et lotus fleuraient bon.
A pas lents, Shirley marcha sans but précis, attirée par le doux chant d’une fontaine.
La pièce d’eau vantée par Rassim l’émut beaucoup. Le grand rectangle ressemblait à s’y méprendre au lac sacré du temple. Quelques nénuphars y flottaient, coroles fermées, peu de lichens ou vase dans le fond. Le tout cerné de palmiers doum était propice à la méditation, au repos de l’âme, à l’élévation spirituelle. Sans même penser à ce qu’elle faisait, comme poussée par un rite familier, Shirley se dévêtit et glissa ses pieds nus dans l’onde fraîche.
Le bassin gagnait en profondeur vers la végétation d’où glougloutait une petite cascade. Gestes du passé, danse rythmée d’incantations mélodieuses. Shirley éleva les mains en coupe, offrant chaque aspersion d’une prière aux dieux.


Ma bien-aimée !

Arrêtant sa gestuelle, Shirley se retourna, lumineuse.

Je t’ai tant attendu, Baken, mon amour.

Tout en douceur, prononçant des phrases sorties du néant, elle tourna autour de lui en déversant l’eau purifiante sur la tête du jeune homme qui partageait sa transe. Un baiser intense souda leur bouche. Enivrante étreinte, sensations exaltantes, soupirs…

Le bassin ne se prêtait pas aux délires des sens. D’ailleurs, même s’ils brûlaient du même feu, aucun d’eux ne souhaitait aller trop loin. Être réunis, s’étreindre, leur suffisait pour le moment.
Blottie contre le torse puissant de son aimé, Shirley revint à la réalité :


C’est dur à avaler, n’est-ce pas mon chéri ? Pourtant, tu le sais, tu le sens : c’est vrai, tout est vrai…
Je me souviens de Neith et de Mésyt mes amies prêtresses. C’est donc elles que je cherchais sans le savoir mais… c’était surtout toi que je devais retrouver. Te souviens-tu de mon nom ? De ce qui nous est arrivé ?


Un peu désorienté, il avoua avoir des bribes qui surgissaient. Il s’était langui d’elle sans pouvoir la nommer, sans se rappeler nom ou traits mais maintenant les pièces dispersées se réorganisaient.

Tout ira plus vite lorsque nous aurons retrouvé les autres. Selon Rassim, ils devraient être proches.
Seulement les siècles ont un peu effacé nos affinités. Je crains qu’il ne nous faille toucher énormément de gens en espérant tomber sur les bons !


S’imaginer en train de parcours villes et villages à la recherche des disparus l’amusa soudain. Son rire résonna dans l’air embaumé. Malgré elle, un frisson la secoua :

*Ramose doit être au courant si les gardiens le sont.* J’adore être dans l’eau avec toi mon aimé. Attraper un rhume ne nous aidera pas.

Point de fausse pudeur à sortir de l’eau dans ce simple appareil. S’étreindre encore…

Je voudrais tant dormir dans tes bras…

Cela viendrait à condition de rencontrer les absents.

Le lendemain, Rassim les nourrit copieusement au déjeuner. Il avait passé une nuit blanche, le brave homme :


J’ai contacté tous les gardiens fidèles. Nous ne sommes qu’une poignée mais nous sommes très actifs. Je suis heureux de pouvoir vous confier une liste de noms de personnes suspectées d’être vos amis d’antan.

Le couple se pencha sur le papier en veillant à éviter de se toucher. Leur mine s’allongea devant le nombre de gens impliqués. Aucun nom ne leur disait quoique ce soit.
Pratique, Paul émit une hypothèse concernant le Net. Le conservateur se renfrogna :


Si vous désirez crier sur les toits que vous cherchez les dénommés Neith, Mésyt, Emath et Pazer… allez-y ! La réincarnation de Ramose en sera ravie ! Tout comme vous possédez des alliés, il a ses partisans. Rien que dans la soirée d’hier, j’ai déjà dû supprimer deux noms… Tout suspect est éradiqué sans aucune pitié. Nous tentons de vérifier qu’il ne s’agissait pas des bonnes personnes.

Comme quoi, ils avaient intérêt à se dépêcher !
Les premiers sur la liste étaient Miss Dolorès Paxton et Mr Samuel Fields. Ils résidaient à Louxor pour le moment, en parfaits touristes. Leur attitude face aux antiquités pouvait donner lieu à penser qu’ils seraient de bons candidats.

La chasse était lancée.

Ralala ! Jouer au détective n’était pas prévu dans son programme. Tout en sachant que Langmann couvrirait son absence sur le site des fouilles et les raisons pour lesquelles il l’en avait évincée, Shirley n’aimait pas trop ce nouveau « boulot ».
Elle serait bien restée des heures sous la douche avec Paul sans se soucier de rien d’autre. Dans cette vie, c’était la première fois qu’elle était vraiment amoureuse, ce qui ne cessait de l’émerveiller.
Hélas, tout droit au bonheur devait se gagner…

Le couple de suspects fut repéré facilement. Miss Paxton, une blonde décolorée et évaporée, tractait dans son sillage un grand dadais roux qui souffrait manifestement de la chaleur.
Ce jour-là, ils avaient décidés de visiter la vallée des Rois.
S’intégrer au groupe s’avéra aisé.

Comment on fait ? demanda-t-elle à son compagnon. On les bouscule simplement ? Les aborde en prétextant une pseudo reconnaissance ?

Aucun d’eux ne savait pour quelle option opter. Le hasard s’en chargerait peut-être.

La tombe de Toutankhamon n’émut pas particulièrement ni Shirley, ni Paul.


*Il est mort après nous… *

Très remuante et représentative, Dolorès s’extasiait à chaque pas de la descenderie :

Tu vois ces hiéroglyphes mon chéri ! C’est une mise en garde contre le dérangement au repos de ce jeune pharaon.

Paul et Shirley échangèrent un regard perplexe : elle avait raison, cette Dolorès !
Plusieurs scènes déclenchèrent des commentaires semblables, toujours exacts.


*Ou elle a potassé ses bouquins, ou elle sait…*

Cependant, Miss Paxton ne paraissait nullement incommodée par quoi que ce soit, son compagnon non plus.
Il fallut attendre le cœur du tombeau, là où reposait la pauvre momie d’un roi disparu très jeune, sans avoir réalisé grand-chose mais porté aux nues grâce au trésor fabuleux retrouvé quasi intact à ses côtés par Carter.
Là, Dolorès entra en transe. Elle récita des poèmes antiques, en étant extatique. Puis tomba dans les pommes. Fiels était atteint aussi d’un mal étrange. Livide, il vacillait.
Comme d‘habitude, ce genre de situation entraîna des remous dans l’assemblée. Soupirant un grand coup, Shirley s’avança :


Laissez-moi voir, je suis docteur.

Inutile de dire en quoi, on s’écarta pour lui livrer le passage. Avec angoisse, la jeune femme effleura les paupières ardées de la miss. Aucune secousse ne se produisant, elle s’enhardit. Quelques gifles sur les joues, un flacon de sels, le tour fut joué.
Paul s’occupa du compagnon avec les mêmes constatations : chou blanc.

Dépités mais heureux de retrouver le dehors, vaporisateur en action, Shirley et Paul quittèrent cette tombe en souriant :

Deux de moins et… ils ne sont pas morts.
Leur avaient-ils sauvé la vie ? Ils l’espéraient.
Aux suivants !
Revenir en haut Aller en bas
Paul Morgan
Sorcier
Sorcier
Paul Morgan


Messages : 86
Gallions : 25332
Date d'inscription : 07/07/2010
Age : 42
Localisation : Le monde

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptySam 21 Aoû - 15:34

C’était de la folie ! Tout ce qui se passait tenait de la plus pure démence Chaque minute qui se passait, dans cette situation impossible, inexplicable, plongeait Paul dans un tourbillon, de plus en plus sombre, de doute…et d’indescriptible chagrin. Il s’enorgueillissait d’être un pragmatique haut de gamme, un dur à cuire, un homme difficile à émouvoir et encore plus un gars difficile à attacher. Les femmes pour lui, c’était un passe temps agréable entre les escarmouches diverses où risquer sa peau. Plus d’une avait voulu lui mettre le grappin dessus mais il s’en était toujours tiré sans trop d’égratignures…or là, tout se pointait différemment. Shirley Templeton lui faisait un effet inespéré. Irrationnel. Et si Paul détestait quelque chose, c’était justement être pris de court…

Mais là…il commençait à s’en ficher. Ce n’était pas de la simple attirance. C’était un lien. Et un de très fort, ce qui est plus. Incompréhensible certes, mais existant quand même. Jamais auparavant, une fille ne l’avait attiré de la sorte. En fait, Shirley faisait plus que ça…elle était parvenue en un rien de temps à le rendre…dépendant ? Idiotisé ? Ensorcelé ?...Il trouverait tous les épithètes nécessaires avant de dire amoureux…Lui ? Il ne tombait pas amoureux. Trop débile. ÇA n’allait pas avec lui…Pourtant, comme s’il se dédoublait…il avouait, sans aucune gêne, tout le contraire. Il s’était trouvé en train de débiter des paroles qui ne seraient jamais venues à son esprit…des vrais mots d’amour, empreints d’un romantisme suranné, qu’il n’aurait envisagé même sous les pires effets de l’alcool mêlé au plus véhément des désirs…

Paul ne savait même plus comment il s’était retrouvé, nu comme Adam, dans cet étang, au clair de la lune, alors que cette merveilleuse créature procédait à quelque ablution sacrée, suivant un rituel venant du fond du temps même…Lui-même était perdu dans le tourbillon du temps où se mêlait si bien un passé révolu à jamais…et portant si proche et certain, en cet instant.

Je t’ai tant attendu, Baken, mon amour.

Il l’aimait. Il était fou d’elle. Sa vie ne se résumait qu’à cet instant sacré, où malgré des siècles d’angoisse et séparation, ils se retrouvaient. Il l’avait toujours aimée…Elle était celle qu’il avait séduite et menée à la perdition et à la mort…sans le savoir, sans le vouloir et pourtant…

Sentiments mitigés. Douloureux. Souvenirs éraillés de siècles qui s’entrechoquaient contre la logique toute puissante, contre lui, le rationnel Paul Morgan qui avait du mal à croire aux fables d’un rêveur…

Il n’avait qu’un désir. La posséder. Se perdre dans cette soyeuse et intemporelle folie et s’oublier mais surgi de Dieu seul sait où s’imposait un frein…Le moment n’était pas encore venu…

Elle sembla le reconnaître autant que lui, cet avertissement inconscient. S’écartant sans brusquerie, alors qu’ils étaient si proches, elle assura, doucement.

C’est dur à avaler, n’est-ce pas mon chéri ? Pourtant, tu le sais, tu le sens : c’est vrai, tout est vrai…Je me souviens de Neith et de Mésyt mes amies prêtresses. C’est donc elles que je cherchais sans le savoir mais… c’était surtout toi que je devais retrouver. Te souviens-tu de mon nom ? De ce qui nous est arrivé ?

Il fouillait ses rêves sans pouvoir trouver ces noms, son nom à elle, pourtant sa seule évocation lui brûlait le cœur.

Je ne sais pas…Je ne sais rien…Je te l’ai dit…je sais m’être langui de toi…mais le pourquoi et le comment m’échappent…Qui sait ?…Ça viendra peu à peu…

Mais n’y croyait pas grand-chose.

Il s’en voulait de tant de scepticisme froid, réfléchi…Il ne pouvait pas autrement. Peut être avait il été autrement il y a des siècles mais là…impossible de se refaire en un jour !


Elle ? Elle y croyait ferme !

Tout ira plus vite lorsque nous aurons retrouvé les autres. Selon Rassim, ils devraient être proches. Seulement les siècles ont un peu effacé nos affinités. Je crains qu’il ne nous faille toucher énormément de gens en espérant tomber sur les bons !

Euh ? Des perspectives plus engageantes, il en avait eues, au long de son aventureuse existence !

Mais voilà qu’elle restait contre lui, sans aucune envie de se séparer, ce qu’il partageait pleinement. À quoi pensait-elle pour frissonner de la sorte? Paul crût le deviner…Leur Ennemi. Ce fichu Ramose ou comme il veuille bien se nommer au présent, qui se semblait n’avoir pour but que leur pourrir la vie.

J’adore être dans l’eau avec toi, mon aimé. Attraper un rhume ne nous aidera pas.

Adorablement pratique…Il valait mieux. Avant de perdre carrément la tête et avoir à le déplorer plus tard ! Il ne put que la suivre des yeux quand elle se glissa hors de l’étang…la lumière pâle de la lune sur sa peau avait un effet nuisible sur son bon sens…Il plongea. Fallait à tout prix se rafraîchir les idées avant de faire un malheur…Mais la reprendre dans ses bras à peine fut il prés d’elle fut un besoin vital.

Je voudrais tant te garder avec moi…pour toujours…

À quoi cet ange de glorieuse lumière ne trouva rien de mieux à dire que :

Je voudrais tant dormir dans tes bras…

Et lui qui n’avait pas besoin qu’on lui vante les vertus de l’idée…

Ma chérie…

Mais bien sûr, ce fichu bon sens…D’où diables en sortait il tant, de bon sens ? Ce devait être la soi disant influence de son passé…manquait que ça! Que ce fichu prêtre qui avait fichu la pagaille veuille redresser ses torts…en fait, celle là semblait être l’idée…Il n’était qu’un…quoi ? Réceptacle de chair et os pour âme égarée en quête de sursis ?

Il déposa un baiser sur sa tête mais il fallait déjà se séparer.

Quand on trouvera les autres...si on croit à ce que dit Rassim Bey…

Dieu seul savait ce qu’il se passerait alors. Le côté pragmatique de Paul assurait que rien de bon. Une belle pagaille avec six dingues au lieu de deux. Allez savoir de quel genre de gens il s’agirait ! Il se faisait déjà un scénario tout ce qu’il y a de plus pathétique et navrant…

De retour à la maison, des domestiques silencieux les conduisirent à leurs chambres, à aucun moment leur mystérieux hôte ne se manifesta. Contrairement à ce qu’il aurait crû, Paul dormit comme une souche et ne fit aucun rêve étrange se prêtant á interprétation farfelue. Le lendemain, de bonne heure, il rejoignit Shirley au petit déjeuner. Rassim Bey se trouvait là, lui aussi. La vaste table était garnie comme si on attendait un régiment mais leur hôte assura, que pour le moment, ils étaient leurs seuls invités.

On ne mourra pas de faim, c’est un fait…*à moins qu’on ne veuille nous engraisser gentiment pour mieux nourrir les crocos*

Cette charmante idée eut l’heur de lui couper l’appétit et le rendre méfiant, ce qu’il était déjà, par simple habitude.

Rassim Bey avoua avoir passé une longue et blanche nuit à mettre la machinerie en mouvement.

J’ai contacté tous les gardiens fidèles. Nous ne sommes qu’une poignée mais nous sommes très actifs. Je suis heureux de pouvoir vous confier une liste de noms de personnes suspectées d’être vos amis d’antan.

On n’avait rien à envier à la CIA, là ! Quelle organisation fébrile. En se faisant toute sorte d’idées, Paul allongea le cou pour jeter un coup d’œil à la fameuse liste que leur tendait l’homme. Ce faisant, Shirley se trouva tout près de lui, à l’atteinte d’une caresse, l’arôme frais de sa chevelure lui chatouilla les narines et chamboula son esprit logique jusqu’aux ciments.

La liste était appréciablement longue. Des noms, soigneusement consignés qui ne leur disaient rien…du moins à lui.


Tout ce monde est soupçonné d’être…euh…comme ce que vous pensez que nous sommes ?

Rassim Bey lui décocha un regard teinté de reproche. Il encaissait mal tant de scepticisme.

En effet, Mr. Morgan. Nos gens ont beaucoup travaillé pour en arriver là.

De ça, il pouvait très bien s’en douter. Rien de plus effectif qu’une communauté de fanatiques rêveurs !

On n’ira pas bien loin de cette façon, se trouva t’il en train de dire ce qui ne lui gagna pas plus de sympathie.

Et vous avez une meilleure idée de comment agir, Mr. Morgan !?

Il y a des moyens plus modernes pour apprendre des choses sur les personnes…l’Internet, vous avez entendu parler de ça ?

On le cloua sur place d’un regard outré.

Si vous désirez crier sur les toits que vous cherchez les dénommés Neith, Mésyt, Emath et Paser… allez-y ! La réincarnation de Ramose en sera ravie ! Tout comme vous possédez des alliés, il a ses partisans. Rien que dans la soirée d’hier, j’ai déjà dû supprimer deux noms…

Vexant qu’on le tienne pour un imbécile endurci.

Il y a méthode et méthode !, grommela t’il.

Tout suspect est éradiqué sans aucune pitié. Nous tentons de vérifier qu’il ne s’agissait pas des bonnes personnes.

Comme quoi, il avait intérêt à se tenir à carreau sinon on oublierait allègrement la possibilité qu’il soit le grand prêtre en personne et c’en serait fait de lui.
Dolores Paxton et Samuel Fields. Les premiers de la longue liste. Touristes férus d’antiquité…Comme la quasi totalité de ceux qui flânaient dans le coin.


On y sera pour l’éternité !, marmonna t'il, ce ne fit accroître la croyance qu’il était simplement borné.

Shirley, elle, semblait pleine de foi et enthousiasme. Après tout, il était presque décidé à la suivre jusqu’au bout du monde au besoin alors, les sites archéologiques de ce bled renommé ne lui poseraient pas de gros problèmes.

Il avait des idées plus agréables en tête en regardant la jeune femme. Une plage solitaire, la mer calme…eau bienfaisante qui leur permettait être proches…au lieu de cela, fallait se contenter de lui tenir la main et de faire jouer le vaporisateur à tout bout portant.

La vallée des Rois et ça, aux trousses de ce couple d’hurluberlus qui se sentait pris par la magie du décor et faisait étalage d’un savoir appréciable. La femme, une blondasse peinturée, se donnait de grande connaisseuse du monde antique. L’échalas roux qui la suivait, comme toutou fidèle, en soufflant comme phoque , s’éventait vigoureusement, sans arrêter de faire des petits commentaires ponctuels et crispants.

Comment on fait ? On les bouscule simplement ? Les aborde en prétextant une pseudo reconnaissance ?

La question était bonne. Paul fit la moue.

Sais pas…Attendons plutôt…ça élargit mes connaissances, cette femme est une source intarissable de savoir !

Cela dit sur un petit ton pas ravi du tout. Il n’était pas précisément de bonne humeur. La tombe de ce cher Toutankhamon promettait d’être le clou de la fête. Miss Paxton semblait plus excitée qu’une puce, son compagnon s’extasiait de concert. Eux, ils restèrent comme si rien.

*Ma foi, si on est ce qu’on dit…on l’a pas croisé, celui là !*

La blonde, elle, faisait le show complet. Le petit groupe, auquel ils s’étaient collés, suivait la représentation avec croissant intérêt. Paul lui aurait foutu des baffes, mais se tint sagement aux côtés de sa Shirley, sans rien dire.

Tu vois ces hiéroglyphes mon chéri ! C’est une mise en garde contre le dérangement au repos de ce jeune pharaon.

Elle n’avait pas tort, Miss Paxton, c’était bien de cela qu’allaient les fameux hiéroglyphes, si bien conservés.

N’importe quel idiot peut trouver ça sur Google, souffla t’il à sa compagne qui semblait assez perplexe avec ce savoir si éclatant.

Il fallut arriver jusqu’au cœur du tombeau pour que les deux ploucs entrent en une espèce de transe. On eut droit à la pièce complète, poèmes antiques à gogo, gestes grandiloquents et puis…grand final…partis dans les pommes.

Comme quoi…ça leur fait un effet de tous les diables !

Laissez-moi voir, je suis docteur.

Elle ne mentait pas…sauf que ces deux là n’étaient pas encore des momies, sa spécialité. Paul s’en donna à cœur joie en ramenant Mr. Fields à ce bas monde. Quelques claques thérapeutiques firent l’affaire et le pauvre gars se réveilla, l’air abasourdi.

C’est…c’est vous ?

Moi quoi ?...Pas l’esprit du Pharaon, quand même…allez, vous avez succombé à la chaleur…

Il l’aida à se remettre sur pied alors que Shirley faisait de même avec la blonde consternée. Aucune réaction étrange ne s’était produite en approchant ces deux là. Paul ne savait pas exactement à quoi s’attendre mais là…c’était raté.

Fichons le camp d’ici…ça sent le fermé.

Il en avait des bonnes. Ça fit rire Shirley qui ne trouva rien à redire et le suivit à l’extérieur.

Deux de moins et… ils ne sont pas morts.

Encore heureux…et dire qu’il y en a encore 24 sur la fichue liste…et je parie qu’ils ne rôdent pas dans le coin ! À quoi pense Rassim Bey ? Qu’on va aller courir le monde à la recherche de ces gens ?

Évidemment c’était l’idée de base. Paul n’était pas ravi du tout et s’en voulait. L’adorable docteur Templeton méritait mieux qu’un journaliste grognon à longueur de journée.

Excuse moi, ma douce…mais ces trucs au petit bonheur la chance ne sont pas mon fort…Dans mon travail on est parés à tout…mais courir après une vérité hypothétique n’est pas ma branche…tu comprends…je suis…

Un odieux sceptique qui ne croyait à rien d’autre qu’à ce qu’il voyait. Sa réalité à lui, c’était le risque, l’action, la folle poussée d’adrénaline face au danger extrême…une balle, des éclats de grenade, une ruée d’éléphants fous, une attaque rebelle…mais sûrement pas des fantômes surgis du passé !

Je sais que tu y crois, toi…c’est vrai que j’ai ces visions étranges et que je sens des trucs insensés…

Elle le regardait, abattue.

Tu as raison en pensant que je suis un…sais même pas ce que tu penses…C’est dur à gober, tu l’as dit toi-même…Oui, pour toi c’est plus facile, tu y est immergée en plein…Bien sûr que je vais avec toi…tu sais que je te laisserai pas seule…mais faudra pardonner mon manque de foi…Pourquoi il ne pleut jamais dans ce fichu pays ?

Il rêvait d’une monumentale averse qui les tremperait jusqu'à l’os pour pouvoir la prendre dans ses bras et l’embrasser à en perdre la raison…au lieu de cela, on activa le vaporisateur et il put serrer ses doigts fins à souhait…minable consolation.

On fait quoi, là ?...Parce que les autres, sur la liste…d’après ce qu’on sait, ils sont pas là…

À part faire un petit tour dans les environs, question de s’imbiber d’histoire, il n’y avait pas grand-chose à faire dans le coin. Ils évitèrent le temple, pour si jamais et ne trouvèrent rien de mieux à faire que suivre un groupe nourri de touristes allemands qui allaient, tout gaillards, à la vallée des Nobles.

Le guide vantait l’histoire de ces lieux…en allemand, mais on s’en fichait un peu. Suivre le mouvement et regarder, c’est tout ce qu’ils avaient à faire.

Et puis le clou de la balade. La tombe du grand vizir…Ramose.

Le groupe s’extasiait en toute joie de cœur devant la somptuosité des lieux. La magnificence des fresques, des bas reliefs, de ces scènes du passée si bien décrites, ayant survécu aux siècles pour rapporter aux générations présentes la splendeur de cette Antiquité révolue…


Paul était passé au pâle linceul. Son cœur avait entamé une course folle, semblant prêt à lui éclater dans la poitrine, à en faire mal. Des scènes insensées passaient dans son esprit comme un film…Douloureuse régression. Des voix, des visages. Un rire pervers…Ramose lui avait tendu un piège et il y était tombé à pieds joints. Ramose l’avait trahi en tuant Isisnefer…Ramose l’avait assassiné…

Je…dois…sortir de là !, parvint il à farfouiller en s’adossant à un mur.

Le guide l’intima brusquement de ne pas le faire mais il ne bougea pas d’un poil.

Écartez vous de là, monsieur…On ne doit toucher à rien dans cet endroit…

Ce n’est que la tombe d’un assassin…

Vous ne savez pas…

C’est vous qui ne savez rien…personne ne sait rien…

Shirley le regardait, implorant, mais en cet instant Paul Morgan était très loin du présent. Revivant avec atroce douleur les affres de la traîtrise de celui qu’on louait là comme un haut et respectable personnage. Il avait su embellir sa mort, ce damné Ramose, perpétuant son souvenir dans toute cette splendeur. Dans cette tombe-palais qui parlait si bien de son goût pour la démesure et le pouvoir…

Monsieur…

Le Dr. Templeton intervint énergiquement et donna quelques explications sur le peu de dégât que pourrait causer un innocent touriste en s’appuyant contre ce mur qui avait déjà supporté tant de siècles. Faisant remarquer au guide butté que Paul semblait à point de défaillir pour de bon. Acte suivi, elle le prit par le bras et l’entraîna à sa suite…Il suivit comme en songes, chancelant. En arrivant à l’extérieur, Paul réalisa qu’elle non plus n’avait pas l’air trop en forme non plus. Tous deux avaient perçu la même chose. Les mêmes souvenirs les avaient assaillis…la même vieille et sournoise douleur.

Je…finirai bien…par y croire…

Un petit sourire éteint lui répondit.

Marchons un peu…éloignons nous d’ici…

S’éloigner, soit. Pour aller où ? Ils étaient en pleine nécropole et à en croire au malaise persistant, entourés de leur histoire. Comme si ces tombes enfouies dans le sable recelaient le secret de leurs vies…Shirley essayant de surmonter ces sensations crût bon donner quelques explications appréciatives sur ce qui les entourait mais Paul ne l’écoutait que d’une oreille distraite. Son attention semblait fixée sur un autre édifice…vers lequel il dirigea ses pas comme en songes…Moins somptueuse que celle de Ramosé cette tombe n’était pas moins bien conservée. Là, se tenait un autre groupe de touristes ébaubis, qui buvaient les paroles de leur guide comme s’il leur délivrait les mystères de l’Antiquité.

La grâce du Pharaon a été grande en permettant que celui qui fut le grand prêtre ,même si ne l’étant plus au moment de sa mort, soit enterré parmi les Nobles …Ici, ce fresque magnifique le représente lors de la procession et…

Et de poursuivre sur le même ton, Paul n’écoutait plus…Comme si la foudre l’avait frappé, il venait de s’effondrer comme une masse, face à tout ce petit monde qui s’affola bellement. On aurait pu s’attendre que le vieux monsieur aux cheveux blancs et barbiche idem, fasse le numéro du touriste dans les vape, mais jamais ce gaillard qui semblait bien solide. Le vieux monsieur en question était docteur et se porta diligemment au secours de l’évanoui…sauf que pour les effets, il lui trouva plutôt des allures de mourant, là.

Il est très mal en point !...Une attaque fulminante !

De quoi? voulut on savoir. Il n’en avait pas la moindre idée…de tout !? De là à avouer qu’il était dentiste, il n’y eut qu’un pas et comme vraisemblablement ce n’était pas une rage de dents qui avait terrassé Paul il fallut bien supposer que c’était quelque chose de bien plus grave…

Retour au monde des vivants ! Quel confort ! Plus de sable chaud ni de souvenirs effroyables. Des coussins calés sous la tête, on l’avait installé dans un divan, le premier à portée de main…Shirley, toute angoisse, se penchait déjà sur lui, bassinant doucement son visage, l’embrassant, tendrement, les larmes aux yeux. Un peu plus loin, Rassim Bey, préoccupé, ne se priva pas de le sermonner un peu.

Mais quelle idée avez-vous eue de vous aventurer dans cette tombe?…Vous l’avez su depuis le premier instant, n’est ce pas ?...Vous saviez de quelle tombe il s’agissait, non ? C’est de la folie de tenter le passé de la sorte… C’est narguer le Destin, ce que vous avez fait…Vous avez défié la mort…ne la tentez pas si vite de vous reprendre , mon ami…Vos détracteurs auront eu la confirmation à leurs doutes…

C’était…ma tombe…

Comme qui dit : « C’était le jardin de ma grand-mère ».

En effet, celle là est bien la tombe de Bakenhonsou, le grand prêtre…la vôtre.

Scepticisme, quand tu nous tiens. Paul se redressa, malgré tout et secoua la tête.

Faisait chaud…le soleil…

Allons, Mr. Morgan, vous savez aussi bien que moi que les inclémences des intempéries n’ont aucun effet sur vous…Pluie, soleil, neige ou sable…vous êtes un dur…pas une chiffe molle qui s’évanouit à cause d’un coup de chaleur. Buvez plutôt un peu d’eau et finissez par accepter votre destin.

Son destin ? Il l’avait imaginé autrement, celui là. Un Pulitzer, par exemple…pas une réincarnation. Il voulait avoir un Pulitzer ou deux…pas être l’esprit revenant d’un grand prêtre assassiné en pleine intrigue égyptienne, 4.000 ans auparavant…

Je…dois…retourner à New-York…

Hum ! Il me semble que ce n’est pas exactement ce que vous allez faire…

Il finit par se lever même si sa belle protesta avec véhémence. Sa jambe lui faisait mal, on s’en fichait. Une seule envie la taraudait là, filer au plus vite, mettre de la distance entre cette folie dangereuse et lui. Continuer avec sa vie, telle qu' il l’aimait…L’expression de Shirley était de totale désolation, elle devinait ses pensées, savait qu’il n’hésiterait pas à l’abandonner, au besoin, à ses rêves …En plus de commode, il était égoïste…le beau prince charmant qui ne suit que ses propres idées, se fichant de celles des autres…mais celle là était sa nature…

Je…ne veux pas rester ici, s’entêta t’il, tout ceci est dément…et…je ne suis pas fou…Viens avec moi, Shirley…viens avec moi !

Elle alla avec lui mais pas plus loin qu’au jardin embaumé…Il eut droit au reproche muet de ses yeux, à des paroles pleines de douceur qui parlaient, n’empêche, de désillusion. Définitivement, il n’était que le dernier empoté de la terre.

Tu as sans doute raison…mais pour tout dire…je finis par penser ne plus avoir droit à ma propre vie…On m’investit d’une mission assez saugrenue…Il y a bien une petite guerre quelque part qui attend que je la suive…je ne suis pas le plus indiqué pour ce que vous semblez attendre de moi…Oui…bien sûr que j’y penserai…tu sais bien que même si je ne le veux pas…il te suffira de me regarder comme tu le fais…

Agacé par sa propre faiblesse, il clopina en s’éloignant d’elle, c’est presque avec rage qu’il finit par reconnaître sa défaite.

C’est à en mourir de rire…J’en ai marre…mais c’est bon…je suivrai le jeu…

En avançant un peu, il venait de découvrir la splendide piscine qui occupait ce coin du jardin…

Allez, oublions plutôt cette satanée journée et allons prendre un bain…ça nous fera du bien.

Rassim Bey n’y vit aucun inconvénient et les laissa en paix, allant sans doute s’occuper à peaufiner sa petite intrigue.

Il faisait si bon dans l’eau. Bénie soit elle, qui lui permettait d’étreindre celle qui avait si bien pris son cœur.

Si cette histoire ne s’arrange pas…je te jure que je deviens triton…et tu seras ma sirène…

C’était parti pour un de ces discours amoureux qui le surprenaient lui-même. Shirley avait un effet troublant sur ses agissements. Rassurée sur ses plans de fugue immédiate, elle se montra enjôleuse et tendre même si se payant allègrement sa tête. Il l’aurait bien mérité.

Ils étaient là, à oublier passé et présent, en parfaite communion d’esprits quand la paix idyllique de cet instant parfait fut rompue…de façon fracassante par une apparition des plus inattendues. Sortant de Dieu sait où, un couple venait de se matérialiser au milieu d’un fantastique éclaboussement, trois brassées plus loin.

Mais…c’est quoi ça !?

Ça...c’étaient un gars blond de belle taille qui enlaçait une brunette essoufflée , qui ne tarda rien à se mettre à hurler comme une dingue…manifestement affolée par la situation. Elle se débattait comme une diablesse et ne manquerait pas de noyer son compagnon, sauf que celui là avait, faudrait y croire, tout prévu…Il l’embrassa et la belle se calma miraculeusement. Ils auraient, sans doute, poursuivi avec leur petite scène si Paul ne s’était trouvé l’esprit de leur faire remarquer qu’il y avait du monde.

Pas que je sois trouble fête mais…auriez vous la bonté de nous expliquer d’où vous sortez, vous deux ?

Très maître de la situation, le blond inconnu procéda à se présenter…comme si on était dans un salon. Puisqu’on en était là, Paul suivit la tonique du moment et tendit sa main :

Paul Morgan, enchanté !

C’était quoi cette étrange sensation de déjà vu !? Pourtant, il était assez sûr de ne l'avoir jamais croisé, ce Joshua Cromwell...
Revenir en haut Aller en bas
Shirley Templeton
Admin
Admin
Shirley Templeton


Messages : 161
Gallions : 38822
Date d'inscription : 08/01/2010

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyDim 22 Aoû - 22:43

Amoureuse ? Oh oui !
Jamais Miss Templeton, la sage et pudique Egyptologue n’avait connu un tel tourment.
Paul était devenu, en très peu de temps, l’être unique pour lequel elle se sentait prête à tout abandonner, tout oublier. Sauf que là… Il s’agissait de se souvenir… Et ça coinçait.

*Paul… Baken…. Baken… Paul…*

Shirley se foutait d’être à poil dans ce petit lac, seuls comptaient les étreintes de son aimé. Elle le désirait et sentait que c’était partagé.
Pourtant… Un souvenir… ? Une sorte d’alerte rouge résonnait à sa place. Ce n’était pas le lieu ni le moment pour se donner complètement. Quelle frustration !


Quand on trouvera les autres...si on croit à ce que dit Rassim Bey…


Il doutait encore ! Tant d’incrédulité la scia. Comment pouvait-il réfuter que quelque chose d’extraordinaire était en marche ?
Leur attraction mutuelle et répulsion simultanée n’en étaient-elles pas des preuves évidentes ?
Les astres… Shirley ne s’y était jamais trop attardée. Rassim Bey oui, apparemment.
Qu’importe !
Miss Templeton se sentait prête à donner son âme au diable s’il le fallait à condition de connaître ou reconnaître Paul en son entièreté.

Nuit solitaire…
Les idées à l’envers Shirley ferma les yeux sans pour autant trouver la paix. Dieu sait combien de fois elle se retourna et… pleura.

*Bakenkonsou… mon amour… *

Il était si proche et si lointain.

*Et si le temps avait effacé sa foi en moi ? S’il ne m’aimait plus comme avant… Tu es folle ! Ce garçon t’aime, il te l’a prouvé à maintes reprises ! Je ne sais plus ! Je voudrais tout me rappeler, je voudrais…*

Le lendemain, après une nuit en dents de scie, Shirley avait affronté les dires de leur hôte avec flegme. Un espoir fou la tenailla : s’ils trouvaient les autres, tout serait possible.
Ils allaient s’y mettre avec entrain… Elle du moins.

Ils purent vite en rayer deux de la liste donnée par Rassim. Malgré cela, Paul demeurait sceptique :


Il y en a encore 24 sur la fichue liste…et je parie qu’ils ne rôdent pas dans le coin ! À quoi pense Rassim Bey ? Qu’on va aller courir le monde à la recherche de ces gens ?

Tout doux mon cœur. A chaque jour suffit sa peine.

Dans mon travail on est parés à tout…mais courir après une vérité hypothétique n’est pas ma branche…tu comprends…je suis…

Quelqu’un de pragmatique ! Tu aimes l’action et les vérités… crues. Tu t’adapteras. Il le faut


C’est dur à gober, tu l’as dit toi-même…Oui, pour toi c’est plus facile, tu y es immergée en plein…

Pas de sa faute si elle était tombée dedans étant petite ! Une sourde angoisse étreignait Miss Templeton. Il lui semblait que si Paul ne parvenait pas à surmonter la situation malgré sa bizarrerie, alors toute sa vie perdrait son sens.

*S’il abandonne… S’il m’abandonne… je suis foutue.*

Il avait l’air tellement sur le point de tout plaquer qu’elle lâcha, la gorge nouée :


Je crois que tu aimes relever des défis, non ? Puis-je… Puis-je espérer ne pas devoir continuer… seule ?

Redoutant la réponse, elle se pinça les lèvres, sachant qu’en cas de refus, elle allait se mettre à chialer lamentablement. Pourtant :

Bien sûr que je vais avec toi…tu sais que je te laisserai pas seule…mais faudra pardonner mon manque de foi…Pourquoi il ne pleut jamais dans ce fichu pays ?

Cette dernière remarque la fit enfin sourire. Il est vrai que s’il avait plu… Sans vergogne elle se serait jetée dans ses bras.

*Peut-être qu’en se mouillant fortement les lèvres… ou en s’aspergeant le visage…*


Ces idées audacieuses furent interrompues par une question normale :

On fait quoi, là ?...Parce que les autres, sur la liste…d’après ce qu’on sait, ils sont pas là…

Main dans la main, ils déambulèrent comme de bons touristes en tentant d’échapper à la myriade de vendeurs ambulants qui ne rataient pas une occasion pour leur tomber dessus mieux que des mouches sur… n’importe quoi.
Pas évident… Heureusement le bagage verbal arabe de Shirley remit plus d’une clepsydre à l’heure.

Leurs pas les amenèrent à se joindre à un groupe de visiteurs Allemands qui s’extasiaient à chaque démonstration de leur guide.
Pénétrer dans cette tombe ?
Shirley n’avait pas fait attention au nom du noble qui reposa là après ses funérailles glorieuses. Vu la somptuosité des lieux, il s’agissait d’un grand dignitaire. Par habitude, Shirley se lança dans le déchiffrage de certains hiéroglyphes et sentit les prémices d’un malaise la parcourir.
La lecture du nom du défunt la fit chanceler :


*Ramose, oh mon Dieu, non !*

Jamais Isisnefer n’avait rencontré personnellement celui qui avait causé sa perte. A peine si elle l’avait entrevu. N’empêche que l’effet était le même, elle se sentait suffoquer gentiment. Que dire de son pauvre compagnon ? Livide, Paul cherchait son souffle :

Je…dois…sortir de là !

Il commit l’immense outrage de s’appuyer à un mur. Aussitôt le guide l’apostropha mais Paul réagit comme s’il était à des lieues de là. Pour Shirley, il ne faisait aucun doute que le jeune homme revivait des scènes atroces du passé. Le guide voulut le houspiller, elle intervint :

Monsieur, laissez-le se reprendre. Vous ne voyez pas qu’il n’est pas bien ? Il n’y a aucun ornement valable sur ce mur !

Comment le savez-vous ?

Vous voulez que je vous montre ma licence en égyptologie ? Je ne me balade pas avec, désolée.
Cessez aussi de raconter des sornettes à ces gens. Vous venez de décrire un hymne à la gloire d’Amon alors qu’il s’agit d’un hymne à celui de Ramose !
Viens, mon chéri, sortons !


Elle rabattit la manche sur son avant bras afin de pouvoir le prendre et guider Paul dehors.
Là, elle n’y tint plus et lui aspergea le visage afin de pouvoir déposer un baiser sur ses lèvres.


Ça va passer, mon amour. Je ne me sentais pas bien là-dedans non plus.

Je…finirai bien…par y croire…

Rien de mieux ne l’agréerait.

Les retours aux sources sont très… douloureux. Ce cadre ne nous convient pas. C’est trop proche de ce que nous étions… avant.

Ils décidèrent de s’éloigner de ce cimetière au passé glorieux. Pour le distraire, Shirley tenta vainement de lui décrire le somptueux temple d’Hatchepsout qui s’élevait non loin. Tous ces piliers, ces terrasses, comme il devait rayonner jadis… Mais Paul ne l’écoutait pas. Comme possédé par une idée fixe, il les dirigea vers une descenderie proche.
Ils arrivèrent à la première marche juste pour entendre le guide déclamer :


La grâce du Pharaon a été grande en permettant que celui qui fut le grand prêtre ,même si ne l’étant plus au moment de sa mort, soit enterré parmi les Nobles …Ici, ce fresque magnifique le représente lors de la procession et…

Comme foudroyé, Paul s’écroula, plus pâle que les bandelettes qui avaient dû enrouler sa momie.

*C’est sa tombe ! Mon Dieu !*

Affolée, Shirley ne savait pas quoi faire à part commencer à vider le contenu du vaporisateur sur le visage aimé. Elle allait réclamer que l’on remonte Morgan au jour quand un petit barbichu s’en mêla en se penchant sur Paul :


Une attaque fulminante !

Vous êtes qui pour poser ce genre de diagnostic ? ragea Shirley. Il faut le remonter.
Vous et vous, soutenez-le !


Quasi folle d’angoisse, elle donna ses ordres. Son ton décidé fit bouger les spectateurs.
Dès qu’ils furent au soleil, Shirley attrapa son portable et appela leur seul contact amical du coin :


Rassim Bey… Paul ne va pas bien… La tombe de Bakenkonsou, oui ! Que dois-je…

Il n’y avait rien d’autre à faire qu’à attendre les secours. Rassim Bey était un homme pratique et judicieux. Il n’allait pas laisser vagabonder ses « élus » sans un soutien logistique approprié.
En moins de cinq minutes, deux baraqués arrivèrent en Jeep et ramassèrent Morgan et Templeton.
Assise à l’arrière, la tête de Paul sur les genoux, Shirley ne put que pleurer doucement en murmurant des paroles sans suite. Des mots d’amour, une complainte dans une langue éteinte, incompréhensible pour tous sauf peut-être pour le bel évanoui qui, par bonheur, revint à lui sitôt installé confortablement chez le conservateur du musée.
Quel savon !

Ils en entendirent des vertes et des pas mures sur les dangers à vouloir narguer le destin.
Une belle empoignade verbale s’en suivit.
Perdue, Shirley suivit le débat en s’affolant à nouveau devant l’air buté que prenait Paul :


Je…dois…retourner à New-York…

Cette déclaration lui fit un mal de chien. Dire qu’il lui avait assuré rester avec elle pas plus tard que tantôt. Serait-il une girouette ? Il ne lui donnait pas cette impression, mais...

Je…ne veux pas rester ici, tout ceci est dément…et…je ne suis pas fou…Viens avec moi, Shirley…viens avec moi !

Docile, une houle de sentiments contradictoires d’animant, elle le suivit au jardin où elle resta en retrait, terriblement chagrinée :

Je… Je peux te comprendre. Essaye de comprendre aussi… Si je te dis que je me moque un peu de ce que l’on attend de nous, me croiras-tu ? Je ne sais qu’une chose qui soit vraie : je t’aime Paul.
Ça nous tombe dessus sans que nous n’ayons rien demandé, rien voulu… Crois-tu que ça m’amuse plus que toi ?


Tu as sans doute raison…mais pour tout dire…je finis par penser ne plus avoir droit à ma propre vie…On m’investit d’une mission assez saugrenue…Il y a bien une petite guerre quelque part qui attend que je la suive…je ne suis pas le plus indiqué pour ce que vous semblez attendre de moi.


Je n’attends rien d’autre que toi, moi. Cela ne compte pas ? Pourras-tu… tout oublier ?

Bien sûr que j’y penserai…tu sais bien que même si je ne le veux pas…il te suffira de me regarder comme tu le fais…

Boudeur, il s’éloignait. Elle sentit son sang se glacer :

C’est à en mourir de rire…J’en ai marre…

*Alors… c’est fichu !*

Tremblante, au bord des larmes, elle allait se détourner vaincue quand une suite inespérée la freina :

Mais c’est bon…je suivrai le jeu.

Muette, Shirley le contempla en doutant encore de ce revirement qui la comblait. Son air amusé la rassura complètement :

Allez, oublions plutôt cette satanée journée et allons prendre un bain…ça nous fera du bien.

Oh oui, alors ! Elle ne demandait pas mieux. Les maillots s’enfilèrent à la hâte et, gaiment, ils piquèrent une tête dans la splendide piscine de Rassim Bey.

Qu’importe quête, momies, serments quand on est dans les bras de celui pour qui on brûlerait en enfer. Là, Shirley goûtait au Paradis. Le corps de Paul contre le sien, sa bouche chaude sur la sienne, un pur bonheur…

SPLATCHHHHHhhhhhh !!!

Le tourbillon de ses sens brutalement interrompu, Shirley demeura suspendue aux bras de Paul qui se tournait vers les intrus. Belle mêlée que ceux-là ! Ils se battaient ou quoi ? D’où sortaient-ils ?
Oh… Ils s’embrassaient…


*Douce lutte, pensa Shirley, amusée par cette scène. Un peu comme nous… sauf qu’ils sont tout habillé !*

Déjà Paul prenait les devants :

Pas que je sois trouble fête mais…auriez vous la bonté de nous expliquer d’où vous sortez, vous deux ?

On se serait cru dans un salon mondain, plus que dans une piscine. Le grand gaillard blond ne fit aucune réticence aux présentations mais ce n’était pas lui qui retenait l’attention de l’égyptologue.
Fascinée, elle détaillait l’autre naïade improvisée.


*Cette tête… non pas la tête… Ces yeux-là… je les connais !*

D’ailleurs son attraction semblait partagée. La Miss la dévisageait avec une semblable curiosité.

Pardon ? Nous connaissons nous ? Je suis Miranda Sheridan…et je suis sûre de vous avoir vue quelque part !

*Oh oui… Je suis sûre que oui !*

Pour Shirley les choses s’éclaircissaient à la vitesse de l’éclair. Il ne faisait aucun doute que dans cette eau chlorée, un phénomène incroyable se produisait. La prudence restait de mise, pourtant. Inutile d’affoler la nouvelle venue avec des déclarations d’outre tombe :

Je suis Shirley Templeton, égyptologue. Et vous êtes… ?

Sa question reçut sa réponse avec l’apparition de Rassim Bey qui, sans cacher un plaisir immense, reçut des confidences :

Je suis Miranda Sheridan, impossible de trouver une explication sensée pour ma présence ici mais enfin…Je pressens que vous en savez plus que nous, Monsieur…

Ils sortirent de l’eau sous l’œil bienveillant de leur hôte qui les convia à se changer avant de poursuivre les conversations. Shirley ne voulait pas se changer. Elle voulait rester mouillée près de Paul. Lui non plus n’avait pas l’air enchanté de la quitter. Elle parvint à lui souffler :

Neith et... Paser ou Emhat. Plutôt Emhat ! J’en suis quasi certaine. Les noms de Sheridan et Cromwell sont sur la liste… A tout de suite mon amour.

Déconfite tout en ressentant une immense excitation à l’idée de cette confrontation, Shirley se doucha et enfila une pudique longue robe blanche.

*C’est Neith, ma main à couper. Mais… quels changements ! D’où lui vient cette… arrogance ? De l’argent, sans doute…*


Peu après, réunis au salon, Miss Sheridan parut être l’hôtesse ou la présidente d’un jury quelconque :

Bien…nous pouvons commencer !

Le maître des lieux ne s’en formalisa pas et, après l’avoir remerciée, il leur tint un discours assez similaire à celui déjà tenu.
La jolie Miss tentait d’argumenter et se révoltait d’avoir été soumise à une surveillance de ses agissements. Mais quand, enfin, l’évidence parut s’installer, Shirley sentit son cœur s’accélérer, son âme s’envoler :


Neith, si j’en crois à ce que…je rêve.

Comme en transe, Miranda s’approcha d’elle. Sa voix résonnait bizarrement. Usant du même langage antique abscons pour les non-initiés :

Mon cœur s’emplit de joie, Isisnefer, ma sœur…les dieux sont cléments, encore une fois. Les siècles ne se seront pas écoulés en vain…

Émue aux larmes, Shirley se dressa à son tour, répliquant mêmement :

Au-delà du temps, nos âmes sont sœurs à jamais. Neith… Ma folle gazelle du désert… je te retrouve enfin !

Une commune entente les poussa à s’étreindre mais à peine leurs mains échangées, il fallut s’écarter.

Wow…alors, c’est vrai !!!

Miss Sheridan semblait emballée et aussi confuse en bombardant leur hôte de questions relatives à cette cuisson qui les frappait au moindre contact.

Oui, c’est un signal de reconnaissance…qui décroit parce que vous êtes près du but...quand vous serez ensemble, tous les six…le cercle sera complet et cela cessera.

*Merveilleux ! Vite que ça arrive !*

Shirley ne pensait pas trop à ses anciennes amies en ce moment mais surtout au beau blond taiseux qui suivait la conversation avec une mine… mitigée.
Pendant que Rassim donnait ses informations sur la position supposée des autres, elle se rapprocha de Paul :


Tu vois… ça va s’arranger. Rien, bientôt ne nous séparera plus, mon chéri, souffla-t-elle pleine d’espoir.

Miranda se tourna vers son compagnon, exigeante :

Il me semble que toi, tu sais une paire de trucs qui pourraient être utiles…mais après…je veux des explications !

Oups ! La Neith dont elle gardait un vague souvenir ne possédait pas cet air dominant. Elle avait toujours été la plus délurées des trois mais… Etrange ce que les siècles peuvent vous modifier…
Le cœur de Shirley se serra. Et elle ? Avait-elle beaucoup changé ? Était-elle encore pour Baken son lotus au parfum suave… la musique qui ravissait son cœur… sa seule aimée… ?
L’idée du contraire lui broya le cœur. Il lui avait dit être libre… Tout dans son attitude prouvait son attirance pour elle.
Revenir en haut Aller en bas
Josh Cromwell
Sorcier
Sorcier
Josh Cromwell


Messages : 48
Gallions : 25628
Date d'inscription : 02/05/2010

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyLun 23 Aoû - 21:33

Miranda Sheridan ! Si on lui avait dit qu’il tomberait amoureux de cette femme, Josh aurait ri aux larmes ou crié au fou. Même s’ils s’en défendent, les hommes ont aussi leurs critères de sélection quant à la gent féminine. On les dit moins exigeants que les filles… tout dépend de ce qu’ils recherchent. Là, Cromwell ne cherchait rien ni personne. C’était arrivé, et puis c’est tout.
Si en ce monde chacun possède sa chacune, alors il l’avait trouvée. A tout prendre, il avouait être gâté. Il aurait pu tomber sur bien pire. Miranda n’était pas parfaite… Qui l’était ? Sûrement pas lui ! Qu’elle soit si… dominante( ?) pouvait s’avérer dérangeant. Mais, quelque part, Josh percevait une fragilité sous cette cuirasse bâtie par la force des choses. Miranda avait peur de se faire avoir, imaginant en chaque homme rencontré un requin prêt à les dévorer, elle et sa fortune.
Pourtant, malgré ce qui les opposait, Josh était convaincu de sa sincérité envers lui. Il n’était pas son jouet, il l’aurait juré. Elle avait son caractère, lui le sien. Néanmoins, être pris dans des filets aussi doux soient-ils n’était pas pour enchanter un indépendant tel Comwell.
Quoiqu’il fasse pour expliquer les raisons de cette attirance envers la jeune femme, il faisait chou blanc.
Pourquoi fallut-il qu’il débusque Paggitt ? Un mal, un pis ? Cela éclairait bien des choses…


*C’est complètement absurde mais j’y crois. *

Ces rêves à répétition seraient des réminiscences du passé ? Ces « répulsions » quand il touchait Miranda une preuve d’un serment millénaire ?

*Oui !*

Pourtant, malgré son appartenance au monde magique, Josh demeurait cartésien. Avec les déclarations de Paggitt, chaque pièce prenait sa place, tout avait un sens. Il avait râlé… par habitude car… on ne se défait pas facilement d’un comportement bâti en tant d’années.
Ni lui ni sa belle non plus, du reste. Affolée, désorientée, elle voulait partir. Soit !
Sans un signal à Paggitt, il avait entraîné Miranda dans un transplanage de fortune.
Destination : Louxor. La Détermination y était, la Décision aussi. Les trois D réunis, Josh avait juste laissé au destin le choix de la matérialisation.


*Un lieu sûr pour âmes égarées.*

Se matérialiser dans une piscine ? Que demander de mieux. Il pouvait étreindre Miranda tout son saoul, et ne s’en priva pas. Sauf que…

Pas que je sois trouble fête mais…auriez vous la bonté de nous expliquer d’où vous sortez, vous deux ?

Ils n’étaient pas seuls ! Dès qu’il rejeta l’eau ruisselant de ses cheveux et put relâcher un peu Miranda, Cromwell distingua l’intervenant qui tint « salon » de présentation.


*Morgan… Un journaliste… M****e… Bakenkonsou… *


Quelque chose d’inattendu se produisait ici. Se pouvait-il qu’inconsciemment Josh ait désiré rencontrer son ami ?
Autre phénomène, Miranda semblait fascinée par la compagne de ce Paul Morgan.
On papota, se présenta tour à tour puis un inconnu aux apparences ravies déboula :


Soyez les bienvenus !

*A croire qu’il n’attendait que nous. Il organise une aqua-party ou quoi ? *

Sans fioriture, ce Rassim Bey se prétendit gardien du secret.

*Encore un ? Ils sont foule !*

Circonspect devant autant de coïncidences dérangeantes, Josh accepta de sortir de l’eau sans pour autant s’éloigner de Miranda. Elle encaissait mieux qu’il ne l’aurait cru même si elle cherchait son appui dans un rapprochement physique.
Ah… On voulait qu’ils se changent ? Josh serait très volontiers resté mouillé, lui.
Tel un chat à l’affut, il surveilla les attitudes des uns et des autres. Baken et Templeton semblaient aussi désolés que lui de devoir se séparer.


*Ils ont l’air d’être dans la place depuis un moment… Qu’est-ce que l’on vient foutre ici ?*

Prendre une douche ? Bah… Après l’eau du Nil suivie des celle de la piscine…
Crinière séchée, vêtu de lin blanc, Josh alla sagement s’asseoir au salon où les autres étaient déjà installés. Miranda était délicieuse dans cette tournure bleu nuit. Impatiente comme toujours, elle « ordonna » le début de la séance. Rassim ne fit que confirmer l’incroyable récit de Paggit.


Vous êtes quatre des ces six élus. Les astres ne se sont point trompés, loués soient ils.

Sa petite entêtée de bonne femme ne se laissait pas convaincre facilement. Elle argumenta et obtint des réponses. Preuve de sa soumission, comme possédée par une autre personne, elle reconnut être Neith et alla jusqu’à toucher son amie éternelle : Isisnéfer.
Lui se contenta de filer un œil à Paul, histoire de voir comment celui-là réagissait :


*Sceptique ? C’est bien Bakenkonsou !*

Ils allaient en avoir des choses à se raconter ceux-là. Quoique pour l’heure Miranda voulait surtout que ce soit lui qui soit sur le devant de la scène :

Il me semble que toi, tu sais une paire de trucs qui pourraient être utiles…mais après…je veux des explications !

Rassim Bey leur avait offert du thé à la menthe en accueil typique égyptien. C’était une coutume charmante, mais là Josh avait un urgent besoin de quelque chose de plus fort. Leur hôte le comprit-il ? Il ne se formalisa pas en faisant circuler un plateau chargé d’alcools entre ses invités occidentaux.

Vous pouvez fumer également, si le cœur vous en dit. Faites comme chez vous, insista-t-il.

*Ce gars a l’air de se marrer comme un larron en foire…*

Allumant un cigare, Josh prit le temps de la réflexion, conscient que tous avaient les yeux posés sur lui. Il lança une bouffée en l’air et attaqua :

Je dispose effectivement d’un moyen efficace et discret pour mettre rapidement la main sur les absents. Je suis… différent de vous… par pour longtemps, je pense. Vos esprits rationnels réfutent tout ce qui se passe… moi, j’y adhère plus facilement parce que dans… mon monde, nous sommes habitués aux situations… bizarre : je suis sorcier.

Il avala une gorgée de scotch pour se donner contenance. A part le conservateur, les trois autres tombaient des nues. Les femmes ouvraient des yeux ronds et Paul hésitait entre la rogne et la moquerie.

Miranda, ma chérie, tu as déjà pu assister à quelques… euh… tours de ma part. Ne me demandez pas pourquoi je suis sorcier et vous pas. Je n’en sais rien. Vous le redeviendrez. Je crois en cette histoire de réincarnation parce que… Je ne vois aucune autre explication valable.
Je ne tiens pas à exhiber mes… pouvoirs. Je ne m’en sers d’ailleurs que rarement.
La nécessité faisant…


Il brandit sa baguette et lança :

Spero Patronum


Un aigle royal argenté se matérialisa.
Concis, Josh ordonna :


Localise Mesyt et Paser !

L’apparition se dilua sous les yeux effarés des autres. Josh grimaça un sourire :


Cela s’appelle un patronus. Tous les sorciers en possèdent un qui a sa forme spécifique selon... l’humeur. Ce ne sera pas long.

Josh se faisait l’effet d’un animal de cirque, chose qu’il détestait. Tous étaient à la fois étourdis, charmés et incrédules.

Non Miranda, je ne peux pas faire apparaître une rivière de diamants. Par contre… je peux faire pleuvoir

De là à lui avouer qu’il était responsable de la grosse ondée sur le bateau… Elle comprit, et sourit.

Rassim Bey ne fut pas sans ajouter son mot :


C’est magnifique, Mr Cromwell, avec un allié tel que vous dans nos rangs, Ramose n’a qu’à bien se tenir. Je n’avais pas encore vu, de mes yeux, une telle démonstration. Mais j’étais au courant…


Ouais, grommela Josh en arpentant le précieux tapis du salon. Paggitt en est un exemple… Je parie qu’il cherche encore comment arriver ici…

Il trouvera…

Un Crac le confirma dans la seconde.
Un peu confus, le domestique s’inclina d’abord devant sa maîtresse puis vers leur hôte.


Je suis navré d’arriver si tard. J’ai aussi failli à ma mission…

L’expression de Rassim changea de façon à peine perceptible mais Josh qui guettait la surprit :

*Faire cracrac avant l’heure n’était pas prévu dirait-on… Tant pis !*

Ses réflexions furent interrompues par le retour de l’aigle.

Voilà, soupira-t-il après avoir entendu les indications du patronus. Maintenant nous savons où se situent nos deux absents. Je propose d’aller les cueillir sur place. Paul… J’aimerais que tu viennes… Mais tu dois d’abord digérer tout ça, non ? Paggitt, venez !

Sans demander l’avis de personne, Josh entraîna le domestique.
Plop ! Les voilà face à… un trio !


*Pas prévu, ça non plus ! * s’irrita légèrement Cromwell. *D’autant qu’ils sont plutôt mal en point !*

Des yeux pochés, l’air cadavérique de l’un d’eux, une miss aux yeux de biche affolée avec le nez enflé…

Qui êtes-vous ? Que voulez vous ?

Des amis. Ne vous inquiétez pas, ça va aller. On ne fait pas dans le détail, Paggitt. Prenez la femme, je me charge du reste.

Le reste renâclait un peu. Le brun surtout. Le blond, lui, paraissait ébloui, come prêt à tourner de l’œil.


Accrochez-vous, dit Josh.

Un instant plus tard, il lâchait son double fardeau sur le tapis d’Orient devant une assistance médusée, plus ou moins ravie :

Celui-là a besoin de soins.

Un léger revigor ramena Jack des limbes où il voulait partir.
S’empressant auprès des arrivants comme une poule pour ses poussins, Rassim Bey babillait en multipliant les présentations :


Vous êtes en sûreté…chez moi, Rassim Bey, le gardien du secret… Tu es chez toi, Paser…tu es de retour chez toi !

Miranda et Shirley s’étaient levées et contemplaient, bouche bée, la femme en tchador qui tanguait au bras de Paggitt. Elles allaient s’étreindre, mues par un sentiment issu des profondeurs du temps :

NON ! rugit Rassim, affolé. Ne vous touchez pas ! Pas encore. Vous aurez tout le temps pour ça après… après la cérémonie ! Mon Dieu que je suis content !

Toujours efficace, il délégua des domestiques pour séparer les trois amies et les conduire à leurs appartements. Il revint ensuite auprès des hommes. Jack ne payait pas de mine et Nick paraissait sur le point de rentrer dans le lard à qui toucherait son frère. Paul, pétrifié dans son coin, contemplait la scène, indécis. Avec une joie sauvage, tant pis pour le rituel d’accueil, Josh prit le journaliste par le bras :

On les laisse se débrouiller. J’ai tellement envie de te causer à part !

Rassim Bey blêmit en les voyant s’éloigner :

Vous ne pouvez pas… Vous n’allez pas…

On va pas loin.

Tout juste si, comme un sale gosse, il ne lui tira pas la langue en transplanant.

Un bar, comme des centaines à Louxor les reçut.


Désolé mon *vieux* de t’avoir accroché mais on doit parler en tête-à-tête.

L’émotion était très forte et Josh n’y tint plus d’étreindre fraternellement son ami de toujours.

Tu n’es pas encore convaincu, hein ? Toujours pareil avec toi ! rit-il en lui flanquant une bourrade dans le dos. Le plus sceptique de tous *Celui qui nous a entraîné là-dedans !*
Fais pas cette tête ! Allons boire un verre. Baken… Mon plus vieux pote !
Alors tu as mis la main sur Isisnefer ? Elle est bien mignonne et n’a pas perdu sa candeur… Moi ? … J’hérite d’un délicieux tit monstre plein de fougue, mais je ne m’en plains pas. C’est Neith… différente mais si peu.


Installés dans un coin discret que Josh avait sécurisé contre les oreilles à rallonge et autres dispositifs d’espionnage, Ils s’épanchèrent.

Dans cette vie, tu es journaliste ? Il me semble avoir lu plusieurs trucs de ta part…. des trucs très… forts. C’est en reportage que tu as été blessé ? … Tu montreras ça à Isis quand elle aura récupéré ses pouvoirs… Bien sûr qu’elle en a… comme nous tous !... Comment je le sais ?... euh… Je le pressens, si tu veux. Je n’ai que ça pour l’instant : des souvenirs.
Parle-moi de toi, de ce que tu ressens.


Comme il le prévoyait, Paul était réticent. Il voulait y croire, se disait amoureux de Shirley mais quelque chose le tracassait dans cette histoire.

Je ne peux pas te donner tort. Je viens de débarquer mais, toi qui le connais depuis plus longtemps que moi, as-tu confiance en Rassim Bey ? C’est bien beau la confrérie des gardiens du secret mais… Pourquoi ? Pourquoi nous aideraient-ils sans qu’il y ait un but inavoué là-dessous ?
Tu as vu la tête de Rassim quand je t’ai… « enlevé ». Je parie que notre conciliabule actuel ne lui plaît pas.
J’ignore d’où ça me vient… Faut-il abonder en leur sens ou… ficher le camp ?
Laisser les filles se réunir est primordial dirait-on. D’un côté, je sens qu’il le faut, d’une autre j’ai des doutes. T’en penses quoi ?


Pas facile d’exprimer à fond ce qu’il avait sur le cœur. Josh avait une confiance aveugle en Bakenkonsou mais… sans la réunion des filles, jamais ils ne retrouveraient complètement la mémoire, ni leurs pouvoirs. Alors…
Revenir en haut Aller en bas
Isabel Miller
Admin
Admin
Isabel Miller


Messages : 341
Gallions : 39354
Date d'inscription : 08/01/2010

Feuille de personnage
Age du perso:
Capacités:
Patronus:

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyMer 25 Aoû - 23:10

Après avoir passé la nuit à rêver de choses vraiment bizarres, Isabel se fit réveiller par Jack, elle se leva et après un petit déjeuner très maigre, les trois jeunes gens reprirent la route dans le désert. Ils étaient encore loin de leur destination quand le soleil commença à chauffer fortement. Ce n'est pas de gaieté de cœur qu'Isabel se priva de sa longue robe afin d'offrir un abri de fortune contre la fournaise. On s'arrangea comme on put sous cette tente improvisée. Il fallut se remettre en route quand la température devint supportable. Quelques kilomètres de marche plus tard, la belle vit un mirage, deux personnes étaient apparues devant leurs yeux ébahis, cette apparition laissa échapper un cri à la miss car elle venait de reconnaître l’un des hommes, du moins son esprit avait fonctionné comme jamais, un nom lui resta coincé dans la gorge.

*C’est impossible….*

Le temps qu’elle recouvre, un temps soit peu ses esprits Nick avait déjà parlé.

Qui êtes-vous ? Que voulez vous ?


Des amis. Ne vous inquiétez pas, ça va aller. On ne fait pas dans le détail, Paggitt. Prenez la femme, je me charge du reste.

*Prenez la femme ??? Mais que raconte-il ?*


L’homme en question se dirigea vers Isabel et la prit par le bras, il lui indiqua qu’elle devait s’accrocher à lui, pas le temps de réfléchir, elle obéit sans rien dire. Quelques secondes plus tard elle se sentit attirée dans un tuyau serré, elle avait du mal à respirer et allait sans doute perdre connaissance, mais juste avant de tomber dans les pommes, elle se sentit revivre.
Miss Miller ne chercha pas à savoir où elle se trouvait en ce moment, ni comment elle y était parvenue, elle cherchait du regard Nick et Jack, ce dernier était vraiment mal en point, il avait les yeux fermés. Elle s’agenouilla à ses côtés et se pencha sur lui, angoissée, elle ne pouvait pas le toucher, mais quelque chose se produisit alors, il reprit conscience juste quelques instants.


Vous êtes en sûreté…chez moi, Rassim Bey, le gardien du secret… Tu es chez toi, Paser…tu es de retour chez toi !

Puis Jack repartit dans les limbes, la demoiselle voulait faire quelque chose pour l’aider, mais une force incroyable la fit se retourner, elle se releva et vit deux femmes, elle les aurait reconnues parmi des centaines d’autres, Neith et Isisnefer, ses deux amies, ses sœurs de sang, Isabel se dirigea vers elles et tendit les mains, mais juste avant que les trois jeunes femmes ne se touchent Rassim Bey cria :

NON ! rugit Rassim, affolé. Ne vous touchez pas ! Pas encore. Vous aurez tout le temps pour ça après… après la cérémonie ! Mon Dieu que je suis content !

Après la cérémonie ???


Isabel se demandait bien de quoi Rassim parlait, elle n’en sut rien du tout, mais une autre chose lui trottait dans la tête et avant de se faire conduire à ses appartements, elle déclara :

Jack…..

Ne vous inquiétez pas pour Paser, nous veillerons sur lui, allez vous reposer et vous préparer pour le dîner de ce soir. Réhydratez-vous!.

Isabel ne connaissait pas ce Rassim et ne savait pas si on pouvait lui faire confiance, alors elle porta son regard sur Nick qui lui assura qu’il resterait aux côtés de son frère et rien ne lui arriverait de fâcheux.
La miss partit alors dans l’aile Ouest de l’immense maison et entra dans une pièce grandiose, des tentures étaient accrochées aux fenêtres, des tapis immaculés le sol et le mobilier était magnifique, un grand divan en velours beige avec deux fauteuil étaient installés juste devant la grande cheminée de pierre. Au milieu de pièce se trouvait une table ronde entourée de quatre chaises, sur l’un des pans de mur, il y avait une bibliothèque remplie de livres sur l’Egypte et les légendes.
Jamais, la jeune femme n’avait vu un endroit aussi magnifique, une porte au fond du salon donnait sur une grande chambre, tout aussi grandiose que le reste de l’appartement, Isabel ne voyait que le lit à baldaquin, on pouvait dire que Rassim n’avait pas fait dans la dentelle, il voulait vraiment que ses invités se sentent comme chez eux ici. Une salle de bains, voilà ce qui fallait à Isa qui avait besoin d’une bonne douche et de se changer, elle trouva dans la chambre, une grande armoire avec des vêtements les uns aussi beaux que les autres, sur le côté se trouvait une coiffeuse contenant tout le nécessaire de maquillage et bijoux dont une femme a besoin.
La miss se dégota une robe de chambre en satin et partit dans la pièce adjacente, c’était une salle d’eau, elle se dévêtit et entra sous la douche, cela lui fit un bien fou, elle resta au moins une bonne demi-heure et quand elle ressortit de là fraîche et propre, elle remarqua une odeur de pain frais et de café. Ne cherchant pas à savoir qui avait bien pu lui apporter à manger, elle se précipita dans le salon et s’installa à la table pour dévorer ces mets délicats, depuis la veille, elle n’avait pas beaucoup mangé.
Après ce repas, elle sentit la fatigue l’envahir et sa jambe la lancer, allant s’allonger sur le lit, elle ne tarda pas à trouver le sommeil.

Quelqu’un était en train de la réveiller, ouvrant les yeux, elle remarqua Nick penché sur elle, il lui donna des nouvelles de Jack et lui demanda comment elle se sentait, car elle avait une sale tête.


C’est vrai que je ne me sens pas très bien, j’ai de plus en plus mal à la jambe, je crois que c’est le contrecoup de la piqûre de scorpion….

Pas la peine d’en dire plus, Nick jeta un coup d’œil et quelques secondes plus tard il sortit de la pièce, elle se retrouva encore une fois toute seule. Même si il y a quelques jours encore elle aimait la solitude, depuis qu’elle avait rencontré les deux frères, elle ne voulait plus rester seule. Isabel voulait aussi revoir ses deux anciennes amies, il fallait qu’elle se lève mais sa jambe la faisait trop souffrir, et elle dû rester allongée, quelques minutes plus tard, Rassim arriva dans la chambre et constata la blessure de la demoiselle, il fit appel à une femme qui donna à miss Miller une boisson spéciale et appliqua sur sa cheville une pâte brunâtre qui brûlait.

Vous devez être en forme pour demain soir, lors de la cérémonie, déclara Rassim, reposez-vous, nous organisons un dîner avec vous six ce soir.

Puis l’homme sortit de la chambre avec Nick, la femme resta en compagnie d’Isa.


Je suis Fatima et c’est moi qui a en charge de vous servir… Je suis vraiment très heureuse que vous soyez en vie, Mésyt et si vous avez besoin de quoi que ce soit, n’hésitez pas à faire appel à moi.

Merci Fatima, mais je crois que je pourrai me débrouiller seule…..

Apparemment Isabel ne devait pas quitter ses appartements sans en demander l’autorisation, Rassim avait donné des instructions claires, les trois jeunes femmes ne devaient en aucuns cas se voir ni se toucher, c’était la règle d’or et Fatima faisait bien son travail, elle ne quittait pas des yeux la miss, qui commençait à en avoir un peu marre d’être surveillée de la sorte, mais que pouvait-elle y faire ?

En début de soirée, la jeune Miller pouvait enfin se lever sa cheville était guéri et elle se sentait beaucoup mieux, la fièvre était également tombée. Elle se leva et alla prendre une douche, puis Fatima lui apporta une robe longue de couleur verte qui reflétait l’éclat de ses magnifiques yeux.
Le dîner du soir était annoncé, Fatima conduisit Isa dans la grande salle à manger du rez-de-chaussée et la laissa en compagnie des autres qui arrivèrent à sa suite, l’émotion fut si forte que Mésyt voulut étreindre Neith et Isisnefer, mais bien sûr Rassim les interrompit juste à temps et les séparèrent encore une fois, alors au lieu de se toucher, les trois femmes se regardèrent dans les yeux, quatre hommes étaient déjà installés, il s'agissait de Baken et Emath, Nick était avec eux, Jack boudeur aussi...

Comme si Rassim devinait se qu’allait dire Isa il la précéda en déclarant :


Je suis vraiment très heureux de vous avoir tous retrouvé, demain sera un grand jour pour nous tous…. Mesdemoiselles, il faudra vous préparer et après le repas, je vous expliquerai en quoi consiste la cérémonie, mais pour l’heure j'ai des choses à faire, je vous laisse un peu…

Isabel se plaça entre Jack et Nick qui la regardait bizarrement, il devait sans doute avoir du mal à avaler cette histoire, cela se comprenait parfaitement. Neith entra en grande conversation avec Emath et Isinefer avec Baken. Rassim quitta les lieux. Paul prit la parole. Mésyt se demanda si après la cérémonie le froid qu’elle ressentait en touchant Jack-Paser- serait toujours d’actualité ou si tout ceci ne serait qu’un mauvais souvenir.


Ne lui avait-il pas confié en réponse à ses questions:

Dites-moi Rassim, vous qui savez tout sur nous, les étranges sensations que nous éprouvons en nous touchant, seront anéanties ou pas ?

L’homme s'était raclé la gorge, gêné:


Eh bien normalement oui, mais il se peut que ce ne soit pas le cas…. Je vous explique, à chaque incarnation vous perdez de votre essence d’esprit, la dernière fois, à ce qu’on m’a dit, vous aviez encore quelques décharges éclectique, pour certains d’entre vous, d’autre le froid etc…. juste après la cérémonie, mais vous savez mes informations ne sont pas aussi justes…. Donc il faudra faire un essai, par contre je dois vous avertir d’une chose, vous ne devez en aucun cas consommer votre union…. Sinon Ramose vous trouvera sans difficulté et vous mourrez.

*Il va nous espionner ou quoi ?.....*

Elle l'avait regardé avec animosité, il n’avait pas le droit de dire ce qu’ils avaient à faire surtout que là on parlait de leurs vies privée.

Je sais ce que vous vous dites, mais je fais cela pour votre bien…. Vous devez apprendre à maitriser votre magie et si Ramose vous tombe dessus avant que vous soyez prêts vous ne pourrez pas le vaincre, en plus c’est votre dernière chance, votre dernière réincarnation, c’est l’ultime combat.

De ce fait Rassim avait raison et puis de toute façon ce ne serait pas demain qu’Isabel et Jack consommeraient quoique ce soit vu l'état d'esprit de ce dernier envers elle…

Le repas était délicieux et Isabel affamée malgré son en-cas.
Ce que racontait Paul était intéressant, très intéressant.
Avec surprise, elle frôla la main de Jack en prenant du pain et aucune sensation désagréable ne se produisit.
Tout serait donc vrai?


Dernière édition par Isabel Miller le Sam 4 Sep - 12:31, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
https://hp-horizons.forumactif.org
Paul Morgan
Sorcier
Sorcier
Paul Morgan


Messages : 86
Gallions : 25332
Date d'inscription : 07/07/2010
Age : 42
Localisation : Le monde

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptySam 4 Sep - 11:51

Une récapitulation sensée s’imposait. Au cas d’en avoir une, bien entendu! Selon Paul, tout ce qui était en train de se passer tenait de la démence pure.

La délicieuse séance piscine avait été interrompue par l’apparition de ces deux là, le tel Cromwell avec ce joli morceau de fille nommée Miranda. Il aurait pu jurer, tout au début, sur une Bible, au besoin, de ne jamais les avoir croisés de sa vie…mais après un moment, il n’en était plus si sûr ! Que Rassim Bey s’en mêle ne l’étonna presque pas…celui là semblait être au courant de tout ce qui se passait dans le coin !

Paul s’en voulait de faire tant de foin. Ça faisait souffrir Shirley mais son esprit logique ne pouvait pas admettre toute cette salade d’information débile. Lui, grand prête d’Amon…c’était à en mourir de rire et pourtant…

Cromwell et Sheridan. Selon Rassim Bey et les astres, ils auraient partagé plus d’une vie.


*Finiras par t’y faire, à l’idée !*

Surtout que sa douce Shirley et Miss Arrogance se livraient à un drôle de numéro. Parlant une langue aussi morte que les Pharaons, les deux demoiselles s’approchaient…

Mon cœur s’emplit de joie, Isisnefer, ma sœur…les dieux sont cléments, encore une fois. Les siècles ne se seront pas écoulés en vain…

Et l’autre de riposter:

Au-delà du temps, nos âmes sont sœurs à jamais. Neith… Ma folle gazelle du désert… je te retrouve enfin !

Entendre ces noms le secoua. Pourquoi ? Il n’aurait pas voulu le dire de vive voix…tout simplement parce qu’il savait que c’étaient les leurs !

La réaction espérée se produisit. Pas de doute. Elles étaient bien ce qu’on supposait qu’elles étaient …des vieilles amies ! (On ne pourrait pas mieux dire !)

Miss Sheridan était en soi, tout un spectacle. Même sans la connaître personnellement Paul avait tout de même entendu parler de cette héritière. Qui non ? Créature blasée et imbuvable, au détour de tout. On la disait implacable, dure, froide…Vu ses remarquables manières de tyran, un de très joli, soit dit en passant, la demoiselle faisait honneur à sa réputation…sauf que là, elle semblait éprise du grand blond, Cromwell. Celui là, était aussi un autre numéro…


Je suis… différent de vous… par pour longtemps, je pense. Vos esprits rationnels réfutent tout ce qui se passe… moi, j’y adhère plus facilement parce que dans… mon monde, nous sommes habitués aux situations… bizarre : je suis sorcier.

Paul, qui avait accepté un whisky bien tassé au lieu du thé à la menthe, faillit s’étrangler avec sa boisson.

*Manquait que ça !...Quoi plus ? Un dresseur de cobras ?*

Mais le meilleur était à venir.

Ne me demandez pas pourquoi je suis sorcier et vous pas. Je n’en sais rien. Vous le redeviendrez.

*Redevenir !? De quoi parle ce mec ? Redevenir quoi ? Sorciers ?...Vivement qu’on appelle les hommes en blanc…*

Après ça, qu’il déclare croire à l’histoire de Rassim Bey et les fameuses réincarnations, n’avait absolument rien d’étrange. Paul avala le reste de son whisky et clopina renouveler la dose. Tant pis si Shirley le regardait de travers…il en avait besoin !

La suite ne fut pas triste. Cromwell tira un bout de bois de sa poche, décrivit avec une élégante arabesque en l’air au temps de dire un truc bizarre qui eut pour résultat faire apparaître un…aigle argenté.

Il avait sûrement paumé quelque part l’explication du pourquoi et comment mais le fait demeurait : là se passaient des choses hautement…inexplicables.

Pour compléter le tout, un autre inconnu au bataillon apparut après un Crac prémonitoire. Paul vida son verre. Le reste de la conversation se perdit quelque part entre ses propres élucubrations, qui n’avaient rien de gai ni positif. Entre ceci et cela, il crut piger que les deux qui manquaient à la fête étaient dans le coin…

Mais au lieu de deux, de n’importe quelle façon qu’il fut, Cromwell et son complice sorcier en ramenèrent trois…Pour alors, Paul sombrait doucement dans les vapeurs de l’alcool...ou du moins il voulait y croire. La seule chose qu’il désirait en ces moments d’incertaine réalité était aller refaire un petit plongeon à la piscine avec sa belle et oublier le reste du monde et ses histoires à dormir debout…

Confronté, de loin, aux nouveaux arrivants et malgré les whiskies, Paul eut une drôle de sensation en voyant le grand gaillard blond qui semblait prêt à tomber dans les vapes mais qui, inespérément, parla :


Tu…veilles toujours, Djar…encore…une fois tu…nous ramènes à bon…port…

Tu es chez toi, Paser…tu es de retour chez toi !

Paser ? Djar ? Pourquoi ces noms ne lui étaient pas inconnus !? Tout autant que…Neith, Emath, Mesyt, Isisnefer ou Bakenhonsou…Il savait…mais ne pouvait pas accepter !

La troisième fille en cause mena les deux déjà présentes à vouloir lui souhaiter la bienvenue mais le maître de céans avait bondi.


NON ! Ne vous touchez pas ! Pas encore. Vous aurez tout le temps pour ça après… après la cérémonie ! Mon Dieu que je suis content !

Plus que content, il semblait aux anges. Paul aurait voulu garder Shirley près de lui mais déjà Rassim Bey faisait partir ces demoiselles, dûment convoyées par des domestiques, êtres silencieux et serviles…

On les laisse se débrouiller. J’ai tellement envie de te causer à part !

Il faillit sursauter quand Cromwell s’approchant, le prenait du bras. Bey, lui ne sembla pas trop content de ce nouvel arrangement.

Vous ne pouvez pas… Vous n’allez pas…

On va pas loin.

Paul , qui n’avait pipé mot se vit soudain pris dans ce qu’il compara à passer par un étroit embout de caoutchouc, en sentant que tout son système digestif en pâtissait et le tout pour se retrouver quelque part d’autre face à un type qui semblait s’amuser pas mal.

Désolé mon *vieux* de t’avoir accroché mais on doit parler en tête-à-tête.

*On se connaît d’où !?*

Et l’autre de le broyer en une accolade bien sentie.

Tu n’es pas encore convaincu, hein ? Toujours pareil avec toi. Le plus sceptique de tous.

Il se défit, à la comme on peut, de cette étreinte de grizzly et dévisagea son vis-à-vis d’un petit air pincé.

Convaincu de quoi ? Je voudrais bien savoir…au fait…on se connaît !?

L’autre semblait ravi.

Fais pas cette tête ! Allons boire un verre. Baken… Mon plus vieux pote !

Froncement de sourcils. Vieux pote ? Baken ? Une petite explication devenait impérative mais au lieu de cela l’autre poursuivait comme si rien.

Alors tu as mis la main sur Isisnefer ? Elle est bien mignonne et n’a pas perdu sa candeur…

Mince ! Ça commençait à tourner drôlement dans sa tête. Il était tombé en plein dans une histoire de fous ou définitivement il était plus paumé que prévu mais ça, il n’allait pas l’admettre de sitôt, autant jouer son jeu.

Et toi ?

Deux petits mots qui ne voulaient rien dire mais qui donnèrent lieu à une jolie suite.

Moi ? … J’hérite d’un délicieux tit monstre plein de fougue, mais je ne m’en plains pas. C’est Neith… différente mais si peu.

Il devait ne pas être ce qu’on croyait, parce que rien de ce qu’on lui déballait jusque là ne parvenait à lui faire un effet…satisfaisant. Il laissa le blond faire des gentils tours de passe passe et attaqua, sans honte, la boisson qu’on lui avait servi avant de reprendre un peu le contrôle de la situation…ou de faire l’essai !

Écoute…moi, je suis Paul Morgan. J’ai un mal fou à gober cette histoire débile. Je suis un journaliste sérieux, moi.

Il n’avait pas l’air le moins du monde ému, Mr. Cromwell.

Dans cette vie, tu es journaliste ? Il me semble avoir lu plusieurs trucs de ta part…. des trucs très… forts. C’est en reportage que tu as été blessé ?

De la mitraille en Bosnie !

Tu montreras ça à Isis quand elle aura récupéré ses pouvoirs.

Nouvelle lampée à la boisson.

Tu parles de Shirley ?...Isis…ça me fait trop bizarre. Elle…a des pouvoirs ?

Bien sûr qu’elle en a… comme nous tous !... Comment je le sais ?... euh… Je le pressens, si tu veux.

Ah bon ?...et quoi plus ?

Je n’ai que ça pour l’instant : des souvenirs.

De quoi le rassurer pleinement…des souvenirs ? Il en avait lui aussi, saut que ça ne l’aidait pas en grand chose. Joshua Cromwell semblait se débrouiller mieux que lui.

Parle-moi de toi, de ce que tu ressens.

C’était parti pour le tour psychologique mais en y pensant bien, il n’avait rien à perdre.

Ressentir ? Pour être franc, je n’en sais trop rien…enfin, oui je sais…j’ai aussi des souvenirs étranges...comme si je régressais…alors je sais…elle est là et je l’aime…je reviens au présent et elle est toujours là et je l’aime toujours…C’est confus. C’est dur d’accepter que je sois ce qu’on dit que j’étais…un prête égyptien revenu de la nuit des temps ? Un peu dure à gober, l’histoire. Il y a quelque chose qui pue plein nez là…ces gardiens du secret, Ramose…Supposant que j’admette être Baken…à quoi ça nous mène ? On est tous réunis, à présent…pourquoi nous entourer de tant de mystère ?

Je ne peux pas te donner tort. Je viens de débarquer mais, toi qui le connais depuis plus longtemps que moi, as-tu confiance en Rassim Bey ?

Paul se passa la main dans les cheveux tout en secouant la tête.

Non. Je ne confie pas en lui. Trop obséquieux. Je n’aime pas sa façon « conte de fées » d’exposer la chose. Les filles marchent plein gaz…Shirley semble prête à jurer que c’est parfait. Ta Miranda, elle ne semble pas si facile à faire marcher et la dernière qui est arrivée…saurais pas dire….quant aux deux mecs…pas à dire, le tel…Paser ?...oui…lui…celui là il prend la chose très mal…

Josh semblait partager son avis.

C’est bien beau la confrérie des gardiens du secret mais… Pourquoi ? Pourquoi nous aideraient-ils sans qu’il y ait un but inavoué là-dessous ?

Là, Paul se retrouvait dans son élément…retrouver des buts inavoués !

Le plus sûr. Faut encore trouver lequel et pour ça il va falloir jouer son jeu un moment encore.

Tu as vu la tête de Rassim quand je t’ai… « enlevé ». Je parie que notre conciliabule actuel ne lui plaît pas.

Il n’a pas aimé du tout. Pas d’échange d’information. Tant qu’il nous tient à la dérive, çà semble l’accommoder.

J’ignore d’où ça me vient… Faut-il abonder en leur sens ou… ficher le camp ?

C’est la première idée que j’ai eue.

Laisser les filles se réunir est primordial dirait-on. D’un côté, je sens qu’il le faut, d’une autre j’ai des doutes. T’en penses quoi ?

La seule chose qui pouvait lui sembler positive de tout cela était que l’étrange répulsion au sec qu’ils subissaient avec leurs belles allait s’amoindrir voire disparaître. Il ne rêvait que d’une chose…ficher le camp au plus vite en emmenant Shirley avec lui.

Attendons. Une fois la cérémonie des retrouvailles des filles finies…qui nous délivrera du « problème »…et si on doit en croire, à tout ce roman, nous rendra la mémoire et selon ce que tu dis…certains pouvoirs !

Joshua semblait partager l’idée, en fait, il écoutait avec véritable révérence ce que Paul disait, comme si sa parole était digne de toute confiance. Cela ne faisait que corroborer un peu plus toute cette histoire tordue…Il avait été le grand prêtre et l’autre un obéissant subalterne mais Paul ne se sentait pas d’esprit à devenir meneur d’hommes, pas dans cette vie. Lui, il faisait les choses à sa façon, sans équipe…cavalier seul, la plupart du temps. Il aimait prendre des risques sans pour autant mêler les autres à ses décisions. Tout était différent, à présent…qu’attendait on de lui ? Qu’il trouve la solution parfaite pour les tirer de là, sans trop d’ennuis ?

Pendant un moment les deux hommes burent en silence. Malgré ses efforts Paul ne parvenait pas à se souler convenablement…même pas un peu. Bizarre, avec tout ce qu’il avait ingurgité à toute vitesse, il aurait dû pour le moins avoir les idées troubles…ce n’était pas le cas. Il se sentait parfaitement lucide. Avec un soupir dépité et après avoir vidé son verre, Paul se tourna vers celui qui se disait son plus vieux pote.

On est tous dans la même galère. On doit prendre des décisions ensemble. Peut être dans le passé j’ai été celui que tous suivaient aveuglement, (sourire de travers), là…les temps ont changé, j’ai changé…nous avons tous changé…je ne suis pas un gourou et vous ma secte…oublie ça, si tu y avais pensé ! Nous devons trouver le moment pour en parler…tous. Partons de l’idée principale : se tailler, berner Bey et Ramose en passant…mais tu sais aussi bien que moi que ce ne sera pas facile…pas du tout. Je pressens qu’on les aura collés à nos basques, ces gardiens du secret et si l’autre existe…on ne va pas tarder à le savoir.

Force fut de rentrer au bercail où Rassim Bey les attendait, angoissé ? En les voyant apparaître, c’est de justesse s’il ne pleura pas de soulagement. Paul lui aurait brisé sa canne sur la tête mais au lieu de cela alla prendre sagement place dans un fauteuil.

Et maintenant, cher Mr. Bey…racontez nous…quelle est la suite des évènements !? Où est le Dr. Templeton ?

Aux humbles dires de Rassim Bey, Shirley et les autres se préparaient pour le dîner. Ils feraient mieux de s’y mettre, eux aussi

Seulement nous six ?...Je pense que le frère de celui que vous nommez Paser ne sera pas du tout content…Pas prévu ? Faudra s’y faire, Bey…il y a pas mal d’imprévus, là…

Rassim Bey s’agita. Paul Morgan s’était montré indocile depuis le début, ne croyant qu’à moitié ce qu’on lui racontait mais en ce moment, ce n’était pas face un homme capricieux qu’il se trouvait mais bien face à Bakenhonsou, le grand prêtre…sauf, bien entendu, que l’américain n’en était pas du tout conscient. Il émanait de lui une aura de pouvoir, de magnétisme que lui, humble Djar, fidèle domestique, ne pouvait qu’accepter…
Mais bien sûr…les temps avaient changé…les circonstances aussi…forcement, lui avec ! Pour la première fois, depuis 1.390 av. Ch, Djar, maintenant Rassim Bey, se trouvait dans un position de pouvoir…après tout, si on a près de 4.000 ans pour peaufiner une intrigue, on s’attendait forcement à que ça donne quelque chose de bon…

Un joli petit salon, d’aspect intime, avec vue sur la piscine avait été apprêté pour le dîner…à sept. Paul n’avait pas cédé d’un pouce. Nick McKenna serait de la partie, peu importait qu’il ne soit pas l’un des élus, il était très proche à l’un d’eux et vu son caractère ombrageux, ne se laisserait pas écarter de l’histoire facilement.

Les quatre hommes se trouvèrent réunis. Ces dames tardaient…

Nous devons parler très sérieusement de tout ce qui se passe, assura Paul, mais pour cela…je pense que la discrétion sera de mise…sait on jamais qui écoute ce qu’on fit…Josh, toi qui as des pouvoirs insoupçonnés…Y a-t-il quelque chose que tu puisses faire pour éviter qu’on voit et entende ce que l’on dit ou fait ?

Ce disant, il se tourna vers un des coins de la pièce et sourit, mauvais.

Désolé pour vous Mr. Bey…c’est une réunion privée ! Dites au revoir à votre surveillance !

Dans une autre pièce de la belle demeure, Rassim Bey tordit le geste. Morgan le narguait en regardant droit à la caméra, comme s’il avait su exactement où elle était située…Dix secondes plus tard, après un dernier balayement général de la réunion…ses écrans restèrent en blanc et le son se vit réduit à un désagréable grésillement.
Shirley, Miranda et Isabel venaient d’arriver… Les deux premières rejoignirent leur partenaire, sans aucun doute…Miss Miller eut un moment de doute et finit par aller se placer entre les frères McKenna.

*Comme quoi…rien ne marche comme voulu, là !*

Sans le vouloir, sa main frôla celle de Shirley…et il ne se passa rien à part un délicieux frissonnement de plaisir. Étonnés et ravis, ils échangèrent un regard qui dût être fort éloquent car, sautant sur les prémices, Miranda se pendit littéralement du bras de Cromwell et la jolie Miss Miller, après un insignifiant doute…passa un bras sous celui de chacun des frères.

*En voilà une qui ne veut pas de risques !*

Rassim Bey avait soigné jusqu’au dernier détail et le gentil dîner à sept de passa dans une ambiance de conviviale raideur. Tous étaient aux aguets, pris dans une situation incompréhensible. Au dessert pourtant on était arrivés à un consensus commun.


Demain..,après la cérémonie concoctée par Bey, on retrouve ce qu’on doit retrouver…et on s’égaille dans la nature…Oui, ma chérie, nous aussi…On restera en contact…mais pas question d’offrir cible commune en restant ensemble…

Des avis s’échangèrent. Chacun partirait de son côté, avec ou sans sa chacune…au choix.

Un rendez vous resta fixé…Hawaii, deux mois plus tard. Loin, le plus loin possible …

En prenant congé, malgré lui, de sa bien aimée, Paul se sentait malheureux.

Mais demain…quand on sera passés par ce qu’on nous réserve…on s’en ira…je sais, ma belle, ce n’est pas ça que tu voulais…mais…je ne vais pas rester un instant de plus que nécessaire ici…je t’aime…ai confiance en moi !

C’est vrai que ça ne leur produisait plus de décharge électrique. Que l’embrasser tenait du merveilleux, que leur désir était partagé. Un bon sens surgi de nulle part, exigeait d’attendre…

Dormir ? Non. Ce n’était pas du sommeil ça…plutôt un état incertain et angoissant…asphyxiant…en un dernier réflexe de conscience…Paul parvint à se traîner vers la fenêtre et l’ouvrir…
Revenir en haut Aller en bas
Shirley Templeton
Admin
Admin
Shirley Templeton


Messages : 161
Gallions : 38822
Date d'inscription : 08/01/2010

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyMer 8 Sep - 0:12

Les six ! Réunis et pourtant encore distants, comme se méfiant les uns des autres.
Ils avaient dû changer, fatalement, mais quelque chose de puissant demeurait vibrant entre eux.
L’attraction irrésistible pour Paul en était une preuve. Cette sorte de reconnaissance des amies, en était une autre, Shirley en était persuadée.
Qu’elles ne puissent se toucher pouvait sembler… logique, cependant… L’instance et l’embarras de Rassim Bey avaient quelque chose de dérangeant. Il semblait connaître tant de choses. Pourquoi ne leur délivrait-il ses informations qu’au compte-gouttes ? Pour les ménager ? Miss Templeton en doutait.
Assez chavirée par les évènements « magiques » - comment appeler ça autrement ? – pour son plus grand désarroi, le plus grand de la bande accrocha Paul et déserta la compagnie.
Mésyt semblait contrariée par l’état de Jack-Paser. Il est vrai que les trois derniers arrivants ne payaient guère de mine, surtout le blond.
Très affable, Rassim Bey affirma qu’il allait le retaper. Qu’en attendant le retour de Paul et Josh, ces dames feraient bien de se préparer au dîner qui ne tarderait pas. C’était plus un ordre qu’une invitation…

Chacune fut passablement isolée des autres. Pour la première fois depuis qu’elle séjournait chez le conservateur, Shirley se sentait mal à l’aise. Elle eut beau détailler son appartement, elle n’y distingua rien de changé, pourtant l’impression d’être surveillée demeura.
Puisqu’il y avait peu de temps qu’elle s’était changée, Shirley se contenta de se rafraîchir tout en réfléchissant. Que faisait donc là le second homme ramené par Cromwell ? Les présentations avaient été plus que succinctes.
Sans trop savoir pourquoi, la jeune Egyptologue pressentait des complications dans cette réunion.

L’heure s’avança doucement ; il fut temps de descendre rejoindre les hommes en espérant que Paul soit rentré de son escapade. Cela ne l’avait pas trop surprise qu’un aparté ait lieu entre ceux-là. Un souvenir… ? Peut-être. Shirley savait que des liens solides avaient unis ces « vieux » copains.
Dans le vestibule menant au salon, elle croisa Neith et Mésyt. Une retenue similaire les empêcha de s’étreindre et renouer le cercle d’une amitié millénaire. Ce n’était pas le moment. Shirley, comme craignant des oreilles indiscrètes, souffla à l’adresse de ses sœurs :


Il faudra que l’on se raconte tout dès que possible !

Assentiment muet ; elles entrèrent là où les hommes siégeaient. Chacun retrouva sa chacune avec un plaisir évident sauf en ce qui concernait les frères McKenna et Isabel. Chose étonnante, pas de Rassim Bey en vue. Il les laissait seuls ?


*Serait-ce un piège ? *

A croire que tous craignaient d’être épiés, la conversation fut lente à démarrer. A tour de rôle, ils se présentèrent mieux les uns aux autres. Celui qui parla le moins fut sans conteste Jack-Paser. Il demeurait fermé, comme s’il ne pensait qu’à une seule chose : s’en aller.

Shirley en vint au sujet capital : leur étrange destinée :


Je ne sais pas pour vous mais moi j’ai toujours eu vaguement conscience d’être rattachée à l’Egypte et qu’il me manquait quelque chose. Maintenant, je sais que c’est vous qui me manquiez mes sœurs ; vous… et toi.

Geste innocent, des mains qui se frôlent. Pas de méchante secousse.
Son regard en dit plus long que ses paroles. Les autres jeunes femmes partageaient probablement des sentiments similaires envers leur compagnon quoiqu’ Isabel tournât la tête successivement vers les McKenna.


Bey a-t-il donné des indications sur la cérémonie de demain ? J’avoue que ça m’inquiète un peu de n’être au courant de rien.

Isabel leur fit alors part d’une petite conversation échangée avec le maître des lieux. Selon lui, cette étape serait cruciale. Pas de consommation d’union hâtive, récupération de pouvoirs, etc. Quelle embrouille.
Paul trancha :


Demain..,après la cérémonie concoctée par Bey, on retrouve ce qu’on doit retrouver…et on s’égaille dans la nature…

Stupeur féminine. Les hommes, eux, semblaient d’accord.

Que veux-tu dire, mon chéri ? Que l’on sépare… Tous ?

Oui, ma chérie, nous aussi…On restera en contact…mais pas question d’offrir cible commune en restant ensemble.


Ça lui fit un mal de chien. A peine retrouvés, il faudrait se quitter…

Elle savait qu’il n’avait pas tort mais cela faisait mal quand même. Elle entendit vaguement qu’il était question d’un rendez-vous à Hawaii dans les deux mois suivant.
Le repas était terminé, on leur servit du café, Rassim fit une courte apparition à ce moment. Son air affable dissimulait assez mal son agacement. S’il avait mis des micros dans la salle, ils n’avaient pas fonctionné :


Désolé de mon retard, jeunes gens. J’aurais souhaité partager ces sorbets avec vous mais j’ai eu fort à faire afin de tout organiser et prévenir discrètement nos fidèles. Le rendez-vous est fixé à 23 heures, à Karnak après la représentation son et lumières des touristes. On vous y conduira en voiture individuelle. Les rituels de purification commenceront aussitôt. Je vous donnerai les détails sur place. Je me retire. Il va sans dire que je vous conseille vivement d’en faire autant, et… d’être sages.

Les sept personnes s’interrogèrent du regard. Une certaine joute verbale sembla vouloir naître entre les frères et la douce IsabeL.
Josh, un clin d’œil coquin à la bande, s’empara de la main de Neith et l’entraîna dans les couloirs. Paul, non désireux de se mêler d’une discussion, suivit le mouvement avec Shirley sur les talons.
Arrêt devant la porte de la chambre de sa demoiselle.
Comme il était bon de pouvoir l’étreindre au sec sans aucun autre désagrément qu’une envie folle de poursuivre ces échanges dans des conditions confortables… Le bon sens s’imposa à eux :


Je ne veux pas te quitter Paul, plus jamais...

Mais demain…quand on sera passés par ce qu’on nous réserve…on s’en ira…je sais, ma belle, ce n’est pas ça que tu voulais…mais…je ne vais pas rester un instant de plus que nécessaire ici…je t’aime…aie confiance en moi !

Elle ne demandait pas mieux que de s’en remettre à lui. Mais le quitter était… impossible à envisager.

On a toute la journée de demain pour préparer notre fuite. Je t’aime !

Seule dans ses quartiers, Shirley ne retint plus ses larmes.

*S’il ne veut pas partir avec moi… j’ai l’impression que j’en mourrai !*

En fait de mourir, il lui semblait que c’était bel et bien en train de se produire. Une sueur profuse dégoulinait tandis qu’elle étouffait doucement. L’esprit brouillé, elle voulut gagner la terrasse mais n’y arriva pas. Tout chavira.
Des rêves ou cauchemars la hantèrent longuement. On la relevait du carrelage ? La portait dans son lit ? Dans un brouillard, il lui sembla reconnaître des visages :


*Emath et… l’autre gars…*

Quand elle ouvrit les yeux, le soleil était haut. Sa vision s’éclaira détaillant au-dessus d’elle deux visages anxieux :

Miranda ? Josh ? Que… ?

Elle mourait de soif et ne comprenait pas la moitié de leurs explications. A les entendre, tous avaient été victimes de malaises cette nuit.

Paul ? s’effara-t-elle.

Ouf ! Il allait bien. Sans l’intervention de Paggitt sans doute seraient-ils encore dans les vapes. Qu’avait donc manigancé Rassim ? Pourquoi ?

Réhydratée, Shirley voulut aller voir Paul. Les autres ne purent contenir son élan vers la chambre de son aimé. Il somnolait encore mais réussit à lui sourire en la réceptionnant dans ses bras :


Tout va bien ? Mais qu’est-ce que l’on a eu ?

Cromwell assura qu’il ne s’agissait que d’un somnifère puissant. Les hypothèses allèrent bon train.

Peut-être Bey a-t-il voulu juste nous tenir éloignés les uns des autres, histoire de nous empêcher de mijoter quoique ce soit de contraire à ses plans à lui.

C’était le plus logique mais pas nécessairement vrai.
Ils discouraient encore quand Jack-Paser flanqué d’Isabel-Mésyt entrèrent en scène. Pas à dire, ils n’étaient pas très frais, non plus mais leur mine ravagée annonçait surtout un drame : Nick avait disparu !




Une file de voitures s’était présentée devant la villa du conservateur. Confortables, elles l’étaient mais leur passager tirait des têtes jusque par terre.
Intérieurement, Shirley tremblait. L’enjeu était gros… énorme, à tout prendre.
Rassim Bey avait été clair : Ou ils filaient droit ou Nick McKenna, celui qui n’avait pas de lien direct avec leur histoire, y passerait.
Karnak est un site encore plus impressionnant de nuit. Toute sa majesté passée ressort sous le scintillement des étoiles.
Loin du romantisme des lieux, Miss Templeton angoissait à l’idée des conséquences. Quelqu’un savait-il exactement ce qui arriverait ? Pas elle en tout cas.

Les véhicules s’arrêtèrent au parking déserté depuis peu par les cars de touristes. Redevenus calmes et silencieux, seulement ouverts aux souvenirs, si les temples murmuraient entre eux, personne ne les perçut.

Une procession s’organisa : filles d’un côté, garçons d’un autre.
La purification commença aussitôt les jeunes femmes arrivées dans une sorte de vestibule éclairé aux flambeaux. Des tables de pierre les attendaient. Des aides-soignantes, vêtues de lin blanc et portant perruque, les dévêtirent. Gênée, Shirley accepta cependant ce traitement avec stoïcisme... tout le monde n’en fit pas autant. L’épilation rituelle à la pince de cuivre, fut une véritable torture. Aucun poil indécent, en nul endroit du corps, ne devait subsister.
Se mordant les lèvres, Shirley subit.
L’épiderme fut ensuite passé avec vigueur aux frictions au natron. Cela brûlait affreusement…
Heureusement, on les conduisit de suite au lac sacré.
Le naturel du passé reprit le dessus. Les mots antiques surgirent des mémoires, des chants s’élevèrent. Mains en coupe, Shirley déversa l’eau divine sur la tête de Neith avant de procéder mêmement sur celle de Mésyt. Ses compagnes lui rendirent la pareille en chantonnant.
Enfin pures, les filles sortirent du lac. Des servantes les vêtirent de lin immaculé avant de les faire asseoir pour y subir un maquillage des yeux et des lèvres. La séance se termina avec la pose d’une riche perruque ornée d’un diadème.

Dans un état second, Shirley-Isisnefer avança en tête vers une estrade où une statue d’Amon se dressait.
Un éclair de lucidité lui fit prendre conscience de l’entourage.


*Ben mon vieux !*

D’où sortait cette foule ? Les couloirs étaient pleins de gens sapés de pied en cape en costume d’époque. Hollywood n’aurait pas mieux réussi sa mise en scène ! Sur un des côtés de l’estrade, ceux qu’aperçut Shirley lui firent ouvrir des yeux ronds. A n’en pas douter il s’agissait des prêtres. Portant la peau de léopard en travers du torse, des bracelets au bras, elle reconnut difficilement son adoré avec cette lourde perruque qui lui tombait sur les épaules. Un peu en retrait de Bakenkonsou, Paser et Emath, crânes rasés, imberbes sous leur longue toge blanche, fixaient le trio que l’on menait vers eux.
Aucun des six ne souriait.
Intérieurement Shirley tremblait. Des souvenirs affluaient, confus mais suffisamment clairs pour redouter la suite.
D’aussi loin qu’elle se rappelait des bribes de rencontres, celles-ci ne s’étaient jamais déroulées dans autant de solennité. Elle s’étaient passées simplement, au hasard d’un contact, sans fioritures, ni prières.
Maintenant, face à la statue du dieu, Isisnéfer avait vraiment l’impression de renaître.
En grands atours d’opéra, Rassim Bey apparut. Sa longue robe bleue constellée de symboles ésotériques le faisait ressembler à un mage expert en divination.

Il avança sur le devant de la scène, tel un présentateur de numéro :


*Il lui manque un micro !*
pensa irrévérencieusement Shirley.

Mes frères, mes sœurs, soyez bénis. Ce soir est un grand soir ! Le soir que nous attendions depuis la nuit des temps ! Le message a circulé au travers des siècles : un jour nouveau se produirait, un jour merveilleux verrait de grandes choses ! IL EST ARRIVÉ ! Il est arrivé !

Une grande clameur souleva l’assistance.

Et Maintenant laissons s’accomplir ce qui doit l’être.

Un grand silence se fit. On n’entendait plus que le bruit des respirations et le crépitement des flammes. Nul ne bougeait. Les filles ne savaient absolument pas ce que l’on attendait d’elles. Les vapeurs d’encens étaient lourdes, envoûtantes.
Tournées vers la statue, les antiques prêtresses la contemplèrent en silence.
Hallucination ? Shirley eut l’impression que le visage du dieu de pierre s’animait : il souriait !
Une joie immense vibra dans le cœur de la jeune femme qui écarta les bras en même temps que ses amies. Les mains se nouèrent, le cercle se ferma, un chant monta :


Ô Amon, ô douce Isis, nous voici rassemblées en votre présence. Comme Nout avale le soleil chaque soir et le recrache dans la splendeur du matin, accordez à vos humbles servantes la grâce de renaître à nouveau.

Le chant fut psalmodié à trois reprises. Il ne se passait toujours rien puis…
Comme sous la poussée d’un souffle issu de nulle part, les flammes des torches vacillèrent, d’abord doucement, puis de plus en plus fort. Une sorte de tourbillon se forma autour des filles en transe.
Yeux révulsés, elles perdirent la notion de ce qui se déroulait. L’assistance, elle, était médusée.
Une aura lumineuse enveloppa le trio soudé, s’enroula autour de chaque corps, en épousant chaque courbe. Isisnefer ressentit une étrange brûlure traverser son dos et lui gagner son cœur.
L’aura atteignit chaque jeune femme de la même façon. Trois rayons d’une clarté hallucinante sortirent de leur poitrine, se tordirent pour se réunir et ne former qu’un seul et unique faisceau qui effleura l’effigie du dieu avant de s’élever haut, très haut vers le ciel étoilé.
Brutalement le phénomène cessa. Foudroyées, hébétées, les filles se lâchèrent.
Une grande clameur montait autour d’elles alors qu’elles reprenaient pieds dans la réalité.
Isinefer étreignit ses amies, des larmes dans les yeux mais elle chercha surtout à rencontrer les yeux de Paul. Elle devait le faire, s’unir à lui de corps et d’esprit pour lui transmettre…
Mais… rêvait-elle ?
Non !
Exorbitée, elle entrevit une lutte à proximité. Des hommes armés de coutelas s’abattaient sur le trio de prêtres. Dans leur regard brillaient des lueurs de meurtre

Revenir en haut Aller en bas
Miranda Sheridan
Admin
Admin
Miranda Sheridan


Messages : 426
Gallions : 30375
Date d'inscription : 08/01/2010

Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles EmptyMer 8 Sep - 19:44

Il eut un soir, puis un matin…c’était la logique des choses, non ? Miranda, elle, pour une fois, s’avouait perdue. Il y avait des heures vides pour lesquelles la belle n’avait pas d’explication…des heures vagues…un temps disparu quelque part entre ici et là. Mais enfin, qu’est ce que ça pouvait bien faire si Joshua Cromwell avait dit qu’il l’aimait !

Amour, en voilà un mot. Presque un tabou pour elle qui s’était interdit d’y penser. Les sommets du pouvoir sont solitaires, elle l’avait appris à ses dépends dès son plus jeune âge. Entourée d’une cour d’envieux et profiteurs, Miranda avait élu le rôle du tyran prépondérant dont les désirs sont des ordres et le mépris, châtiment. C’était sa cuirasse, son unique défense. Consciente de n’être approchée que par intérêt, la méfiance était de mise, le tout aromatisée d’une arrogance détestable…et puis lui… bouleversement total. Révélations inédites…une histoire de fous…

Faisant une démonstration de son talent comme sorcier, Josh avait repéré et ramené du désert où ils vaguaient, les deux manquants à l’appel…sauf qu’ils étaient trois. Déjà le Dr. Templeton et elle s’étaient reconnues…Isisnefer et Neith…par la force des choses, la jeune femme qui venait d’arriver ne pouvait être autre que Mesyt. La pauvre semblait sortir d’une bagarre de bar. Tout comme les deux hommes qui l’accompagnaient, dont l’un, grand et blond, avait l’air assez mal en point, ce qu’il prouva allègrement en partant dans les vapes sans faire plus de foin. Aux dires de l’hôte, il était Paser…le troisième prêtre paumé.

On prit ce cher Paser en charge, l’emmenant se reprendre de ses misères. Le grand brun qui venait avec eux déclara être son frère et ne le lâcha pas d’une semelle. Miranda soupira. C’est beau la loyauté !

Mue par le même sentiment que Isisnefer, Neith voulut aller au devant de Mesyt mais voilà que le maître de céans s’interposait.

NON ! Ne vous touchez pas ! Pas encore. Vous aurez tout le temps pour ça après… après la cérémonie ! Mon Dieu que je suis content !

Content!? Il prenait plutôt des allures de chat alléché, celui là ! Cet homme ne finissait pas de lui plaire et Miranda s’enorgueillissait d’avoir un flair certain pour cela mais avant d’avoir pu faire part de ses doutes à son chéri, voila qu’une cohorte de domestiques les entraînait, elle et les autres filles vers …leurs chambres pour qu’elles se reposent. Elle n’avait aucune envie de se reposer, elle !

Mais tant qu’à faire, il fallut se plier aux demandes du maître de maison. La chambre qui lui était destinée ne déplût pas à Miranda, habituée au luxe et l’extravagance, à se laisser servir et choyer. Reprenant vite le poil de la bête, elle commanda de ci de là, fit préparer un bain, eut envie de champagne. Pensive, elle repassa les étranges évènements de cette journée si riche en sursauts.

Tout ne semblait pas tourner aussi rond que voulu par ce cher Rassim Bey, si obséquieux. Selon ce qu’elle avait cru comprendre du bref échange entre lui et Paser, Bey n’était pas un inconnu au bataillon, bien au contraire…Djar ! Ce nom lui disait bien quelque chose…mais quoi ? Elle était là, à faire les cents pas sur le précieux tapis d’Orient quand, après un discret crac, Paggitt se matérialisa face à elle, la faisant sursauter joliment.

Bon sang, Paggitt...arrêtez de faire ça !!!

Excusez moi, miss Miranda, mais c’est la façon la plus sûre de vous contacter.

Ah bon !?...On est quoi ? Prisonniers en quelque sorte ? Ça m’a tourné dans la tête tout le temps…tout ceci est…bizarre, c’est le moindre à dire.

Andrew Paggitt fit une profonde inspiration. Patience.

Je comprends, miss Miranda, que tout ceci ne soit pas facile à assumer pour vous mais quelque chose de très grand est en jeu ici. En quelque sorte, une importante...très importante fusion.

Elle haussa un sourcil et le considéra, intéressée.

Fusion, dites vous ? Parlez clair et vite, Paggitt.

Comme si on avait le temps de faire autrement.

Je ne suis qu’un sous fifre, sans trop d’importance mais je vois et écoute en sachant me rendre invisible *À votre service, on apprend vite, ça*. Ceci va plus loin qu’une simple réunion avec vos amies, les prêtresses. On veut quelque chose de vous…je ne sais pas trop quoi mais j’ai idée que cela a beaucoup à voir avec ces pouvoirs que vous allez récupérer demain, après la cérémonie.

Nos pouvoirs ?...Oui, il me semble avoir entendu quelque chose de ça…et alors ? Laissez moi deviner, le tel Bey n’est pas si honorable qu’il voudrait sembler. Il mise en deux jeux, celui là…et alors ? Il nous réunit, Isis, Mesyt et moi…que deviennent…nos compagnons ?

Le secrétaire baissa la tête, affligé.

Je ne le sais pas encore, Miss Miranda…je ne voulais que vous prévenir, soyez sur vos gardes.

Paggitt, vous êtes pourtant l’un…d’eux. Une de ces gardiens ou que sais je…Pourquoi…me mettre en garde ? Je vous ai toujours…fait la vie difficile. Vous avez plus d’une raison pour me mépriser… Je ne comprends pas.

Il soupira en secouant la tête.

Je ne vous méprise pas, Miss Miranda…je vous admire. Vous n’êtes pas un patron facile mais…ma loyauté vous appartient…je veille sur vous depuis des années, je l’ai promis à votre père…je ne faillirai pas au mot engagé.

Vous…vous me laissez sans mots, Paggitt…

C’était bien le cas de le dire mais avant qu’elle puisse s’épancher, il avait de nouveau disparu la laissant confuse…émue.

*Incroyable…quelqu’un qui semble t’apprécier vraiment, Miranda…ça te change un peu, non ?*

Elle réfléchissait encore quand une domestique vint la chercher, l’invitant à rejoindre les autres pour le repas du soir.

C’est pas trop tôt, hum !, fulmina t’elle pour la forme tout en jetant un dernier coup d’œil au miroir. L’image renvoyée la satisfit pleinement. Le cœur en joie rien qu’en pensant revoir Josh, la jeune femme suivit la domestique.

Dans le vestibule, elle croisa Mesyt et Isisnefer. Refrénant le même élan de se toucher, les trois se contentèrent de se sourire.


Il faudra que l’on se raconte tout dès que possible !, avait soufflé la douce Isis, comme si elle craignait qu’on les écoute.

Bien sûr qu’on le fera !, aurait voulu assurer Miranda qui se fichait pas mal des oreilles indiscrètes, mais pour une fois, préféra tenir sa langue.

Josh, Paul Morgan et les frères McKenna se trouvaient déjà là. Pas trace de Rassim Bey, de quoi la réjouir encore plus tout en rejoignant son chéri.

Une certaine gêne flottait dans l’ambiance, due sans doute, à l’impression d’être vigilés, mais Morgan leur assura qu’il n’en était rien, que Cromwell s’en était chargé.


Merveilleux ! Alors tant qu’on y est…ce serait bon de nous présenter. Si on croit à tout ce qu’on raconte…cela fait un bon bout de temps que nous ne nous sommes pas vus…Je suis Miranda Sheridan, connue au début de tout comme…Neith. Ma présente existence n’a rien à voir avec celle d’une prêtresse de l’antique Égypte…je suis une femme d’affaires qui connaît beaucoup de succès et je ne compte rien changer à cela…enfin, pas tout !

Comme cela faisait du bien pouvoir se rapprocher de Josh sans se sentir électrocutée… Le regard qu’ils échangèrent fut plein de délicieuses promesses.

Les autres procédèrent aussi à se présenter. Aucun médiocre dans les rangs, pas un paumé de la vie…tous et chacun avaient du succès dans ce qu’ils avaient entrepris. À croire qu’en cette occasion leurs esprits avaient cherché avec minutie en qui réincarner. Plus ou moins suspicieux, pas tous ne croyaient aveuglement à la fable qu’on leur racontait. Des hommes, Paul Morgan et Jack McKenna emportaient les palmes. Des filles, elle aurait pu jurer que le Dr. Templeton y croyait dur comme fer et qu’Isabel Miller n’en savait trop rien.

Quant à elle, Miranda avait des avis partagés.


Elle sut ne pas s’être trompée en entendant Shirley prendre la parole :

Je ne sais pas pour vous mais moi j’ai toujours eu vaguement conscience d’être rattachée à l’Egypte et qu’il me manquait quelque chose. Maintenant, je sais que c’est vous qui me manquiez mes sœurs ; vous… et toi.

Le regard jeté à Morgan fut tout un poème, une totale déclaration d’amour. Par contre la jolie miss Miller ne savait pas trop où en donner de la tête entre ces deux frères si différents. Miranda serra la main de Josh et sourit.

Bey a-t-il donné des indications sur la cérémonie de demain ? J’avoue que ça m’inquiète un peu de n’être au courant de rien.

Mésyt leur fit part alors de sa petite conversation avec Rassim Bey. Elle lui avait posé la question qui les taraudait tous : cette étrange répulsion électrique, brûlante ou glaciale qui les affectait tous, disparaîtrait elle ? Il jurait ne pas être sûr de ce qu’il se passerait.

A l’avis de Miranda, l’homme mentait de bout à bout. Toute sensation bizarre de répulsion avait totalement disparu dès qu’ils avaient été tous réunis. Il devait bien le savoir mais insistait sur la non consommation de leur union, ce dont elle se fichait allègrement. Les derniers mots de ce discours notable tenu à Isabel furent répétés fidèlement :

Je sais ce que vous vous dites, mais je fais cela pour votre bien…. Vous devez apprendre à maîtriser votre magie et si Ramose vous tombe dessus avant que vous ne soyez prêts, vous ne pourrez pas le vaincre, en plus c’est votre dernière chance, votre dernière réincarnation, c’est l’ultime combat.

Pas le temps de placer un mot, le journaliste trancha, souverain :

Demain..,après la cérémonie concoctée par Bey, on retrouve ce qu’on doit retrouver…et on s’égaille dans la nature…

Quoi ?...ce n’est pas un peu...contradictoire ?, elle n’avait pas la moindre intention de se séparer de Josh, qui lui semblait très d’accord avec les plans de Morgan. Elle attendrait les explications pertinentes et continua d’écouter ce que les autres avaient à dire, tout en mijotant sa petite version des choses. Tout irait bien. On se retrouverait deux mois plus tard à Hawaii. Magnifique…

Ce cher Rassim Bey les honora de sa présence à l’heure du café. Il n’était pas content du tout même si le dissimulant sous un sourire onctueux à vous tourner le cœur. Elle ne retint de ses paroles que l’heure et les lieux….être sages ? Mais bien sûr…

On échangea des regards circonspects, à part attendre, que pouvaient ils faire ? Bien entendu, elle avait déjà sa petite idée derrière la tête…

Josh semblait être de son même avis. Sans rien dire, il la prit de la main et l’entraîna à sa suite.

Sa chambre ? La sienne ? Qu’est ce que cela pouvait bien faire ? À peine la porte refermée sur eux, elle lui entoura le cou de ses bras et attirant son visage vers le sien l’embrassa avec cette délicieuse folie qui lui hérissait la peau alors qu’il l’enserrait dans une étreinte d’ours.

Je me fiche de ce peut dire Bey…je te veux…je t’aime tant !!!

C’était partagé. Merveilleusement réciproque Tout devenait possible auprès de lui, même penser à aimer vraiment, sans doutes …pour toujours ! Ils s’accordaient pleinement, se complétaient. Sans lui, rien n’avait de sens…

Mais passé le premier délire se retrouver, Miranda lui fit part de ses réflexions.

Cette après midi, Paggitt est venu me trouver pour m‘avertir. Il semblerait que Bey a sa petite idée pas trop orthodoxe…Non, il ne savait pas de quoi il en va…Il veut que nous soyons sur nos gardes…Josh, quand cette cérémonie sera finie, nous partirons ensemble, n’est ce pas ?

S’il lui disait que non, elle ne pourrait pas le supporter mais faisant étal de son aplomb habituel, loin d’être ressenti là, elle se poursuivit avec ses projets.

J’ai une maison magnifique à St. Bart…loin de tout...mais si tu ne veux pas, j’irai où tu décideras. Je ne veux pas me séparer de toi un instant, tu m’entends…À ce qu’on dit, ça fait des siècles que je te cours après…et puis…celle-ci devrait être la dernière fois…autant ne pas tout faire foirer, non ?

Pas question. Si Rassim Bey avait mis la chambre à l’écoute, il eut la somptueuse confirmation que pas tout le monde ne se pliait à ses…demandes.

L’étrange malaise se manifesta presque en même temps pour les deux. Miranda eut la vilaine sensation de manquer d’air, une faiblesse effroyable s’emparait d’elle.

Josh…Josh…je ne…me sens pas bien…du tout…

Il n’en menait pas large, non plus…

Il…il…ne peut pas…pas…encore…, gémit elle avant de s’effondrer dans les bras de son aimé presque inconscient aussi.

Miss Miranda ! MISS MIRANDA !!!

Mais qui diables tapotait ses joues de la sorte ? Qui osait crier !? On lui aspergeait le visage, on lui faisait boire un truc amer comme du fiel…quelle horreur, mais qui eut l’heur de la ramener des limbes cotonneux.

Paggitt !...Qu’est ce qu’il se passe !?

Il s’occupa d’abord de Joshua, lui appliquant le même traitement. L’explication : on les avait drogués.

Wow...génial, M.Bey entend qu’on suive ses ordres au doigt et à l’œil.

Le soupir de Paggitt parlait bien de ses pensées. Miranda l’ignora. Une fois, Josh assez d’aplomb, il disparut avec Paggitt s’occuper des autres qui sans doute avaient subi le même traitement de faveur.

C’était bien le cas. La raison ? Le Dr. Templeton la trouva vite fait :

Peut-être Bey a-t-il voulu juste nous tenir éloignés les uns des autres, histoire de nous empêcher de mijoter quoique ce soit de contraire à ses plans à lui.

Peut être oui, peut être non ! Et puis la cerise sur le gâteau. Jack McKenna bouleversé, suivi d’Isabel en larmes, vint leur faire part de la disparition de son frère.

Mais…aux dires de Paggitt, il était bien là tantôt !

Sauf que voilà…il n’y était plus.

Ils étaient réunis dans un petit salon, à élucubrer sur les maintes explications qu’ils pouvaient avoir quand Rassim Bey, l’air rogue, ressemblant peu à l’hôte paternaliste qui les avait reçu, fit acte de présence.

Je vois qu’encore une fois vous n’en faites qu’à votre tête.

Nous sommes citoyens du monde libre, mon cher Bey !, gronda Miranda qui avait déjà en tête d’appeler l’ambassade et demander l’aide des Marines, au besoin.

Vous êtes ce que vous êtes et un point c’est tout !, s’énerva l’autre, les Élus….et c’est à cela que nous devons nous remettre, bien que je ne sois guère satisfait avec ces réincarnations actuelles.

Pourquoi ? Parce qu’on n’est pas des pauvres bougres ignorants faciles à mener du nez !, voulut elle savoir, combative.

Il devait avoir beaucoup de cela. Mais déjà Jack-Paser, furieux, voulait savoir qu’était devenu son frère.

Il va bien. Pour le moment. Vous avez intérêt à suivre les indications données, au pied de la lettre, sinon ce cher Nicholas McKenna connaîtra une fin…exemplaire.

Paul et Josh durent retenir Jack avant qu’il ne défonce le portrait de Bey avant de l’étrangler.

Pour combler le tout, la bout de bois magique de Cromwell avait disparu.

Reste Paggitt, dit Miranda à voix très basse, en priant pour ne pas se tromper.


Le temple de Karnak. Miranda sentit un long frisson la parcourir. Elle détestait cette situation qui échappait à son contrôle, où son pouvoir n’y pouvait rien, où ses influences ne voulaient rien dire. Mais la menace de Bey avait suffi pour que tous se plient à l’ordre donné. Personne ne se voulait coupable de la mort de Nick McKenna.
Lieux somptueux mais Miranda ne se sentait pas d’esprit touristique. Qu’on en finisse au plus vite. Ne pas savoir ce qui allait se passer l’énervait terriblement.

Elle fut assez vite informée et cela ne lui plût pas du tout. Déjà des femmes qui semblaient sortir d’un autre âge, attifées de tuniques blanches et perruques sombres, entreprenaient de la dévêtir.

Non mais…ça va pas chez vous…je ne laisserai que personne ne me mette à poil !, tempêta t’elle.

On lui expliqua succinctement que cela était nécessaire pour le rituel de purification.

Allez au diable ! et…je ne suis pas vierge, si ça vous intéresse !

On passa ce sensible détail outre et o la dépouilla de tout vêtement. La suite n’était pas envisageable. Dépilation intégrale…à la pince de cuivre.

Vous avez tout simplement perdu la tête…Ah non ! Pas ça ! Arrêtez…je vais vous taper dessus !

Elle le fit. Peu importait, on emporta l’aide soignante dont le nez saignait avec profusion et qui fut remplacée par une femme énorme qui la lorgna méchamment.

J’en ai vu de plus rétives que toi, ma colombe…tu ferais bien de t’y mettre.

Miranda hurla de toutes les forces de ses poumons, se débattit, maudit tout le monde copieusement, les menaçant des pires morts possibles. Rien n’y fit. Elle y passa. Après on la briqua au sang avec du natron, la faisant sentir qu’on lui arrachait la peau. Inutile de dire que l’humeur de Miss Sheridan était au meurtre fixe.

Retrouver Isis et Mésyt la remit un peu d’aplomb… Comme jadis, le lac sacré les accueillit pour le rituel de purification. Des mots anciens revinrent, ainsi que les gestes précis. L’eau sacrée lava leurs corps et leurs âmes. Des servantes révérencieuses les aidèrent à revêtir des tuniques immaculées avant de s’occuper de leur maquillage pour finir en posant sur leurs têtes une riche perruque ornée d’un précieux diadème.

*On n’est que des simples prêtresses…à quoi vient tout ce charivari ?*

À la suite d’Isisnefer, Mésyt et elle avancèrent vers l’endroit où se dressait l’effigie d’Amon.

Une foule vêtue d’époque, se massait là.


*Wow…sens du grandiose …Lucas ou Spielberg ?*

Et puis, elle le vit. Son beau, son magnifique Joshua…crâne rasé, imposant dans ses habits de prêtre. À la suite de…Seigneur, était ce Paul Morgan ? Un grand prêtre très hollywoodien, pas à dire. Paser aussi chauve qu’Emath complétait le trio. Ils avaient eu sûrement une allure aussi splendide dans le passé…sauf que leurs yeux, soulignés de khol, n’avaient jamais été…si peu égyptiennement bleus.

Ramenée à des considérations moins terre à terre, Miranda-Neith fixa son attention sur Rassim Bey, paré comme…comme quoi, à la fin ? Un mélange incertain entre Merlin et le grand Vizir de sait on quel film…

Mes frères, mes sœurs, soyez bénis. Ce soir est un grand soir ! Le soir que nous attendions depuis la nuit des temps ! Le message a circulé au travers des siècles : un jour nouveau se produirait, un jour merveilleux verrait de grandes choses ! IL EST ARRIVÉ ! Il est arrivé !

*Et c’est parti pour le show !*

Et le public de clamer, comme tout de rigueur.

Et Maintenant laissons s’accomplir ce qui doit l’être.

Quel silence ! À la lumière des flambeaux, avec ces vapeurs d’encens, lourdes, enivrantes, le spectacle prenait des allures solennelles à souhait. Mystérieux, le Dieu semblait les fixer de ses yeux de pierre….et puis…elle avait des visions, n’avait il pas souri !?

*Ne sois pas idiote, Miranda…c’est une statue !*

Peu importait la logique…quelque chose d’inattendu se passait. Une force inconnue la poussait à lever ses bras, à nouer ses mains à celles de ses compagnes, formant un cercle.

Ô Amon, ô douce Isis, nous voici rassemblées en votre présence. Comme Nout avale le soleil chaque soir et le recrache dans la splendeur du matin, accordez à vos humbles servantes la grâce de renaître à nouveau.

Le souffle inconnu, l’haleine du Dieu même, fit vaciller les flammes, créant ce tourbillon qui les enveloppa, transportant leurs esprits au point de départ…au passé oublié. Lumière, feu purificateur, bienveillance divine. La douleur la traversa, libératrice…et elle se retrouva entrain d’étreindre ses amies de toujours.

On est là…c’est merveilleux…enfin !

Mais le bonheur de ces retrouvailles ne pourrait être complet que si ceux qu’elles avaient aimé toujours, en dépit de tout, étaient avec elles. Rayonnante, elle se tourna pour regarder Emath…

Face à elles, face à la foule massée se jouait un drame…le plus vieux du monde : un assassinat.

NOOOOOOOOOOOOOOOOON !!!

Il résultait plus qu’évident quelles étaient les intentions du promoteur de cette soirée si colorée. Se défaire des trois prêtres. Miranda ne captait pas la raison de le faire mais l’instant n’était pas aux questions.

Rassim Bey, devenu Djar pour les effets, voulut s’interposer.


Laisse le destin s’accomplir, Neith !!! Tu es pure à nouveau, acceptée de nouveau au temple !

Neith il y a 4.000, Miranda maintenant, imbécile…et c’est lui mon destin !

Lui écraser le poing dans la figure fut extrêmement satisfaisant même si assez douloureux.

Du coin de l’œil, elle entrevit ses amies se lancer à la mêlée. Son unique désir : rejoindre Josh.

L’attaque n’avait pas pris de surprise les trois hommes qui donnaient bravement la réplique à ceux qui avaient voulu les poignarder vilement. C’était un vrai plaisir pour les yeux voir Josh envoyer valser ces ploucs, bien secondé par un Jack tout simplement enragé. Paul, lui s’en tirait glorieusement malgré sa jambe malade. Miranda mit la main sur quelque chose de ressemblant à un manche à balai et distribua quelques gentils coups de bâton à droite et à gauche. Elle devina plus que vit, Shirley assommer un gars plus grand qu’elle et Isabel bourrer à coups de poing et de pied, aune autre brute…et puis Paggitt fit une sublime apparition, jaillissant du néant, ce qui décontenança l’adversaire. Il fit des joyeux dégâts, avec son bout de bois, avant de rendre le sien à Josh…Le reste se passa rapidement…Magie opérant à toute, la partie fut emportée, la foule fuyait en cohue désordonnée, épouvantée par ces rayons multicolores qui fauchaient si bien qui s’y croisait…
Enfin réunis et à sauf pour le moment, ils laissèrent à Paggitt le plaisir de ligoter gentiment Bey, qui ayant repris ses esprits gueulait comme un dément. Rapidement réduit au silence par un autre sympathique rayon mais pas moins conscient, il essuya encore un triste revers à ses plans, quels qu’ils aient été quand Paggitt révéla savoir où se trouvait Nick McKenna.

Impérativement, les deux sorciers plus le frangin, étaient les indiqués pour aller le tirer de l’impasse, ce qu’ils firent, avec étonnante célérité.

Miranda ne voulut rien savoir de plus et alla se jeter dans les bras de son Josh.

Allons nous en…disparaissons…oublions cette folie…

Tous partageaient l’avis de vider les lieux en toute vitesse. Ce cher Paggitt eut l’heur merveilleux de rendre leurs blondes chevelures à ces messieurs et de transformer leurs vêtements, en mises plus discrètes.

Prendre congé de ses amies juste après les avoir retrouvées n’était pas aisé, mais il fallait laisser jouer le bon sens. Comme avait dit Paul, rester ensemble faisait croître le risque…et maintenant ils savaient ne pas avoir un seul ennemi…


Suivons notre plan. Nous nous séparons ce soir mais restons unis à jamais…Dans deux mois, à Hawaii.

Ainsi serait fait…si possible!
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





Fouilles Empty
MessageSujet: Re: Fouilles   Fouilles Empty

Revenir en haut Aller en bas
 
Fouilles
Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
XXIème Horizon :: LE MONDE VOISIN :: Le reste du monde-
Sauter vers: